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CHAPITRE 13 Nicolas Flamel.

 Mark, Eowyn et Adrien avançaient maintenant depuis une demi-heure sans voir la fin du tunnel qu'ils avaient choisi d'emprunter.

—Après cette aventure, j'aurais ma dose de randonnée pour une semaine…soupira Adrien.

—Malheureusement, il faudra t'y faire, ricana Eowyn. On fait énormément de patrouille dans notre métier.

—Restez concentrés tous les deux ! J'ai comme l'impression que les épreuves ne sont pas finies.

 Mark désignait le bout du tunnel. Une lueur montrant sans équivoque la lumière du jour à quelques dizaines de mètres. A peine sortis, ils se couvrirent les yeux, éblouis, puis regardèrent autour d'eux. Une forêt s'étendait à leurs pieds, mais celle-ci n'avait rien à voir avec celle qu'ils avaient traversé avant d'atteindre la grotte. La vie pullulait, chaque être vivant montrait sa présence à sa façon. Piaillements, bourdonnements, et bruissements s'associaient au clapotis de l'eau, comme une mélodie joyeuse. Même les arbres semblaient accueillants, dressés fièrement, branches vers le ciel, laissant de grands passages lumineux entre chacun d'eux.

—On est sortis ? s'étonna Eowyn. Mais on n'a pas trouvé la pierre !

—Est-on bien sûrs que nous sommes sortis ? répondit Adrien, soupçonneux. Qui nous dit que ce n'est pas une autre illusion ?!

—Mes allergies, fit Mark en se frottant le nez. Il y a du bouleau dans le coin, et ça ne pousse pas dans les grottes.

—Adrien ? Tu te souviens que tu m'as demandé d'apprendre par cœur la carte l'autre jour ?

—Oui !

—Je ne rêve pas ?! Il n'y avait pas de montagnes enneigées à proximité ! continua Eowyn.

—En effet… murmura Adrien

—Alors, on est où ?

—Aucune idée, mais j'entends de l'eau couler par là. La plupart des villes et villages sont construits à proximité d'un cours d'eau. Si on le suit, on devrait tomber sur une habitation un jour ou l'autre.

 Effectivement, ils trouvèrent un ruisseau dans lequel ils trempèrent leurs pieds endoloris, se reposèrent un peu et commencèrent à descendre le cours d'eau. Celui-ci les conduisit à une chaumière au centre d'une clairière. On eut dit la maisonnée de la sorcière de Taram et le chaudron magique. Adrien trouva très ironique qu'il se retrouva devant une telle maison alors qu'il était lui-même un sorcier. Eowyn proposa de regarder discrètement par la fenêtre avant de taper à la porte. Se glissant en silence sous les volets, ils jetèrent un coup d'œil et Adrien retint un cri.

 Ce n'était pas une sorcière mais un homme ressemblant à Merlin l'enchanteur, vêtu d'un imposant pardessus de velours vert mousse, de longues chausses et d'un petit chapeau pointu. Sa barbe grise lui arrivait au-dessus du nombril et manquait de tremper dans une étrange mixture contenu dans un ballon en verre. Il en préleva quelques goutte avec une pipette à poire et en déposa quelques gouttes sur un métal gris qui se teinta d'une jolie couleur dorée. Mark fit signe à ses amis de se déplacer vers la porte. Il s'apprêtait à taper le heurtoir, quand la porte s'ouvrit sur le vieux sorcier, tout sourire. Il les invita à entrer et ils entrèrent, prudents, dans la masure. Le ballon contenant la mixture, laissa échapper un « pop » et le liquide devint, d'un coup, doré.

—Ah !!! Je savais bien que je ne m'étais pas trompé dans mes proportions.

—Vous cherchez à faire quoi au juste ? demanda Eowyn, curieuse.

—L'élixir de longue vie bien sûr !

—Bien sûr… murmura Mark, ironique.

—Et vous avez réussi ? reprit Eowyn, toujours aussi intriguée : les potions l'avaient toujours fascinée.

—Mais oui ! lui répondit le vieil homme en souriant. Je m'appelle Nicolas Flamel et vous êtes les bienvenus chez moi. Voulez-vous prendre une tasse de thé ?

—Avec plaisir ! s'exclama Eowyn avant que ses camarades n'aient pu répondre.

 Mark se pencha vers Adrien et murmura :

—Tu sens un danger ?

—Non, répondit sur le même ton le jeune homme en secouant la tête. Je ne ressens rien de négatif ici. Cet homme ne nous veut pas de mal.

 Ils s'assirent sur de petits coussins posés au sol. Nicolas Flamel était en train de dresser le couvert pour le thé sur une table basse près de la cheminée allumée.

—Pourquoi installer sept tasses ? l'interrogea Eowyn. Vous attendez d'autres visiteurs.

—Peut-être… J'ignore s'ils seront là à temps pour le thé. Probablement pas… Mais au cas où…

 Mark haussa un sourcil en regardant Adrien, qui haussa les épaules.

***

Au même moment, Jonathan soufflait dans sa barbe. Il avait grandi et avait pris des épaules, qui s'étaient, par ailleurs, couvertes de poils. Les jambes de Katherine étaient remplacées par des pattes de cheval et elles battaient le sol d'énervement avec ses sabots. Yohan, quand à lui avait désormais une longue queue recouverte poils gris dans le bas du dos et des poils le recouvraient de la tête aux pieds.

—Je vous avais dit que c'était une mauvaise idée de boire cette eau ! grognait Jonathan.

—Elle avait pourtant l'air potable gémit Katherine.

—Heureusement que l'on s'est contenté d'une gorgée… Sinon on serait devenu des animaux…

—Être un centaure n'est pas une expérience très plaisante non plus !

—Tu crois que ça me fait plaisir de ressembler au Yéti ! répliqua Jonathan.

—On se calme, tous les deux !fit Yohan. En entrant dans la grotte, on nous avait prévenus que nos animaux totem joueraient un rôle dans l'épreuve.

—Donc c'est encore un test ? gémit Katherine.

—Et donc ? s'écria Jonathan. Il faut que l'on assume notre part animale, c'est ça ?

—Et pourquoi pas !

—C'était une blague !

—Sérieusement… L'animal totem montre notre personnalité, raisonna Katherine. Et si le but de toutes ces épreuves était de s'accepter tels que l'on est, avec nos peurs et nos caractères ?

—Pourquoi protéger la pierre par des sortilèges de ce type ? Quel intérêt aurait eu celui qui l'a cachée de s'assurer que la personne qui trouve la pierre s'aime telle qu'elle est.

 Il agita ses doigts pour mimer des guillemets.

—Pour que la personne n'utilise pas la pierre à son bénéfice… chuchota Yohan. Quand notre vie nous convient et que l'on est heureux de ce que l'on est, on ne cherche pas à changer.

—La pierre philosophale permet une vie éternelle, poursuivit à son tour Katherine, mais la vie n'a véritablement de sens que quand elle a une fin. On apprécie chaque moment, précisément parce chacun d'eux est précieux. Et quel est intérêt d'avoir des montagnes d'or sans labeur. Quel plaisir a-t-on à le dépenser ?

—Okay… Mis à part l'argent, qui facilite quand même la vie, je suis plutôt d'accord… Ça ne nous dit pas ce que l'on doit faire pour réussir l'épreuve… répliqua Jonathan.

—On doit complètement accepter notre part animale, lui répondit Yohan.

—Oh non… ne me dit pas que…

—On doit boire encore plus de cette eau…et nous transformer entièrement…

***

—Au fait mes jeunes amis, avez-vous trouvé ce que vous cherchiez ?

—Mais comment savez-vous que… commença Eowyn.

—Tous ceux qui s'aventurent ici cherchent quelque chose…

—Vous aussi ?

—Moi ? je ne cherche plus… J'ai trouvé, je pense!

—Ah oui ! Votre élixir de longue vie.

—Non, je suis venu ici pour trouver quelque chose d'autre… Voulez-vous du thé ?

 Il souleva la théière.

—Avec plaisir, répondit la jeune femme, en tendant sa tasse. Merci.

 Tour à tour, il servit les quatre amis, puis lui-même. L'odeur du thé était enivrante. Ils en burent tous une gorgée et se détendirent immédiatement.

—Vous avez l'air de bien vous entendre, remarqua le vieil homme. Vous formez une équipe soudée tous les six.

—Tous les six ?! Êtes-vous voyant monsieur Flamel ? demanda Adrien.

—J'ai quelques dons en effet… Appelez-moi Nicolas, Adrien… Vous me permettez que je vous appelle par votre prénom ?

—Vous connaissez nos prénoms ? s'étonna Mark.

—J'ai prévu votre arrivée depuis très longtemps… avant même votre naissance, votre destin était de passer le seuil de cette porte.

—Et vous êtes là depuis longtemps ?

—Quelques siècles…

 Les jeunes gens manquèrent de s'étouffer à ces paroles. Ils se regardèrent, les yeux écarquillés.

—C'est vous qui avez caché la pierre ? questionna Mark.

—C'est moi qui l'ai créée en réalité… lui répondit Nicolas en souriant. Je savais que vous viendriez ici, alors je vous ai attendu.

—Vous nous attendez ici depuis des siècles ? s'étonna Adrien.

—J'ai fait mon temps sur cette Terre. Je suis las de cette existence. Les rêves me manquent…

—Vous ne rêvez pas ? demanda Eowyn

—Je n'ai pas besoin de dormir…

—C'est pratique… murmura Mark

—Ennuyeux, plutôt… L'inspiration me venait souvent dans mes rêves… Désormais les journées s'égrainent les unes après les autres à la même vitesse qu'il y a sept cent ans et pourtant je les vois de plus en plus s'allonger.

—Vous vous sentez seul… murmura Eowyn.

—Pas vraiment en fait… Je me sens complet. Ma part de la tâche est accomplie, il est temps pour moi de rejoindre ma famille et mes amis dans la mort.

—Vous allez vous suicider ? s'exclama Adrien inquiet.

—Non… je vais passer le relais… C'est ce qui m'a manqué pour accomplir la tâche seul : une équipe soudée, comme vous.

Il les regarda tour à tour en se caressant la barbe.

—C'est étrange… Vous êtes pourtant si différents. Comment arrivez-vous à vous entendre ?

—En effet, répondit Mark. Nous sommes très différents, mais nous nous complétons. Chacun de nos défauts est compensés par les qualités des autres.

—Vous n'êtes jamais jaloux des capacités des autres ? demanda Nicolas intrigué.

 Adrien tenta de répondre, mais il se sentit comme aspiré à l'intérieur de lui-même. Il voyait des mots en latin et des runes autour de lui, puis l'agitation cessa autour de lui et il eut la sensation de ne plus être vraiment lui-même. Soufflant un peu, il décida de boire un peu de thé pour se remettre les idées en place. Au moment de porter la tasse à ses lèvres, il remarqua une fine bague ornée d'une ambre à sa main droite. Ses doigts étaient plus fins qu'à l'ordinaire, plus délicats. Commençant à trembler, il baissa les yeux pour poser sa tasse et aperçut sur sa poitrine des éléments incohérents avec une physionomie masculine… Pas de doute, il était devenu une femme. Plus exactement, il était dans le corps d'Eowyn… Mais alors, où était-elle ? Et qui était dans son corps à lui ?

—Eowyn ? appela-t-il.

—Oui ? lui répondit la voix de Mark.

—On a tous changé de corps… murmura Adrien

—Ne paniquez pas ! fit le vieil homme.

—Que l'on ne panique pas ? s'exclama Mark, qui avait pris possession du corps d'Adrien. On a tous échangé de corps et vous ne trouvez pas cela grave ?!

—Une fois que vous aurez compris la leçon, vous retrouverez vos corps, répondit-il.

—Donc c'est encore une épreuve ? demanda Eowyn.

—Tout à fait… Vous devez comprendre pourquoi vous vous êtes retrouvé dans le corps de l'un de vos camarades. Une fois que vous aurez la réponse, tout rentrera dans l'ordre… enfin… normalement.

—Normalement ? s'écria Mark. Vous n'en êtes pas sûr ?!

—Vous devriez vous détendre un peu et prendre une bonne douche, l'interrompit Nicolas. La salle d'eau est par là.

 Il désigna une porte derrière eux. Regardant dans cette direction brièvement, Adrien s'apprêta à poser une question, mais il se rendit compte que le vieil homme avait disparu.

—Bon ! fit Mark. J'imagine qu'il vaut mieux que l'on fasse ce qu'il nous conseille… On est sale et fatigués. Il y a sûrement de quoi préparer un repas ici. On a qu'à se doucher, se restaurer et se reposer en attendant les autres. Il a mis sept tasses, donc il a vu que les trois autres allaient nous rejoindre ici.

—Tu as raison, répondit Adrien. Il faut être patient, une fois que l'on se sentira mieux, on devrait y voir plus clair. Honneur aux dames pour la douche… Enfin… Bref, tu vois ce que je veux dire Eowyn !

—Je vois bien, mais il faut que je me déshabille…

—C'est généralement nécessaire pour prendre une douche… fit Mark en rigolant.

—Mais c'est ton corps et…

 Elle s'interrompit, le visage rouge pivoine. Comprenant le nœud du problème, Mark reprit son sérieux et proposa calmement.

—Si tu veux… Et si Adrien est d'accord… Je peux me laver. Enfin laver le corps dans lequel tu te trouves pendant que tu fermes les yeux.

—Adrien ?

—J'imagine que c'est la meilleure solution… répondit-il du bout des lèvres.

—D'accord alors, acquiesça Eowyn timidement.

—Adrien ? Tu me donne l'autorisation de me laver seul ? demanda Mark.

—Oui, répondit l'intéressé. Ce sera moins bizarre que de savonner mon frère jumeau. Et quand à moi…

—Je t'aiderai à mon tour, le devança Eowyn.

—Bon ! Puisque tout est réglé, allons-y !

—Moi je vais à la cuisine, voir ce que je peux préparer à manger, décida Adrien.

***

 Rustique. C'était le mot le plus approprié pour cette salle d'eau. Une baignoire à pieds trônait au milieu de la pièce. Le sol était en bois verni, à l'exception d'un large rectangle sous les pieds du seul véritable meuble de la pièce. La lumière était assurée par les bougies des cinq chandeliers accrochés aux murs. La lumière tremblotante dansait sur leur visage, mais la faible intensité de celle-ci atténuait les rougeurs qui teintaient leurs joues.

—Bon ! se décida Mark. Enlève la veste et le t-shirt, je t'aiderai avec le reste.

 Elle s'exécuta puis laissa Mark continuer, tandis qu'il s'exclamait :

—C'est tellement bizarre de se déshabiller soi-même.

—C'est bizarre de voir Adrien me déshabiller…murmura Eowyn.

 Mark haussa un sourcil.

—Attends ! Ôte-moi d'un doute là ! Tu sors avec lui ? Et tu dors avec lui ?

—Figure toi que oui, pour tes deux questions, mais ce n'est jamais allé au-delà pour l'instant entre lui et moi.

—Tu le fais languir ? fit Mark avec un sourire en coin. Ferme les yeux.

 Elle obéit pendant qu'il terminait d'enlever ses sous-vêtements.

—Non ! répondit Eowyn, fâchée d'avoir à nouveau cette conversation. Il veut que l'on prenne notre temps.

—Et toi ? Tu veux quoi ? Ça n'a pas l'air de te réjouir !

—Je ne sais pas… Je me pose des questions. Si ça se trouve, il n'est pas sûr de ses sentiments et veut les tester d'abord.

 Mark secoua la tête en gloussant, l'aidant en même temps à entrer dans la baignoire.

—Franchement, je ne suis pas dans sa tête et je me tire une balle dans le pied en disant ça, mais je peux t'assurer qu'il est amoureux de toi.

 Il tourna les robinets et fit couler un peu l'eau sur le côté en attendant qu'elle se réchauffe. Eowyn se mordit la lèvre inférieure, puis demanda timidement :

—Tu es jaloux ?

 Mark se figea, soupira, puis commença à passer le filet d'eau sur son corps.

—Oui … Je ne peux pas le nier… Tu savais alors …

—Je m'en doutais… Mais je n'en ai eu la confirmation qu'en entendant les pensées d'Adrien il y a quelques semaines*.

—Je savais que cette histoire allait me causer du tort.

—En fait, il a fait très attention à ses pensées tant qu'il était conscient, mais dans ses rêves, il a rejoué votre conversation.

 Mark attrapa la savonnette et le gant de toilette qu'il avait amené dans ses affaires. Il entreprit de faire mousser le savon tout en lui répondant, désabusé :

*Voir Tome 1 : Maudite lame

—Je vois… Et en connaissant ses sentiments et les miens, tu as décidé de répondre aux siens…

—J'ai aussi des sentiments pour toi…

—Mais pas ceux que je souhaiterai, j'ai compris…

—Tu es fâché ? s'inquiéta-t-elle

 Il réfléchit un long moment et soupira :

—Non… Je m'en doutais aussi un peu. En vérité, je suis surtout heureux que tu ais à nouveau foi en l'amour.

— C'n'est pas encore gagné ça… Ça a été difficile d'accepter qu'elle oublie tout, de la laisser partir, de la voir avec d'autres et de ne plus rien représenter pour elle, qu'une simple connaissance. Parfois, j'ai souhaité être quelqu'un d'autre, ne jamais l'avoir rencontrée pour ne pas souffrir.

—Et oublier aussi tout ce que vous avez partagé ? Ces souvenirs font partie de toi… de ce que tu es.

 Mark entreprit de la rincer. Elle attrapa la paume de douche et se passa la tête sous l'eau, effaçant les larmes qui avaient commencé à couler sur ses joues.

—Je vais lui dire… Elle a raison… Je dois avancer, murmura-t-elle si bas qu'il ne put entendre distinctement ce qu'elle disait.

 Attrapant la serviette posée à côté de lui sur un tabouret, il la passa sur ses épaules et entreprit de la sécher, puis il lui tendit ses affaires de rechanges, qu'elle prit à tâtons. Une fois habillée, elle sortit de la salle de bain, le laissant prendre sa douche à son tour. Elle fut attirée par un fumé agréable lorsqu'elle émergea de la pièce. Adrien avait dressé la table et était occupé à faire griller des poissons dans une poêle d'un autre temps, sur une cuisinière à charbon.

—Bravo ! s'exclama-t-elle. Tu t'es bien débrouillé !

—Je suis heureux d'avoir atterri dans le corps d'une élémentale du feu, sinon je n'aurai jamais pu mettre en marche cette cuisinière. Je crois que l'on a aussi échangé nos pouvoirs. Je viens de voir les autres passer le pas de la porte.

—Ils arrivent bientôt ?

—Je n'en sais rien.

—Il n'y avait pas d'indices ?

 Il la regarda l'air un peu paniqué. Elle sourit.

—Ne t'inquiète pas ! Ce n'est pas grave. Je t'apprendrai si l'expérience devait se prolonger.

—Merci… répondit-il soulagé, qu'elle ne lui tienne pas rigueur de son oubli. Ça y est ? Tu es toute propre ?

—Oui ! Ça fait du bien d'enlever toute cette poussière et cette transpiration.

—Moi aussi j'ai hâte d'enlever ces vêtements !

 Eowyn écarquilla les yeux. Adrien la regarda, surpris, puis rougit en comprenant sa réaction. Elle avait maintenant un air narquois et haussait un sourcil.

—Tu vois ce que je veux dire… J'ai hâte de me laver… Enfin… de laver ton corps… Non, en fait, c'est toi qui va me laver… te laver… Parce que ça ne m'intéresse pas de voir ton corps sans habit… Enfin si… mais pas dans ces conditions et… tu vas me laisser m'enfoncer longtemps comme ça ?

 Elle gloussa doucement en secouant la tête, s'approcha de lui et passa ses mains autour de son cou, lui caressant la joue avec son pouce.

—T'es trop mignon, quand tu fais ton timide. Alors comme ça tu aimerais me voir un peu moins vêtue ?

—Comme si tu en doutais…

—Eh bien… Etant donné que tu as refusé de prendre une douche dans ma chambre et que tu m'as dit vouloir prendre ton temps, ce qui est assez surprenant comme attitude pour un garçon de dix-sept ans. Je me suis demandé si tu avais quand même un peu envie de moi.

—J'ai jamais dit que je n'en avais pas envie… Juste que ce n'était pas le bon moment.

—Comment tu sauras que ça l'est ?

—J'attends un évènement particulier entre nous et j'espère qu'il aura lieu bientôt.

—Qu'est-ce que c'est ?

—Tu ne devines pas ?

—Non !

 Elle secoua la tête, l'air frustré.

—J'ai l'impression que, toi, tu n'es pas prête à me faire entrer dans ta vie, que c'est la vraie raison pour laquelle tu as refusé ton amour pour moi au début, alors même que tu avais compris que tu partageais mes sentiments.

—Qu'est-ce que j'ai dit ou fait pour que tu penses cela ? fit-elle, consternée.

—Mais rien… En revanche, tes rêves ont parlé pour toi…

—Oh ! Tu es au courant pour Julie ?

—Oui…C'était très confus dans tes rêves, mais tout s'est mis en place quand Yohan m'a expliqué les raisons de ta colère l'autre jour.

—J'ai arrêté de me projeter avec qui que ce soit depuis plus de deux ans.

—Tu l'aimes toujours ?

—Oui …

Elle baissa les yeux en plantant ses dents dans sa lèvre inférieure.

— Mais plus de la même façon. En fait, j'ai réalisé que je m'accrochais à son souvenir, comme si tout cela pouvait un jour redevenir d'actualité. Mais la réalité, c'est que c'est fini. Notre histoire est finie. Maintenant, c'est toi que j'aime. Je pensais mériter ma solitude. Je me suis enfin pardonnée cette erreur de parcours et j'ai envie d'avancer en laissant le passé derrière moi.

—Moi aussi. J'en ai assez de m'en vouloir pour mes difficultés à contrôler mon pouvoir. Ce n'est pas en enviant la maîtrise des sorciers expérimentés comme toi que je vais progresser.

 Adrien sourit et posa lentement ses lèvres sur les siennes. Il se sentit à nouveau comme absorbé de l'intérieur. D'abord désorienté, il se rendit compte que l'atmosphère était humide. Levant une paupière, il s'aperçut qu'il était dans la salle de bain visiblement en train de s'habiller et surtout, dans son corps. Sourire aux lèvres, il se dépêcha de se vêtir et sortit en courant de la salle de bain.