Le cosmos baignait dans une harmonie précaire. L'univers, façonné par les entités primordiales, prenait lentement vie, mais derrière la beauté éclatante des astres et la terre fertile de Gaïa, un tumulte invisible se préparait. Ouranos, roi autoproclamé du ciel, descendait fréquemment pour embrasser Gaïa, mais son amour possessif étouffait plus qu'il ne nourrissait. Sous ses étreintes, Gaïa sentait sa propre création, ses enfants encore non formés, comprimés et brimés par l'immensité de son mari.
Un jour, alors qu'Ouranos couvrait la terre de son ombre infinie, son regard se porta sur les profondeurs de Gaïa. Ce qu'il vit ne le ravit guère : des formes étranges, des embryons de puissance qu'il ne comprenait pas totalement, prenaient forme, mais leur nature brute le dérangeait. Ouranos murmura alors, plus pour lui-même que pour Gaïa :
« Dégoûtant, indigne de moi».
Gaïa, bien qu'épuisée par les tensions, resta silencieuse. Mais dans ses pensées, une graine d'amertume s'enracinait. Ces enfants étaient sa création, sa fierté. Elle voyait en eux la promesse de l'avenir, même si leur forme était encore imparfaite.
Dans les ténèbres, Nyx et Érèbe observaient. De leur domaine, loin de la lumière éclatante du monde de surface, ils analysaient les interactions avec une froide distance.
« Ces conflits étaient inévitables, » déclara Nyx en un murmure presque inaudible. « La lumière appelle la division, et l'autorité engendre toujours le mécontentement ».
« Et nous ?» demanda Érèbe d'une voix calme mais résonante. « Nous restons là, passifs, à regarder leur monde s'écrouler ».
Nyx sourit légèrement, son expression empreinte de mystère.
« Nous sommes les ténèbres. Nos rôles ne sont pas d'interférer. La lumière est éphémère, Érèbe. Elle finit toujours par se consumer ».
Malgré ses paroles, Nyx ne pouvait ignorer une inquiétude sourde. Elle ressentait le poids de quelque chose de plus profond. Une brèche se formait dans l'ordre des choses, et même leur obscurité éternelle risquait d'être touchée.
Pendant ce temps, Michael restait une présence spectatrice dans cet univers, toujours invisible aux entités. Pourtant, leur comportement devenait de plus en plus lisible pour lui. Ouranos, dans son arrogance, agissait comme un souverain absolu, cherchant à imposer son contrôle sur tout ce qui naissait. Gaïa, malgré son apparente docilité, semblait abriter une douleur silencieuse et un profond ressentiment.
Michael analysait ces dynamiques avec attention, faisant mentalement des parallèles avec les récits mythologiques qu'il avait lus autrefois.
—Ce sont des fragments d'humanité dans une forme divine, pensa-t-il. Des figures de pouvoir, mais avec leurs propres limites, leurs peurs et leurs désirs.
Il remarqua aussi que, contrairement à Gaïa et Ouranos, Nyx et Érèbe étaient des forces plus abstraites, presque insaisissables. Leurs mouvements étaient calculés, leurs paroles rares, comme s'ils étaient au-delà des disputes triviales.
Mais une chose continuait d'intriguer Michael : leur incapacité à percevoir sa présence. Il s'interrogeait sur sa propre nature, sur la raison pour laquelle il se trouvait ici, témoin de ces événements monumentaux.
— Peut-être que je ne suis rien de plus qu'un spectateur, murmura-t-il pour lui-même. Mais si c'est le cas, pourquoi suis-je conscient ?
La fracture entre Ouranos et Gaïa se creusait. Chaque visite du roi du ciel était une source d'angoisse pour Gaïa. Non seulement ses enfants étaient opprimés, mais son propre être semblait diminuer sous le poids de son mari. Elle se mit à murmurer dans les vents qui parcouraient la terre, des mots de frustration qui résonnaient comme un appel à l'aide.
Les Titans, bien qu'encore jeunes et faibles, sentaient la détresse de leur mère. Leur haine pour leur père grandissait, alimentée par les injustices qu'ils subissaient. Cronos, l'un des plus téméraires d'entre eux, commençait à nourrir des pensées d'insurrection.
Un soir, alors qu'Ouranos s'étendait sur la terre, Cronos chuchota à ses frères et sœurs :
« Combien de temps devrons-nous supporter cela ? »
Ils n'avaient pas encore les réponses, mais une tension palpable s'installait dans leurs esprits naissants.
Michael observait ces prémices d'un bouleversement. Il ne pouvait entendre les mots de Cronos ni les murmures de Gaïa, mais il en percevait l'essence.
— Ce monde se construit sur des conflits, pensa-t-il. La lumière contre les ténèbres, l'autorité contre la liberté.
Il ressentit alors une étrange énergie autour de lui, une vibration qui semblait résonner avec sa propre existence. Bien qu'il n'en comprenait pas encore pleinement la nature, il avait la certitude que cette énergie jouerait un rôle dans les événements à venir.
Le chapitre se termine sur un pressentiment : une tension latente, un équilibre fragile sur le point de basculer. Ouranos et Gaïa, Nyx et Érèbe, Michael et les Titans – tous semblent se diriger vers une confrontation inévitable, chacun suivant son propre chemin, mais tous liés par le fil invisible du destin