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Le Prix d'Une Vie Éternelle

Le lendemain, Eiji fut réveillé par un bruit sourd et répété. Quelqu'un tambourinait à leur porte.

"Eiji ! Eiji ! Ouvre la porte ! On a une situation d'urgence !"

Il se prépara en quelques secondes, enfila son armure et s'équipa de ses armes. Il se précipita en direction de la porte, et l'ouvrit brutalement.

Il tomba nez-à-nez avec l'un de ses gardes, lame dégainée. Il était essoufflé et blessé ci et là.

"Daisuke, que se passe-t-il ?"

Le visage de Daisuke pâlit légèrement, tandis qu'il essayait de prendre la parole.

"Des… Des Yeux Ensanglantés ! Par centaines ! Ils… Ils errent dans les rues, attaquant quiconque a le malheur de croiser leur route. Vous êtes demandés par le commandant Kawasaki, votre père, pour organiser l'évacuation des civils."

Eiji prit Daisuke par les épaules, et le regarda droit dans les yeux.

"Repose toi un peu. Tu l'as mérité. Je te laisse t'occuper de ma famille. Où se trouve mon père ? Je vais le retrouver et lui demander si je peux m'occuper de sécuriser ce quartier."

"Il n'est pas très loin ! A la lisière d'Ichibaoki !"

"Très bien, merci. Je fais vite."

Eiji tint son sabre fermement et s'élança, courant aussi vite qu'il put. Les terrains environnant étant grands, le quartier résidentiel était très étendu. Il lui fallut plusieurs minutes avant d'atteindre le marché. Heureusement, il n'eut aucune mauvaise rencontre en chemin, bien qu'il vît quelques combats qui faisaient rage, au loin.

Arrivé à la frontière entre les quartiers d'Ichibaoki et de Nichisuki, il aperçut au loin un groupement de gardes. Il aperçut rapidement son père malgré l'agitation qui régnait.

"Mon commandant ! Capitaine Eiji au rapport !"

Ce dernier se retourna, soulagé de voir enfin son fils.

"Eiji, te voilà enfin. J'espère que ta mère et ta sœur vont bien."

Après avoir salué son père, Eiji adopta une posture plus décontractée et employa un ton moins sévère.

"Oui, ne t'en fais pas, Daisuke veille sur eux."

Le commandant soupira légèrement, un poids venait de se libérer de ses épaules.

"Père, j'ai une requête à vous soumettre."

"Je t'écoute."

"Pourrai-je s'il vous plait organiser l'évacuation des civils dans cette zone ?"

Eiji se courba par politesse. Il ne savait pas comment allait réagir son père. Après tout, bien qu'il ne s'en vantait pas, il était l'un des meilleurs combattants de la région. Son aide au front était précieuse.

"Bien, autorisation accordée. Veille bien sur Ruka et Tsuneko."

Il se tourna vers deux autres gardes à proximité.

"Lieutenant Misao, sous-lieutenant Asami, vous aiderez Eiji à évacuer Nichisuki."

"Oui mon commandant !" Dirent-ils en cœur.

Les trois gardes se regroupèrent et se concertèrent. Eiji, en tant que plus haut gradé, prit la parole en premier.

"Misao, Asami, avez-vous davantage d'informations sur la situation dans le quartier ?"

Asami, en charge de la communication, lui répondit :

"Oui. Nous comptons une trentaine de cas dans le quartier. Plusieurs groupes d'extermination ont été déployés mais…"

"Mais ?"

Hésitante, elle prit une grande inspiration avant de continuer.

"Certains Yeux Ensanglantés sont des gardes. Parmi eux, on compte le commandant Ameshiki."

Les yeux d'Eiji d'écarquillèrent. Ce nom était bien connu dans ces plaines. Après tout, bien qu'il ne fût pas le plus haut gradé, il était sans conteste le meilleur combattant de la ville, voire de toute la région.

"Ameshiki a donc succombé…"

"Oui, nous ne connaissons actuellement pas sa position si ce n'est qu'il est actuellement dans ce quartier. Il aurait déjà tué six gardes, dont un officier."

Eiji ne put s'empêcher de s'inquiéter pour sa famille, mais se reprit rapidement.

"Bien. Nous devons organiser l'évacuation, regroupons tous les civils à l'extérieur de la ville, porte de Nichisuki. Asami, tu pars à l'est, tu seras aussi notre relais communication. Misao, quant à toi, tu prends l'ouest. Je pars au Nord. On oublie aucune habitation. N'oubliez pas, aucun combat inutile. Si le combat est inévitable, appelez-moi, je viendrai rapidement vous aider."

"Compris !"

Les deux saluèrent Eiji. Asami sorti trois petits bouts de papier, ornés d'un symbole identique.

"Ces deux talismans permettront la communication longue distance. Ne le perdez pas et ne l'arrachez pas, sinon vous serez isolés."

Elle donna à chacun un talisman, qu'ils s'empressèrent de coller derrière leur oreille.

"Bien, bonne chance à vous."

Suite à ces mots d'Eiji, les trois gardes se séparèrent.

Cette fois-ci, Eiji prit le temps de vérifier chaque habitation et terrain, afin d'évacuer les civils restants. La plupart d'entre eux étaient encore endormis, ou se terraient chez eux. Rapidement, il guidait plusieurs dizaines de personnes en dehors de la ville.

"Suivez-moi, restez bien groupés ! Si vous voyez des Yeux Ensanglantés, prévenez-moi !"

Tandis qu'il avançait en direction de la sortie de la ville, il approcha une main de son coup, exactement là où il avait mis le talisman.

"Misao, Asami, tout va bien de votre côté ?"

Misao fut le premier à répondre :

"Pas de soucis par ici, nous sommes bientôt arrivés à la sortie de la ville. Aucune mauvaise rencontre."

"Ici Asami, nous avons croisé quelques Yeux Ensanglantés, mais nous avons su éviter tout combat."

"Bien, ne vous attardez pas et surtout, surveillez vos arrières. Terminé."

Alors qu'il était à mi-chemin Eiji aperçut à quelques centaines de mètres devant lui quelques personnes entrain de se battre. Les assaillants, qui étaient en plein milieu de la rue principale, ne pouvait être évités. D'autant plus qu'à proximité se trouvaient encore plusieurs habitations qui devaient être évacuées.

Eiji prit rapidement une décision, et murmura aux personnes derrière lui.

"Attendez-moi là. Je vais dégager la voie, je reviens vite."

Il courut rapidement en direction des combats. Deux d'entre eux portaient un sabre et semblaient être des gardes, tandis que le dernier se battait avec une bouteille en verre brisée.

"Gardes, au rapport !" cria-t-il.

Mais personne ne lui répondit.

Lorsqu'il se fut approché suffisamment, il remarqua que les trois avaient leurs yeux imbibés de sang. Il dégaina son sabre, en un crissement désagréable.

Entendant ce son, les trois personnes arrêtèrent de se battre, et firent face à Eiji. Sans hésitation, ce dernier s'élança vers eux. Le premier à réagir fut le vieillard à la bouteille brisée. De la main gauche il se saisit du sabre d'Eiji, qui s'enfonça profondément dans sa main, résultant en une effusion de sang.

Tandis que ce sang s'écoulait le long de la lame, le vieil homme tenta de poignarder Eiji à l'aide de sa bouteille. Ce dernier évita habilement. Il saisit l'opportunité, parvenant à retirer sa lame de l'emprise du vieillard, et lui enfonçant celle-ci dans son torse.

Il perdit rapidement appui et s'effondra au sol, son sang s'écoulant sur le chemin de terre. Les deux autres réagirent rapidement et attaquèrent ensemble, d'une coupe de sabre. Une fois encore, Eiji esquiva d'un pas en arrière.

Plus rapide à reprendre sa posture, il asséna un coup d'estoc dans la gorge du premier garde. Profitant de cet instant, le second essaya une d'atteindre Eiji à nouveau, mais ce dernier se servit de sa victime pour bloquer le coup, et la projeta ensuite sur son adversaire pour le déstabiliser. Celui-ci tomba et, une fois à terre, se fit transpercer le torse par la lame d'Eiji.

Pourtant catastrophé à la suite de ce combat à mort en un contre trois, seulement quelques secondes lui suffirent pour reprendre son souffle et ses esprits. Il rengaina son sabre et fit signe aux civils que la voie était libre. Rapidement, ils arrivèrent près de la sortie de la ville, seule une dernière habitation subsistait : la sienne, là où étaient encore enfermées sa mère ainsi que sa sœur.

La voie étant libre pour les autres civils, il les fit en priorité sortir de la ville. Il ne voulait pas les faire risque leur vie plus longtemps. D'autant plus qu'il aperçut une ombre roder autour du pavillon.

Il expliqua la situation à ses confrères.

"Asami, Misao, j'ai fait sortir plusieurs dizaines de civils à l'extérieur de la ville. Occupez-vous-en s'il vous plaît, j'ai encore une zone à sécuriser."

"Très bien. Faites attention à vous, capitaine."

"Compris. Je suis déjà arrivé, je les réceptionne."

"Je compte sur vous. Terminé."

Eiji entrouvrit le portail de sa maison, avançant prudemment et surveillant ses angles morts. Au lieu d'entrer par la porte principale, il longea les murs du côté gauche – extérieurs à la ville, afin d'entrer par la porte de derrière.

Tandis qu'il s'en approchait, il entendit des bruits sourds, comme si deux objets lourds s'entrechoquaient. Il accéléra le pas. Là, griffant la porte de ses mains et assénant occasionnellement des coups de lame, se trouvait un homme aux longs cheveux noirs.

Eiji reconnut aisément le commandant Ameshiki, grâce au hakama sombre qu'il revêtait, ainsi que son sabre d'obsidienne. Cela frustra énormément Eiji.

'Merde. Ce gars est beaucoup trop fort, même pour moi.'

Eiji se saisit discrètement de sa sarbacane, et tira un projectile qui se logea aisément dans la gorge du dernier. Les projectiles de sarbacane étaient imbibés d'une substance anesthésiante, qui affaiblissaient les victimes.

Cependant l'effet escompté n'arriva point. A l'inverse, cela ne fit qu'agiter davantage le commandant, qui se retourna en direction d'Eiji. Il hurla de toute ses forces sabre à la main et s'élança en direction de ce dernier.

Bien que moins rapide que son adversaire, et certainement moins fort physiquement, il parvint à dégainer son sabre à temps afin de parer le coup qu'Ameshiki lui assénait.

Eiji recula d'un pas lorsque les deux sabres s'entrechoquèrent, tant Ameshiki le surpassa en force. On pouvait également remarquer une importante entaille dans son sabre.

A vrai dire, c'est là une des raisons pour laquelle Eiji rechignait tant à parer : les sabres en acier possédaient un bon tranchant, mais étaient trop malléables et se détérioraient vite en cas de heurt avec une autre arme. Cet inconvénient n'existait pas pour les lames en obsidiennes, plus résistantes.

Ses options étant limitée, il recula de quelques pas et se mit en garde. Les deux combattants se regardèrent dans le blanc des yeux. Bien qu'Ameshiki avait perdu la raison, il n'avait certainement pas perdu ses instincts de guerriers.

Ils restèrent ainsi pendant plusieurs dizaines de secondes. Le premier à perdre patience fut Ameshiki, dominé par cette rage qui le possédait.

Il s'élança vers son adversaire, toujours en garde. Il était si rapide qu'il était difficile de distinguer la pointe de son sabre.

Eiji peinait à lire les mouvements de son adversaire. Il fut contraint de parer une nouvelle fois. Le choc était si violent qu'une gerbe d'étincelle jaillit depuis les lames. Ameshiki enchaîna les coups, détériorant davantage la lame de son adversaire ennemi.

Alors que le combat semblait sans issue pour Eiji, une troisième personne arriva. Armé d'une longue épée aux reflets verdâtres, il s'approcha presque instantanément d'Ameshiki.

D'un mouvement habile il le désarma, avant de lui asséner un coup fatal au torse. Il retira ensuite doucement sa lame, la secoua d'un mouvement fluide afin de retirer le sang, tandis que le corps du sabreur s'effondra au sol, tel une pierre.

L'épéiste se retourna ensuite vers Eiji, tout en rengainant son épée. Habillé d'une longue tunique de cuir sombre, ses yeux verts et ses cheveux blonds démontraient qu'il n'était pas un habitant de la région. Eiji ne connaissait pas cette personne. Mais en y regardant de plus près, on pouvait distinguer que ses oreilles étaient légèrement pointues, ce qui trahissait son appartenance elfique.

"Tu es le frère, j'imagine. Je détiens ta famille. Suis-moi si tu veux les revoir une dernière fois."

Eiji, encore sous le choc de son combat, ne comprit pas tout de suite ces mots.

"Vous les détenez ?"

Sans crier gare, Eiji prit une nouvelle fois son sabre en main, menaçant son sauveur.

"Libérez-les."

Mais cela n'effraya pas son opposant. Ce dernier était même étonnamment calme. Il tendit son bras vers le sabre d'Eiji, l'empoigna. En un instant, il se brisa, sans que l'elfe ne laissât s'écouler une goutte de sang. Il prit ensuite Eiji par le col et le fixa droit dans les yeux.

"Ecoute gamin, ce n'est pas que je n'ai pas le pouvoir de te tuer, seulement que pour le moment je n'en ai ni l'envie ni le droit. Si tu veux que les choses restent comme cela pour toi tu ferais mieux de te calmer. Compris ? On peut discuter calmement maintenant ?"

Aucun mot de sorti de la bouche d'Eiji, qui ne parvint qu'à hocher la tête. Il n'avait jamais vu quelqu'un d'aussi fort. L'elfe le relâcha, avant de continuer à marcher.

"Je m'appelle Tahrren. Je fais parti des Chasseurs d'âmes, mais j'imagine que tu n'en as jamais entendu parler, pas vrai ?"

Eiji acquiesça. Il n'avait jamais entendu ce nom, auparavant.

"Je ne suis pas surpris. Nous n'agissons pas souvent en public, alors dans une contrée aussi reculée que celle-ci, ç'aurait été un miracle que tu connaisses notre nom."

"Et donc. Vous faites quoi, les 'chasseurs d'âmes'."

Tahrren marqua une légère pause avant de continuer, d'un ton légèrement plus bas.

"Les Aarhèns. Tu les as vu, n'est-ce pas ?"

"Les yeux ensanglantés ?"

"Ceux-là même. L'immortalité est un pouvoir contre-nature. Ceux qui le possèdent corrompent le vivant. Que ce soit sol, plante, hommes ou toute autre race qui a le malheur de les approcher. Ils sont un fléau pour notre monde."

L'elfe s'arrêta, ils étaient arrivés dans l'arrière-cour. Là, Tsuneko et Ruka étaient ligotées à un arbre.

"S'il vous plaît, détachez-les."

Eiji ne pouvait que se lamenter. Il risquerait bien sa vie pour les sauver, mais il savait très bien que ce serait en vain. Tahrren était bien trop fort.

"Je ne peux pas. Ta petite sœur est malade, pas vrai ? Peau blanche. Faible physiquement, notamment des défaillances respiratoires. La nature ne l'a pas gâtée… L'anémie hémolytique. Son corps s'auto-détruit. J'ai connu un garçon autrefois atteint du même mal. Il s'est battu contre son propre corps pendant neuf ans avant d'en succomber."

"Mais…"

Eiji était dépasser par les événements. Il parvenait à peine à balbutier quelques mots. Comme paralysé, il parvint tout juste à faire quelques pas vers sa famille, sans pour autant réussir à les atteindre, une main ferme s'interposant. Celle de Tahrren.

"Comment une fillette parvient à survivre à une telle maladie pendant une douzaine d'années, alors que même les plus chanceux y succombent en moins d'une décennie ?"

L'elfe sorti trois petites fioles vides de la pochette en cuir qui était attachée à son ceinturon, et les jeta au pied d'Eiji. On pouvait distinguer quelques gouttes rouge pâle ruisseler sur les parois en verre.

"Du sang de dragon dilué. Une drogue à base du sang d'un animal immortel. Son essence permet d'allonger la durée de vie, même pour les morts en sursis."

Tahrren se retourna maintenant vers Tsuneko, la mère d'Eiji.

"Mais je me demande bien. Comment avez-vous pu vous trouver cela ?"

Apeurée, elle lui répondit, la voix vibrante :

"S'il vous plaît, ne me faites pas de mal ! Je ne veux pas mourir ! Je vous dirai tout ! Je vous le promets ! C'était… C'était au marché. Les cargaisons ne sont pas toujours fouillées… Ils les vendaient comme des produits pour allonger la durée de vie et soigner les maladies. J'en ai pris pour ma fille. Mais je n'ai su résister et en ai consommé également. Je ne connais ni le nom ni le visage des commerçants. Ils les cachaient toujours derrière des masques…"

Tahrren s'éloigna, puis soupira. Un air désolé se dessina sur son visage. Il était clair qu'il n'aimait pas inspirer la peur chez les autres. C'est pourtant le climat qui régnait aux alentours. Alors que la ville était prise d'assaut, le voilà qu'il séquestrait des gens.

"Ce que les personnes ne savent pas, c'est que les effets secondaires de ces breuvages sont très lourds. Non pas pour le consommateur, mais pour ceux qui l'entourent. L'immortalité a un prix. Même pour ceux qui acquièrent cette capacité à la naissance, comme les dragons. Un pouvoir contre-nature ne peut s'allier avec elle, et entraîne donc une corruption du vivant. Les manifestations peuvent être différentes d'un cas à un autre : les plantes meurent, la maladie se propage. L'apparition des Aarhèns est également classique. La corruption atteint le cerveau de la victime, qui perd totalement la raison."

Tahrren faisait les cents pas. C'était son travail d'expliquer l'origines des maux dont la ville de Ninakami était atteinte.

"Nous autres, chasseurs d'âmes, avons pour objectif d'arrêter la propagation de cette corruption. Et pour ce faire nous devons éliminer les immortels. Même si vous n'avez consommés ce breuvage qu'une seule fois, vous êtes porteurs de la corruption. Nous ne sommes pas pour autant une guilde d'assassins. Voyez-nous plutôt comme une inquisition, dont le seul jugement possible est la mort. La seule et unique question maintenant est, comment souhaitez-vous mourir ? Accepterez-vous la mort et quitterez-vous ce monde avec honneur, ou débâterez-vous jusqu'à la fin. Une mort douce et calme, ou une mort violente, c'est tout ce que je peux vous proposer."

"Attendez !"

Eiji attrapa la tunique de Tahrren.

"Vous ne pouvez pas les tuer. Jamais je n'accepterai cela ! N'y a-t-il pas une autre option ?"

Tahrren lui asséna un violent coup de pied, qui le projeta au sol.

"Ecoute gamin, des innocents meurent chaque seconde à cause d'elles. Le seul moyen d'arrêter ce carnage et de mettre fin à leurs jours. Si tu veux m'arrêter, essaie donc ! Mais ce sera au prix de la vie de centaines d'innocents, et probablement de la tienne. Crois-tu sincèrement que tu es capable de me vaincre ?"

Eiji ne put qu'abandonner. Impuissant, les larmes commencèrent à perler sur son visage. Il était indigne d'un guerrier de pleurer, mais dans l'état actuel des choses, il ne put les contenir.

Dans ce moment de désarroi, une voix faible mais bien distincte résonna.

"Ne t'inquiète pas grand frère. Tout ira bien. J'ai déjà bien vécu. Ces années de bonheur à tes côtés furent sublimes. Il est temps pour moi de partir."

Tahrren s'approcha des deux femmes. Il défait leurs liens.

"Vous acceptez-donc votre mort ?"

A ces mots, Tsuneko tenta de s'enfuir. Elle courut aussi vite qu'elle put, en vain. Une ombre s'approcha rapidement derrière elle, transperçant son cœur.

Elle s'effondra, laissant s'écouler une mare de sang. Son visage marqué par la terreur. A cette vue d'horreur, Eiji ne put s'empêcher de laisser s'échapper un petit cri de douleur, aigüe. Sa tête réfugiée dans ses mains, il serra si fort son visage qu'il s'en griffa involontairement.

Tahrren s'approcha enfin de Ruka. Elle ne se débattu pas. Voyant cela, il rangea son épée et prit à la place une flute accrochée à son fourreau. Il approcha le biseau de ses lèvres. L'air qu'il joua était calme, reposant. Transporté, Eiji parvint à se reprendre. Comme si rien ne s'était encore passé et que tout ce qui était à venir était l'ordre naturel des choses. Une atmosphère de paix régnait finalement sur la résidence.

Les yeux de Ruka se fermèrent lentement. Avant qu'elle ne s'effondre au sol, Tahrren parvint à la réceptionner. Il l'allongea au sol, dos à un cerisier. Son visage immaculé était baigné par la lumière incandescente du soleil d'automne. Enfin, le frémissement du vent transporta un pétale rose pâle sur son visage enfantin.