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La Sainte Cathédrale

Andréa souleva son verre de bière que l'hôtesse venait de déposer, et sirota quelques gorgées avant de reposer son verre sur la table. Il bascula légèrement sa tête en arrière, perdu dans ses réflexions.

"Mmmh... Le monde, n'est-ce pas ? En effet, moi-même je peux le constater. Après tout, si une ville telle qu'Ophélia se retrouve à ce point poussée dans ses retranchements, alors il n'est pas difficile de croire que le monde se retrouve dans une piètre situation. Malheureusement, je pense que tu surestimes mon influence. Je n'ai que quelques connexions bien placées, rien de plus. Au mieux, je pourrai vous obtenir une audience avec le roi."

Tahrren sourit légèrement et bu à son tour quelques gorgées de bières. A vrai dire, il ne s'attendait pas à grand-chose, Andréa n'étant qu'un prêtre.

A l'origine, il comptait en discuter au roi en même temps que leur demande d'aide pour Ophélia, mais le moment aurait été mal choisi. Mais grâce à Andréa, il pourra profiter de conditions idéales pour s'entretenir avec le roi, surtout pour un sujet aussi important. Si leur plan pour sauver Ophélia fonctionne, alors jamais les Chasseurs d'Âmes n'auront eu une telle chance de convaincre les nains de les aider. Le destin de nombreuses personnes sera alors entre ses mains.

"Très bien, c'est déjà une excellente nouvelle. Je ferai de mon mieux alors pour convaincre le roi de Myr-Khandur, Már Baran."

Andréa sourit à la réponse de son camarade. Il prit à nouveau la bière qu'il avait à peine entamé et trinqua de force avec Tahrren qui tenait encore son verre en main.

"Excellent ! J'espère que vous saurez trouver les mots pour le convaincre."

Le sourire de Tahrren se mua en un rire gêné mais qui n'oubliait pas de souligner son soulagement.

"Je l'espère également. Mais maintenant que ce poids m'est retiré, en tout cas pour le moment, je pourrai pleinement me concentrer sur notre mission."

Ils se turent ensuite tous les deux pendant un bref instant, avant qu'Andréa ne relance la discussion de sa voix inhabituellement grave.

"La mission... Hahaha"

Le nain fut soudain prit d'un soudain fou rire dont l'origine était étrangère à Tahrren. Son rire était si franc qu'il ne pouvait s'empêcher de l'accompagner de quelques tapes sur la table, ce qui ne manqua pas de la faire trembler et de renverser quelques gouttes de bières sur celle-ci.

"Il faudrait être complètement fou pour vouloir infiltrer la cathédrale des Saintes. Et encore plus pour s'en prendre au Pape et à son temple ! Mais voilà que vous trois vous débarquez, vous me sauvez la vie, avant de me dire que nous devons vaincre l'homme le plus puissant de la région si nous voulons sauver tout le monde."

Stupéfait par la soudaine tirade de son camarade, Tahrren resta stoïque pendant quelques instants avant d'afficher un large sourire sur son visage, si large que ses yeux s'en plissèrent.

"Et nous voulons également qu'une armée de nain marche sur la ville la plus influente de la région pour faire une diversion. C'est vrai que ce plan est complètement fou." Il regagna peu à peu son sérieux, avant de continuer. "Mais si nous échouons, un grand nombre de personnes risque de périr."

Les deux hommes continuèrent ainsi à discuter pendant plus d'une heure, avant qu'ils n'aillent se reposer quelques temps dans leur chambre.

Le soir, la petite bande se rejoignit dans le bar et n'hésitèrent pas à manger jusqu'à ce que leur estomac ne le supporte plus : cela pouvait très bien être l'un de leur dernier repas. De plus, cela permettait à Ophélie d'oublier son stress, face à une situation qui ne permettait aucune erreur.

Ils allèrent ensuite se coucher et se levèrent tous les quatre avant même que les premières lueurs du soleil ne percent la couverture nuageuse.

Tahrren les mena jusqu'aux écuries, où ils récupérèrent tous les quatre leur cheval. Fort heureusement Andréa possédait déjà son propre cheval qui l'attendait a l'écurie, car aucun d'entre eux ne possédait suffisamment d'argent pour lui en acheter un, et ce même s'ils se cotisaient tous.

Quelques dizaines de minutes seulement après leur réveil, ils s'élançaient sur la route qui les séparaient d'Ophélia. Malheureusement pour eux, ils eurent à braver vent et pluie, ce qui ne manqua pas de les ralentir.

Ils arrivèrent toutefois dans le milieu de l'après-midi. Ils passèrent les portes sans encombre, notamment grâce à la présence d'Andréa, bien connu des gardes tandis qu'il sillonnait les rues de la ville habillé de sa soutane depuis plus d'un siècle.

Après s'être débarrassé de leurs chevaux, ils se réunirent tous les quatre au coin d'une ruelle. Rapidement, Tahrren donna ses directives.

"Nous ne devrions pas perdre de temps. Les plans du pape s'accélèrent peu à peu et nous pourrions être pris de court. Je m'infiltrerai dans la cathédrale dès ce soir et j'y volerai le sceptre. Eiji, pendant ce temps, sillonne les rues et renseigne-toi sur les dernières nouvelles, notamment celles qui concernent le temple et les marchands itinérants. Nous devons savoir à quelle vitesse évolue la propagation de l'anima dans la région."

Eiji acquiesça. Il aurait préféré jouer un rôle plus important et proactif, mais en tant qu'ancien garde, il savait que l'information était vitale. En un sens, il n'y a rien d'autre qu'il pouvait faire, et inversement, personne d'autre ne pouvait jouer ce rôle.

"Quant à vous, Andréa, Ophélie, vous vous terrerez dans une auberge." continua Tahrren. "Vous avez jusque demain pour vous décider d'un discours qui saura convaincre non seulement la garde, mais également les nains. On compte sur vous, car le plan entier repose sur vos performances."

Ils acquiescèrent à leur tour, comprenant l'importance de leur mission.

"Bien, ne perdons pas davantage de temps. Séparons-nous."

Tahrren se retourna et s'en alla d'un pas précipité. Il ne voulait pas perdre de temps et commencer à repérer les lieux avant la tombée de la nuit. Cependant, après avoir parcouru quelques mètres à peine, une petite main l'agrippa et le retint.

"Tahhren ! Attend !"

C'était Ophélie, qui s'était jetée à sa poursuite.

"Un problème ?" demanda-t-il.

"Oui ! Et un très gros même ! Si tu y vas comme ça, le bâton te rejettera ! Rappelle-toi, je l'ai scellé. Seul moi est capable de le manier."

Passablement agacé, Tahrren s'emporta légèrement. bien qu'il n'haussa pas le ton, il était clair que la situation ne lui plaisait guère.

"Et tu ne pouvais pas nous en parler avant ? Que sommes-nous supposés faire s'il est intouchable ?"

Ophélie soupira légèrement avant de le reprendre.

"Ce n'est pas comme s'il n'était pas transportable du tout, sinon ils n'auraient jamais pu l'amener dans cette cathédrale et il ne serait pas aussi bien gardé. La solution la plus simple pour nous est que j'intègre une partie de mon mana dans ton corps. Ainsi, lorsque tu prendras le sceptre dans tes mains, ce dernier le détectera et t'acceptera."

Tahrren réfléchis quelques secondes avant d'acquiescer.

"Je vois. Très bien. Faisons cela alors."

Ophélie prit les mains de Tahrren et apposa sa main incrustée du cristal sur le dos de l'une d'entre elles.

Elle concentra sa magie dans sa paume et l'envoya directement dans le corps de l'elfe. Le processus ne dura que quelques secondes et ce dernier ne ressentit absolument rien. Lorsqu'elle eut terminé, elle retira ses mains et lui sourit.

"Voilà, c'est terminé ! Bon courage, et bonne chance."

Elle rebroussa chemin en direction du reste du groupe, tout en faisant lui faisant un dernier signe de la main.

Tahrren lui sourit en retour, avant de s'en aller. Lorsqu'elle eu rejoint les autres, elle s'approcha d'Eiji.

"Bonne chance à toi aussi Eiji. Puissions-nous nous retrouver ce soir."

Eiji lui sourit et laissa s'échapper un léger rire, tout en lui caressa doucement la tête.

"Il ne devrait y avoir aucun problème à cela. Je ne vais que récolter des informations. Ce sera plutôt à vous d'assurer."

Admirant la scène juste à côté d'eux, Andréa ne put s'empêcher de s'en amuser.

"Eiji a raison, Ophélie. Nous devrions nous aussi nous dépêcher. Le temps n'attend pas. Si nous voulons être prêt à temps, nous n'avons pas une minute à perdre."

La princesse s'échappa de l'emprise du jeune Higashito. Elle lui fit un léger signe de la main et lui partagea un dernier regard furtif avant de s'éloigner définitivement. Accompagné d'Andréa, ils s'en allèrent chercher un endroit à l'abri des regards.

De son côté, Tahrren arrivait à proximité de la cathédrale. Son premier geste fut de faire le tour de la cathédrale, analysant les extérieurs. Les entrées et issues ne manquaient pas : en plus de l'entrée principale, de nombreuses voies d'accès étaient ouvertes. Ces dernières étaient bien souvent privées, le public ne pouvant accéder à la cathédrale uniquement par la porte principale.

Les murs de la cathédrale étaient entourés d'un vaste jardin, où poussaient d'innombrables fleurs et buissons qui arboraient les couleurs d'un hiver qui commençait à s'installer. Le nombres d'hommes y patrouillant y était particulièrement élevé, et il serait difficile pour un homme de le traverser sans être repéré.

Enfin, entourant partiellement ce jardin, une immense grille de presque trois mètres de haut s'élançait depuis le sol, protégeant ce lieu saint d'un grand nombre d'intrusions.

Face à l'ampleur du projet, Tahrren se décida à entrer dans la cathédrale. Le jour, celle-ci était ouverte au public. Chaque personne entrante était comptée, jusqu'à un quota maximal. Les personnes quittant le bâtiment étaient une nouvelle fois recomptée, et si le compte n'était pas exact à la fin de la journée, alors les lieux étaient complètement fouillés jusqu'à ce qu'assurément aucune personne n'était plus sur place.

L'intérieur était plutôt simpliste, bien qu'élégamment décoré. Construit comme une simple église, la nef était inondée de lumière de différentes couleurs, effet permit par les nombreux vitraux qui l'entouraient. Ces chefs d'œuvres étaient fabriqués par les rares vitraillistes de la cité, experts en peintures, en verrerie et en métallurgie.

Les bancs parcourant la nef étaient tous faits de bois de bouleau vernis, reflétant à la perfection ces mêmes lueurs colorées. Sur les murs, d'innombrables peintures mythologiques retraçaient l'histoire de la cité-état et de son territoire. Des décorations en or massif les ornaient ici-et-là ainsi que les quelques piliers finement sculptés qui supportaient l'édifice.

La croisée du transept était cependant quant à elle inaccessible. Au-delà des nombreux gardes qui la gardait, si l'un concentrait son mana dans son regard et affinait sa sensibilité, il se rendrait compte qu'une immense et puissante barrière bloquait toute entrée. Et pour cause : le transept accueillait en réalité les quartiers de la Sainte.

Enfin, au-delà de cette barrière se trouvait également le cœur, principal lieu de recueillement et de prière pour la Sainte, mains également lieu de stockage où de nombreuses reliques étaient stockées, notamment le sceptre de la Sainte Originelle.

"Bien. Et comment je vais le récupérer, ce bâton ?"