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3 | Tristan me l'a dit

On marchait depuis longtemps dans un silence complet. J'étais derrière, lui devant et je le fixais. Sa démarche était gracieuse et il se tenait droit avec fierté, une fierté que je ne comprenais pas. Qu'y avait-il de fier à être un marginale de la société ? Je ne comprenais pas. Dès la plus tendre enfance, on t'apprend à entrer dans un moule façonné d'avance, faire comme le autres. En tout cas, c'est comme cela que j'ai été élevé. Quand grand-mère venait nous rendre visite, elle n'arrêtais pas de me dire que je ne devais pas être différente. Que même si cela était insipide, ou, au contraire, dangereux, je devais faire comme les autres. Elle me disait ça d'un ton grave et méchant tout en fixant mon père avec dégoût. Je crois maintenant savoir pourquoi. Car lui avait des idéaux bien différent. Au contraire, il me disait que la diversité était la plus belle des choses. Mais je ne l'écoutait pas, j'écoutais grand-mère. Ma grand-mère était sage tandis que papa était un peu bizarre. On se moquait parfois de lui, mais il était gentil. Mais je ne voulais pas qu'on se moque de moi, alors je ne l'écoutait pas, mais je l'aimais. Comme un enfant aime un parent. Je me sentais un peu obligée de l'aimer car personne d'autres ne le faisaient alors je l'aimais de la part de tout le monde.

Mais le garçon devant moi n'avait pas l'air de quelqu'un dont on se moquait. Et il était gentil. Il avait l'air sage et était gentil, un mélange des deux plus grosses influences de ma vie. C'est peut-être pour ça que je l'ai suivi. Mais il n'était pas grand-mère ou papa, c'est peut-être pour ça que je n'ai pas pris sa main. Et je l'ai regretté. Car à un moment je cligne des yeux et le garçon était devant moi, puis l'autre, je cligne des yeux et je ne vois plus que du noir.Puis, je me suis endormie. Quand je me réveille, je suis dans une forêt. Une forêt lugubre. Je savais que je devais pas rester, mais je ne savais pas où aller, car je n'avais nul par où aller alors je me suis mise à avancer car justement, je n'avais peur d'aller nul part.

À nouveau je marchais, mais il n'y avait plus la présence rassurante du garçon. Le vent soufflait la neige sur moi, et mon frêle corps ne pouvait plus tenir. Je voulais m'effondrer dans la neige et mourir de froid, j'aurais pu car personne n'attendait pour moi mais j'avais une image dans la tête. Ce n'était pas le dos du garçon, ni ses lèvres gercées comme les miennes, mais plutôt, le bras qu'il m'avait tendu. L'issu de secours qu'il avait entre-ouverte mais que j'ai fermé. C'est là que j'ai regretté ne pas l'avoir prise. Quoi que, en y repensant, ce n'était pas encore là. C'est quand je suis arrivé devant ce grand bâtiment, non toujours pas. C'est quand je suis allée à l'intérieur, même si toute les fibres de mon âme me criait de m'éloigner, non pas encore. Quand le personnelle m'a présenté au vieux médecin à la barbe blanche qui me terrifiait, non toujours pas. Ah oui, c'est à ce moment. C'est quand il m'a tendu la main ...et que je l'ai prise.

Je ne sais pas pourquoi je l'ai prise, je n'aurais pas dû. Mon coeur battait la chamade et je pouvais sentir mon sang se glacé, mais je l'ai prise. Je l'ai prise car il lui ressemblait. Le seul poème que j'avais jamais réussi à lire de Tristan décrivait un vieillard à barbe blanche et au sourire méchant. Alors, oui, j'ai pris sa main, car Tristan, mon unique frère, m'a dit de la prendre. Il me l'a vraiment dit, c'était ce qui était écrit dans le poème, de prendre la main du vieillard. Mais Tristan me détestait, je l'ai toujours su. Mais je me devais de lui obéir, car Tristan ne montre jamais ses poèmes, et pourtant, j'en ai lu un.