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INTERLUDE | Un Triangle Presque Parfait

Depuis la fin de la Grande Guerre, une alliance reste inébranlable : la Trinité. 

Après leur victoire et les pertes considérables qu'ils subirent ; Humains, Elfes et Nains décidèrent de rester unis au fil des âges. Unis pour partager leurs connaissances, se protéger et prospérer ensemble. 

Quel aurait été l'intérêt de s'allier alors que la guerre était finie ? Alors qu'ils avaient retrouvé et repeuplé la surface ? 

La réponse fut évidente : ils ne souhaitaient pas que cela se reproduise. 

Lors de la formation de cette nouvelle coalition, chacune des espèces alliées revit sa politique et la gestion de leurs territoires. 

Les Humains, sous la direction d'Artorius Castus, unifièrent leurs sept royaumes pour ériger Élyséa : un empire s'étendant dans les Vastes Plaines. 

Les Nains, dirigés par Thardus Barbe d'Acier, battirent Margoria : un royaume situé dans les entrailles des Montagnes Draconiques. 

Enfin, les Elfes, sous le commandement d'Aurora, la Reine de Glace, formèrent Izalia : un autre royaume au cœur de la Jungle Luxuriante.

Avant d'être un redoutable guerrier, Artorius montrait déjà l'étoffe d'un homme brillant. Doué d'un talent inné pour la sociologie et la politique, ses choix n'avaient rien d'anodin. L'idée même de développer un empire fut avant tout un moyen de fédérer les royaumes humains. Il ne souhaitait plus les voir se déchirer par des rois avides de pouvoir. Même si ces derniers furent relégués au titre de Seigneur, l'indépendance et les privilèges acquis par cette nouvelle politique permit de préserver une paix durable au sein de la nouvelle Élyséa.

Mais Artorius ne s'arrêta pas en si bon chemin. Ne souhaitant plus se baser sur un modèle expansionniste, il restitua de nombreux territoires conquis par ses ancêtres aux espèces tributaires. Sans surprise, cette démarche - forte en répercussion pour les pro-humains qui en profitaient allégrement et depuis bien trop longtemps selon lui - ne fut pas vue d'un bon œil. Néanmoins, elle amoindrit les tensions qui subsistaient aux frontières de l'empire.

Malgré ses nombreuses décisions risquées, Artorius savait que le plus dur restait à venir. Il devait encore convaincre les Elfes et les Nains de rallier son plus grand projet : la Trinité. La tâche ne s'avérait pas aisée tant ces deux espèces se détestaient de par leurs différences physiques et spirituelles. Finalement, à l'aide de talentueux conseillers et émissaires, il réussit à mettre en place des mesures fondamentales.

L'une des premières fut d'établir le Midgaïen comme langue commune, permettant ainsi à chacun de communiquer sans contrainte linguistique partout dans les zones alliées. Artorius voulait avant tout éviter l'isolement des espèces, ainsi que l'emploi intempestif de traducteurs qui aurait pu relayer de fausses informations dans des moments critiques.

La mesure ne fut pas difficile à appliquer, car le Midgaïen vit le jour dans les profondeurs des donjons et temples qui abritaient les différents peuples lors de la Grande Guerre. À l'époque, ce langage leur permettait de communiquer entre eux pour combattre leur ennemi commun.

Artorius souhaitait également mettre en place un système économique efficace. 

Le troc - étant la source principale d'échange à ce moment-là - s'avérait pratique, mais pouvait rapidement devenir obsolète avec le temps. Pour éviter des pénuries de matériaux, ou encore des dépendances, un autre moyen devait voir le jour.

Les nains ont toujours été des maîtres dans l'art de la forge et de l'ingénierie. C'est d'ailleurs l'un d'entre eux qui suggéra une solution à ce problème avec la création d'une monnaie, également commune à tous. Lors d'un conseil organisé par Artorius, il jeta des pièces de diverses factures sur la table en guise de proposition. Cette idée fit l'unanimité et la devise du Magnus - qui se nomme comme son inventeur - fut alors adoptée.

La naissance de cette nouvelle monnaie s'avéra difficile pour les commerçants à ses débuts. Ils devaient donner une valeur marchande sur tout et n'importe quoi. Artorius les rassura en leur expliquant qu'au fil des échanges, les prix se fixeraient d'eux-mêmes et ce fut finalement le cas. Leurs derniers doutes se dissipèrent lorsqu'ils commencèrent à troquer avec une facilité déconcertante, aussi bien localement qu'à l'extérieur.

La devise du Magnus a été divisée en trois valeurs : le bronze, l'argent et l'or. Dans des circonstances exceptionnelles, des magnus de platines ont vu le jour pour les transactions les plus onéreuses. Elles étaient principalement utilisées pour l'acquisition d'équipements magiques poussés ou l'achat de propriétés prestigieuses. Concernant le change, un magnus d'or équivaut à cent magnus d'argent et un magnus d'argent équivaut à cent magnus de bronze. Le magnus de platine quant à lui est estimé à cent magnus d'or.

Par la suite, Artorius se pencha sur la création d'un système éducatif collectif, mais sa proposition fut catégoriquement rejetée par les Elfes et les Nains. Craignant de perdre leur identité et ayant déjà fait l'effort d'admettre le Midgaïen comme nouvelle langue commune, ils ne pouvaient accepter cet accord. 

Suite à cet échec, il essaya malgré tout de l'incorporer à son propre empire. Cependant, cela n'eut pas non plus grand succès. Ce ne fut pas surprenant, car au même moment était fondée la Guilde. Cette organisation - attisant pouvoir, gloire et richesse - éclipsa totalement ce système. Après tout, celui-ci ne correspondait pas aux besoins et désirs du peuple. Pas dans l'état actuel des choses.

L'empereur savait que certaines de ses idées se voulaient trop avant-gardistes. De ce fait, il rédigea bon nombre de manuscrits qu'il destina à ses héritiers dans l'espoir que celles-ci voient le jour dans le futur. 

Finalement, chacun des dirigeants - Humain, Nain et Elfe - accepta la constitution de la Trinité en la signant symboliquement de leur sang. Ils jurèrent ainsi de rester soudés aussi longtemps qu'ils vivraient et de l'inculquer à leur descendance pour que cette alliance perdure.

Malgré cela, les nouvelles générations ignorèrent peu à peu ces accords. Après tout, l'époque qui s'ensuivit fut paisible, sans grande menace. 

Il n'y avait plus personne pour raconter les horreurs qui eurent lieu lors des siècles passés, mis à part des vieux livres poussiéreux que peu se vantaient de pouvoir lire. 

Il n'y avait plus personne pour chanter les récits glorieux des héros qui sacrifièrent jusqu'à leur vie pour instaurer la liberté de leur peuple.

Il n'y avait plus personne pour y penser, car ils avaient oublié. 

Ils avaient oublié, car ils ne le vécurent pas, tout simplement.