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L’Oncle Troandum

Lorsque Quatro revint au royaume, l'atmosphère était lourde, comme si le vent portait encore l'écho de la guerre. Mais ce n'était pas la guerre qui l'attendait ici, c'était son oncle, Troandum. L'homme qui, pendant l'absence de Troan, avait pris les rênes du royaume et qui, aujourd'hui, régnait sur la grande cité des Premiers Hommes.

Le retour au château fut marqué par une nouvelle qui déchira le cœur de Quatro. La reine, sa mère, était morte. L'oncle, au regard indéchiffrable, lui annonça froidement, sans trembler :

"Ta mère est morte de maladie. Il n'y a pas d'autre explication. Elle a quitté ce monde comme elle y a vécu : avec dignité."

Les mots résonnèrent dans l'esprit de Quatro comme un coup de marteau sur une enclume. Il ne comprenait pas. "Maladie ?" se répétait-il. Ce mot semblait trop simple, trop vide, pour rendre hommage à celle qui l'avait porté. Mais Troandum n'était pas un homme qui s'attardait sur les détails inutiles. La vérité, à ses yeux, était simple : la guerre emportait tout, y compris ceux que l'on aimait. Et maintenant, il devait être le roi.

Il devint régent de facto, avec une autorité absolue, et Quatro, désormais seul héritier, se retrouva sous sa tutelle. Les premières semaines qui suivirent furent marquées par une rigueur implacable.

Troandum était un homme implacable, un rocher, une silhouette imposante, froide comme l'acier. Ses yeux, d'un gris métallisé, semblaient sonder l'âme de ceux qu'il regardait. Il n'était pas un homme de mots tendres, mais dans ses gestes, dans ses actions, on sentait une affection étrange, un respect qu'il réservait seulement à l'héritier. Au départ, Quatro avait perçu en lui une figure distante, presque inhumaine. L'oncle ne semblait pas se laisser troubler par les émotions. Pourtant, dans les moments les plus sombres, lorsqu'il posait une main ferme mais douce sur l'épaule du prince, ce geste en disait long sur la manière dont Troandum le considérait. Parfois, il l'appelait même "fils", un mot lourd de sens dans un royaume où l'on ne parlait pas souvent ainsi.

La guerre, l'honneur, la tradition des Premiers Hommes étaient les pierres angulaires de son enseignement.

"Un prince ne pleure pas. Il mène."

"La guerre est notre langue, notre souffle, notre vie. Chaque jour, nous devons la comprendre, la maîtriser. Sans cela, tu n'es qu'un enfant perdu dans les ombres de la gloire de ton père."

Quatro apprenait, chaque jour, à manier l'épée, le bouclier, à se tenir droit, à ne jamais flancher. La sueur perlant sur son front était un prix qu'il devait payer pour chaque leçon. Les gestes du combat étaient aussi naturels pour lui que la respiration, mais ce n'était pas tout.

Troandum l'entraînait aussi à gouverner. Le jeune prince devait apprendre à comprendre les complexités des alliances, des conflits internes et des stratégies politiques.

"Un roi n'est pas seulement un guerrier. Il est aussi un stratège. Tu dois comprendre les faiblesses de ceux qui t'entourent, manipuler le jeu des courbes et des angles invisibles. Les armes du roi sont autant les mots que les épées."

Troandum détestait la faiblesse. Il méprisait les autres peuples, les voyait comme des obstacles à la grandeur des Premiers Hommes. Les royaumes voisins, qu'ils soient remplis de techniciens, de marchands ou de peuples cousin, étaient pour lui une distraction, une fausse gloire.

"Ils ne comprennent rien à la véritable guerre. Ils construisent des villes, des murs, des routes... Mais la guerre ne se cache pas derrière des pierres. Elle vit dans le cœur des hommes."

Chaque fois que Quatro tentait de discuter d'une autre vision du monde, Troandum le remettait fermement à sa place.

"Ne sois pas naïf, mon fils. L'honneur de notre peuple, c'est la guerre. Les autres peuples n'ont que des illusions de paix."

Cette éducation dure, presque impitoyable, faisait de Quatro un homme à part. Il se forgeait une identité, une conscience du devoir, et dans le regard de son oncle, il devinait un feu qui brûlait pour un seul objectif : que le royaume des Premiers Hommes soit éternel.

La guerre était omniprésente dans chaque aspect de l'éducation du prince. Au fil du temps, Quatro comprit que ce n'était pas seulement un héritage de guerre qu'il portait. C'était aussi un héritage de solitude. Les rires et les plaisanteries étaient étrangers à la cour de Troandum, remplacés par des discussions sur les mouvements militaires, les traités d'alliances et la meilleure façon d'abattre un adversaire.

Troandum, bien qu'affectueux dans ses gestes, n'était pas un homme de tendresse. Son amour pour Quatro se traduisait par des attentes infinies. L'oncle voulait que son neveu dépasse tout ce qu'il avait été, et il serait prêt à tout pour cela, même à briser les morceaux d'innocence qui restaient en lui.