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Le Conseil des Primordiaux

Dans un espace suspendu entre le vide infini et la jeune Terre en formation, les Primordiaux se réunirent. Ce lieu, né de leur volonté commune, n'était ni ciel ni terre, mais une confluence d'énergie pure où le temps semblait figé.

Tous répondirent à l'appel, à l'exception de Tartare, plongé dans ses profondeurs insondables, et d'Ananké, l'incarnation du destin qui œuvrait silencieusement à l'ordre invisible de l'univers.

Pour la première fois, les Primordiaux prirent des formes physiques, une tentative instinctive de rendre leur interaction plus tangible.

Gaïa, mère de la Terre, apparut comme une femme imposante, ses cheveux noirs ondulant comme les racines d'un arbre millénaire, et sa peau rappelant la texture fertile du sol. Ses yeux, d'un vert profond, évoquaient la promesse de la vie.

Ouranos, son égal et son partenaire, se tenait à ses côtés. Grand et majestueux, sa présence imposante était accentuée par des cheveux argentés et des yeux scintillants comme un ciel étoilé. Pourtant, une dureté se lisait dans son regard, une assurance presque agressive qui trahissait son caractère dominateur.

Nyx et Érèbe, les ténèbres incarnées, choisirent des apparences plus discrètes. Nyx, vêtue d'une robe noire qui semblait absorber la lumière, arborait un visage serein mais insondable. Érèbe, quant à lui, était un homme pâle et élancé, ses traits subtils presque effacés, comme s'il préférait se fondre dans l'arrière-plan.

Héméra, encore jeune parmi eux, brillait d'une lumière douce. Elle apparut sous les traits d'une jeune femme aux cheveux dorés, sa peau lumineuse dégageant une chaleur apaisante. Ses yeux bleus clairs, presque translucides, rappelaient l'aube naissante.

L'ouverture du Conseil

Gaïa prit la parole la première, sa voix résonnant avec l'autorité d'une montagne ancienne.

«La Terre est presque prête. Elle est jeune et fragile, mais elle sera le berceau de ce qui viendra. Il est temps de définir nos rôles et de décider de notre prochain acte.»

Ouranos posa une main ferme sur l'épaule de Gaïa, un geste qui se voulait protecteur mais qui trahissait aussi une certaine possessivité.

«Je veillerai sur elle d'en haut. Ma puissance couvre le ciel et les étoiles. Rien ne pourra menacer ce monde tant que je serai là».

Il se tourna vers les autres, son regard perçant.

« Mais ce n'est pas seulement une question de protection. Nous devons établir un ordre. La Terre ne doit pas sombrer dans le chaos.»

Nyx, immobile dans sa robe d'ombre, intervint d'une voix calme mais pénétrante.

«Le chaos fait partie de l'équilibre, Ouranos. Nous ne pouvons pas tout contrôler. Ma place, et celle d'Érèbe, est dans les ténèbres. Nous serons la contrepartie à ta lumière.»

Érèbe hocha lentement la tête, ajoutant d'une voix basse :

«La lumière ne peut exister sans l'ombre. Nous ne nous mêlerons pas des affaires de la surface, mais notre présence sera ressentie dans chaque recoin sombre.»

La naissance d'Héméra

Pour répondre aux préoccupations de Gaïa et d'Ouranos sur l'équilibre entre lumière et obscurité, Nyx expliqua brièvement la naissance d'Héméra.

«Elle est ma fille, et celle d'Érèbe, dit Nyx en désignant Héméra d'un geste fluide. Sa lumière est une extension de notre obscurité, une promesse que la nuit cèdera toujours sa place à l'aube.»

Héméra, consciente de sa jeunesse parmi ces entités anciennes, baissa légèrement la tête mais s'exprima avec une assurance naissante.

«Je suis ici pour apporter une transition, une balance. Mais je sens qu'il me reste beaucoup à apprendre.»

Gaïa lui adressa un sourire rare, reconnaissant en elle une alliée pour protéger la Terre.

«Tu feras ta place, Héméra. Ce monde aura besoin de toi autant qu'il aura besoin de nous tous.»

Tensions et ambitions

Cependant, tous ne partageaient pas la même vision. Ouranos, bien que respecté, commençait à imposer une autorité qui agaçait Gaïa.

«Tu ne peux pas prétendre être le seul protecteur de la Terre, lui lança-t-elle. Elle n'a pas besoin d'un maître, mais d'un équilibre.»

Ouranos rétorqua, son ton légèrement condescendant :

«Je suis le ciel, le père de tout ce qui est en dessous de moi. Si je ne m'assure pas que tout reste à sa place, qui le fera ?»

Cette tension entre eux n'échappa à aucun des autres, mais personne n'intervint. Nyx et Érèbe, fidèles à leur nature, observèrent en silence, préférant ne pas s'immiscer dans ce qui semblait être une querelle familiale.

Une conclusion temporaire

Après de longues discussions, ils s'accordèrent sur un plan provisoire :

• Ouranos resterait le gardien du ciel, veillant sur la Terre depuis les hauteurs.

• Gaïa continuerait à stabiliser le sol et à préparer l'émergence de la vie.

• Nyx et Érèbe établiraient les limites entre lumière et obscurité, définissant la nuit et ses mystères.

• Héméra apporterait la lumière quotidienne, reliant la nuit et le jour dans un cycle harmonieux.

Michael, l'observateur invisible

Inconscient de la présence de Michael, les Primordiaux poursuivirent leur réunion. Michael, de son côté, observa cette dynamique complexe avec un mélange de fascination et de perplexité.

«Ils sont comme des forces brutes qui apprennent à devenir des êtres conscients, pensa-t-il. Leur pouvoir est immense, mais ils semblent encore tâtonner. Peut-être que ce monde, cette Terre, est autant un défi pour eux qu'il l'est pour moi»

Michael détourna un instant son regard de la scène, fixant l'horizon infini de cet espace qui semblait résonner avec l'essence même de l'existence. Il réfléchit à ce qu'il venait de voir.

« Ils se réunissent, discutent, comme s'ils étaient liés par une mission commune… Mais est-ce vraiment le cas ?»

Il repensa à la tension palpable entre Ouranos et Gaïa. Malgré leur apparente collaboration, un fossé semblait se creuser, une divergence dans leur vision de leur rôle. Cette friction, bien que minime pour l'instant, éveilla en Michael une nouvelle pensée.

«Peut-être que même les entités les plus puissantes ne sont pas à l'abri des conflits. La création elle-même est un acte de tension, d'équilibre entre des forces opposées.»

Il tourna son attention vers Nyx et Érèbe. Leur discrétion, leur manière de se tenir en retrait, semblait les placer au-dessus des querelles. Pourtant, Michael se demanda si ce choix n'était pas aussi une faiblesse.

«Choisir de ne pas agir, de ne pas intervenir… Est-ce une forme de sagesse ou simplement une façon d'échapper à leurs responsabilités ?»

Puis il regarda Héméra, si jeune et pourtant déjà si lumineuse, et il sentit quelque chose qu'il n'avait pas ressenti depuis son arrivée dans cet endroit mystérieux : une lueur d'espoir.

«Elle incarne un équilibre naturel. Elle est la transition, le pont entre les ténèbres et la lumière. Peut-être que son rôle sera plus grand qu'ils ne l'imaginent encore.»

Cependant, une question plus troublante s'insinua dans son esprit : Et moi, alors ? Quel est mon rôle dans tout cela ?

Jusqu'à présent, il s'était contenté d'être un spectateur. Mais cette position devenait de plus en plus inconfortable. Observer sans comprendre pleinement, sans pouvoir interagir, lui pesait. Pourtant, une voix intérieure l'incitait à patienter.

«Tout ceci a un but. Je suis ici pour une raison, même si je ne la connais pas encore.»

Michael se concentra à nouveau sur les Primordiaux, réalisant à quel point ils semblaient aussi perdus que lui dans cette quête de création et d'ordre. Cette pensée le réconforta légèrement.

«Peut-être que nous sommes tous des novices dans cet immense jeu qu'est l'existence. Mais eux ont déjà commencé à tracer leur chemin. Moi aussi, je devrai en trouver un.»

Il fit un effort pour se recentrer, prêt à absorber chaque détail de ce qu'il voyait, car il savait qu'un jour, ces observations prendraient tout leur sens.

Une lueur dans l'obscurité

Alors qu'il réfléchissait à tout cela, une étrange sensation l'envahit. Ce n'était pas une voix ou une vision, mais une intuition profonde : quelque chose l'appelait. Pas dans ce lieu, pas parmi ces entités, mais au-delà.

Michael leva les yeux, cherchant à percer les mystères de cet espace infini. Il ne pouvait ni bouger ni parler, mais son esprit s'élargissait, comme s'il touchait une vérité plus grande, encore hors de portée.

«Peut-être qu'eux aussi, malgré leur puissance, cherchent ce qui est au-delà de leur compréhension», se dit -t-il en observant les Primordiaux qui continuaient leur discussion, inconscients de l'ombre silencieuse qui les observait.