Zaelia se dirigea directement vers la tente de Zephira. Ils n'avaient vraiment pas touché à ses affaires.
Zaelia laissa le bout de ses doigts se promener sur tout ce qui l'entourait. Ils n'avaient même pas nettoyé la tasse de thé qu'elle avait servie avant de partir. Zaelia s'assit à la table et regarda devant elle les tasses sales, elle fixait devant elle l'endroit où Zephira se trouvait il y a seulement une semaine. Son cœur se serra dans sa poitrine et elle sentit un poids lourd dans sa gorge. Elle posa sa main sur la table et baissa la tête, en un clin d'œil, les larmes inondèrent ses yeux. Le silence de la tente fut troublé par le sanglot discret de la jeune femme. Elle se murmura à elle-même.
"Que dois-je faire maintenant, Zephira ? Je suis perdue."
Elle leva la tête dans l'espoir de voir l'aînée en face d'elle boire son thé et se plaindre de son comportement comme d'habitude mais cette fois-ci, personne n'était là pour ça. Elle se sentait si seule au monde.
"Huit Hommes sont morts dans le désert, Zephira, et les anciens ne veulent rien changer. Sont-ils morts en vain ?"
Elle se mit à pleurer un peu plus fort, elle posa son bras sur la table et cacha son visage dans son coude. Elle était désemparée, elle ne savait plus quoi penser. Zephira savait que les choses ne seraient plus jamais les mêmes après cette expédition et Zaelia ne comprenait que trop tard, pourquoi Zephira ne voulait pas qu'elle parte. Elle savait qu'elle réussirait et elle savait qu'elle ne pourrait plus jamais continuer à respecter les autres aînés après cela.
Il y avait ce dicton que l'aînée répétait sans cesse : "Parfois, il vaut mieux rester candide", ces mots prirent tout leur sens à présent. Zephira était sage en ce sens.
Zaelia se sentait brisée, pas seulement à cause de la perte, non, c'était plus profond que cela. Elle se sentait brisée parce qu'elle avait réalisé que la tribu était une cage. Elle s'était rendue compte de l'étendue du monde, du nombre de fleurs qu'il y avait, et à quel point le ciel pouvait être différent. Elle avait fait l'expérience d'un sol qui n'est pas du sable, un sol sur lequel il était difficile de marcher, et elle avait découvert ce que c'était que de s'allonger dans l'herbe pour observer les étoiles. Elle avait senti la douce caresse du vent au lieu du fouet brutal qu'il pouvait être dans le désert.
Elle avait appris l'existence d'un autre monde qui demandait à être exploré et les anciens avaient clairement fait savoir qu'ils ne voulaient pas envoyer d'autres expéditions hors du désert.
Les anciens étaient les vautours qu'ils avaient toujours été et ils voulaient forcer la tribu à les suivre, mais la nouvelle génération, la génération de Zaelia, aspirait à beaucoup plus.
Elle s'arrêta de pleurer lentement, levant la tête vers l'endroit habituel où Zephira était assise auparavant. Elle s'allongea sur le sol à l'endroit où elle se trouvait et contempla le plafond de la tente. Elle prit une profonde inspiration pour essayer de se calmer.
"Que dois-je faire, Zephira ? Dis-moi que tu m'as laissé quelque chose pour me guider, s'il te plaît."
Zaelia se souvint de sa dernière discussion avec Zephira. Mot après mot. "Je crains que tes rêves ne te dépassent". Zaelia ne savait plus ce qu'étaient ses rêves. Après avoir vu ce nouveau monde et la réaction des autres anciens, tout était confus. Elle avait toujours voulu agir à la gloire du dieu, elle n'avait jamais pensé à autre chose qu'à son amour pour Archanium.
"Que veux-tu ?" demanda-t-elle dans l'espace, espérant en vain une réponse.
Elle n'arrivait pas à croire qu'Archanium se contentait de la tribu telle qu'elle était. On disait que le premier homme à être venu vivre dans le désert s'était élevé pour devenir un dieu et prendre place à côté d'Archanium pour l'éternité. Zelia ne comprenait pas pourquoi.
Il était venu là pour se rapprocher du soleil mais leurs conditions de vie étaient terribles, ils n'étaient pas faits pour rester glorieux longtemps.
"Est-ce qu'il est monté parce qu'il a rallié des gens ? Ou parce qu'il vivait dans le désert, près de toi ? Dis-moi comment te plaire, mon Dieu."
Sans leur forte constitution, leur tribu n'aurait jamais survécu jusqu'à présent. Les anciens s'en rendaient-ils compte ? On aurait dit qu'ils pensaient que les bénédictions d'Archanium les protégeraient à jamais. Ils agissaient comme si le premier dieu élevé devait être responsable de leur survie.
C'était maintenant le milieu de la nuit. Elle s'assit dans la tente et regarda ses mains.
"Archanium, mon Dieu, j'espère que tu seras satisfait de ce que je m'apprête à faire..."