J'ouvris la fenêtre, un vent frais me fouettant la peau.
L'air matinal, pas encore tiède, était assez froid pour réveiller les dernières cellules endormies de mon corps.
Je passai une main sur mon visage, regrettant pour la énième fois de ne pas avoir un paquet de soldier pills avec moi.
L'encyclopédie du chakra avait une branche dédiée à tout ce qui était biologie, mais mis à part l'iryoninjutsu – qu'il m'avait fallu pratiquer pendant des années et des années pour atteindre un niveau décent – le reste était au-delà de mes capacités.
Modifications génétiques et tout ce qui s'ensuivait n'étaient qu'un rêve fumeux que je ne pourrai jamais atteindre mais au moins, j'avais mon Fuinjutsu et une aisance naturelle avec.
Clignant des yeux pour chasser la fatigue, je sautai sur le rebord de la fenêtre, accroupi, sharingan tournant paresseusement dans mes prunelles.
Cinq jours coincé dans ce putain d'hôpital et ils sont toujours pas prêt de me lâcher.
Ni moi, ni les autres élèves de la 1-A, que je pouvais sentir-
Je me retournai, lentement, mes yeux rivés sur la poignée de porte qui tourna.
Mon regard croisa celui de Katsuki, béquilles en main, aussi pâle qu'un cadavre.
- Enfin réveillé ?
Il me lança un regard appuyé.
Je soupirai de façon exagérée, roulai des yeux, désactivai mon sharingan puis sautai dans la chambre sans un bruit.
Les semelles de Katsuki couinèrent sur son passage.
Il fit claquer la porte derrière lui et on se retrouva seuls dans ma chambre silencieuse, le lit dans lequel je n'avais pas dormi depuis des jours nous séparant.
- J'ai des choses à faire, dis-je en me pinçant l'arrête du nez. Viens en aux faits
Il m'observa en silence, scruta la chambre avec la même attention qu'un détective sur une scène de crime, ses yeux se posant un instant plus longtemps sur le lit aux draps parfaitement repassés et pliés.
- J'ai entendu dire que tu avais des Alters. Plus que ton feu et ta glace, je veux dire
- Tout le monde est au courant depuis une semaine
- Je suis debout que depuis une heure
- Et ton premier réflexe n'est pas d'appeler ta famille mais de venir me voir moi ? C'est triste
On se regarda en chiens de faïence, aucun de nous deux ne voulant abdiquer le contrôle de la conversation à l'autre.
Puis Katsuki clopina jusqu'au lit sur lequel il s'assit avec un soulagement qu'il réussit presque à cacher.
- Tu me l'as pas dit
- Je te l'ai déjà dis, Katchan. Je ne te dois rien
Il hocha la tête, trois fois, mais il n'avait pas l'air blessé.
- Tu me dois rien mais t'es quand même intervenu dans le combat contre All for One
- Aizawa m'a obligé à tous vous protéger
Bakugo eut un reniflement méprisant.
- C'est pour ça qu'Iida est en fauteuil, qu'Hagakure n'est plus la fille invisible mais 'la grande brûlée', que Kaminari est- oh non, j'oubliais. Kaminari est mort.
Il scruta mon visage pour une réaction, en vain.
- Qu'est-ce que tu veux ?
- Tu prétends qu'Aizawa t'as 'forcé la main' pour nous protéger, mais regarde l'état pitoyable dans lequel on est.
Il me désigna ses jambes, recouvertes de bleus et qui avaient l'air aussi fragiles que du verre.
- J'ai vu la vidéo et ce que t'as fais au vilain avec l'Alter de gigantification. Si tu l'avais voulu, t'aurais tous pu nous sauver sans que personne crève.
La colère me gagna.
- Oui. J'aurai pu.
J'étouffai le sourire victorieux qui pointa sur son visage par mes prochaines paroles :
- Mais je l'ai pas fais parce que j'en ai rien à foutre
Sans lui laisser le temps de répondre, je m'approchai de lui.
- T'as l'air d'avoir beaucoup parlé avec les autres élèves de la classe, hein ? C'est quoi le plan ?
Bakugo se releva brusquement, ses béquilles glissant presque sous ses mains.
- Tu veux que je m'excuses ? Que je vous supplie à genoux de me pardonner ?
Bakugo s'agita, et soudain mon visage était à un cheveu du sien, mon corps tout entier tremblant alors que j'étais sur le point de le frapper.
- Que je te dises que je regrette ? C'est ça que tu veux, hein ? Que je te dises que je regrette de pas avoir été assez ?
- Je veux que t'utilise tes putains d'Alter et que tu nous soignes !
Je clignai des yeux.
Puis j'enregistrai sa forme fragile, son corps faible, ses yeux mouillés empreints de faiblesse et de honte.
Je reculai de deux pas en arrière.
- Je peux pas faire ça
Bakugo fit claquer sa langue contre son palais.
- Arrête tes conneries
Mais il n'avait pas l'air certain que ce je disais était faux, et que ce qu'il voulait croire était vrai.
Un silence nous enveloppa.
- Je peux pas
- Pourquoi est-ce que tu m'as sauvé ?
- Arrête de te faire des idées
Nouveau silence.
Je reculai encore, passait une main sur mes yeux, le soudain pic d'adrénaline qui m'avait réveillé continuant à faire bouillir mon sang.
- Pourquoi est-ce que t'as intégré Yuei ?
- Je te l'ai déjà dit
- Répète, alors
J'haussai les sourcils avec mépris.
- Tu sembles avoir une idée erronée de moi, Katchan. Je ne suis pas un bon samaritain, encore moins ton ange gardien qui tombe du ciel pour te sauver le cul quand t'en as besoin
- Tu m'as sauvé la vie
J'ouvris la bouche, la refermai.
J'avais eu envie de tuer cette pétasse d'Uraraka, de frapper quelqu'un assez fort et assez longtemps pour évacuer ma colère, et Katsuki s'était retrouvé au milieu de tout ça de façon hasardeuse – et maintenant il prenait ça pour un signe. Ha.
- Fais très attention à ce que tu es en train de faire, Katsuki. Donner ta gratitude et ta confiance si aisément est tout sauf une qualité
Il s'impatienta.
- Tu m'as sauvé la vie, oui ou non ? Alors me dis pas-
- J'ai tué des gens, aussi.
Son visage s'assombrit.
- On a dû te le dire, non ? Même si Nezu a dû interdire les élèves concernés d'en parler à qui que ce soit-
Pour éviter la débâcle médiatique, gagner la gratitude de mon père, gagner ma gratitude.
- -vous en avez forcément discuté entre vous. Rien de mieux qu'un bon traumatisme commun pour resserrer les liens de l'amitié, hein ?
Les lèvres de Katsuki n'étaient plus qu'une fine ligne blanche.
Ses mâchoires étaient si serrées que je pouvais voir les muscles tendus sous sa peau claire.
- Mais ce n'étaient pas des gens. C'était des vilains.
Mon sourire mourut sur mes lèvres, tout comme ma prochaine répartie.
Pour la première fois de ma vie j'observai Katsuki Bakugo avec intérêt, non pas comme une créature en deux dimensions mais comme une personne à part entière, capable de réflexion et, surtout, d'être corrompue.
- Tu n'es pas venu pour que je vous soigne, dis-je lentement, yeux plissés. Tu savais que même si j'en étais capable, je dirai non.
Il battit des cils, et je su que j'avais tapé dans le mille.
- Qu'est-ce que tu veux ?
Katsuki me regarda, ses yeux aussi froids que de l'acier.
Puis il tira une enveloppe bleue, froissée, de sa poche.
- Lis
Je pris le document et lu en quelques secondes.
- Tu ne dois pas…
- Garder ça pour moi ? Si, évidemment. C'est une des conditions. Mais comme t'es le fils d'Endeavor, je me suis dis que je pouvais faire une exception. T'façon t'es pas vraiment du genre à aller raconter ta vie à tout le monde, donc je m'inquiète pas.
Il me fallut lire le contenu de la lettre deux fois de plus pour être certain que je ne venais pas d'halluciner.
J'ai encore baisé le canon même sans le vouloir.
Je me sentis sourire, incrédule.
Bakugo reprit :
- C'est évident à la formulation que je suis pas le seul candidat. En revanche, je compte être plus qu'un autre engrenage dans la machine
Je lui rendis la lettre.
- Qu'est-ce que tu attends de moi ?
- Ton vieux est pote avec All Might, non ? Alors tu peux apprendre tout un tas de choses.
Il inspira.
- Ce que je veux, c'est que tu m'aides à devenir le prochain successeur d'All Might.