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Le Nuage de Rey, Tome 1: L'Ordre d'Artemis

Après plus d'un siècle de guerre sans interruption, l'empire du milieu a enfin réussi à faire s'installer une paix durable. Mais elle cache une société violente, cancérisée par une pègre avide de pouvoir et d'argent. Comme un malheur ne vient jamais seul, un phénomène météorologique nouveau apparaît lui aussi. Un nuage rose qui laisse tomber à certains endroits du monde une pluie modifiant à tout jamais ceux qui la touchent. Un quart de ce ceux touchés meurent, tandis que les autres survivent et voient leur corps et leur environnement évoluer pour le meilleur et pour le pire. C'est dans ce contexte que Myo et ses amis vont découvrir un univers nouveau où ils devront user de leur force et de leur imagination pour protéger le monde de sa destruction.

darkwand · Fantaisie
Pas assez d’évaluations
25 Chs

Pandore

Une fois de l'autre côté, nous arrivons en plein milieu d'un blizzard. La neige nous va jusqu'aux genoux. Un vent glacial vient s'infiltrer dans le moindre plis de nos vêtements. Je sers tant bien que mal mes bras contre mon corps pour ne pas geler sur place comme mes amis, alors que le capitaine reste de marbre et regarde à droite et à gauche, comme cherchant quelque chose.

-Tu ne vas pas nous laisser nous transformer en bonhomme de neige, Berrin ?! s'exclame le capitaine.

A peine a-t-il fini sa phrase que la neige cesse de tomber et qu'une lumière orangée apparaît au loin. Le vent s'estompe lui aussi et bientôt, la température redevient supportable tandis que la neige immaculée ne semble pas être perturbée par ce soudain changement de météo. Nous marchons alors tant bien que mal jusqu'à ce halo doré. Finalement, nous devinons un homme avec une immense épée dans le dos, tenant une lanterne par l'anse avec sa main gauche.

-Okata ! Qu'est-ce qui me vaut ta visite ? demande l'homme au loin.

-On aimerait voir l'un de tes nouveaux locataires: Kugutsu.

-Très bien. Je vais vous faciliter la route, répond l'homme en s'approchant avec sa lanterne.

L'homme est habillé chaudement dans un manteau de fourrure de loup et d'ours. Il a les cheveux et la barbe bleu. Sa grande épée dans son dos semble être faite de glace et il doit avoir la quarantaine d'année, tout au plus. Son visage est traversé par quelques rides qui font entrevoir un homme calme mais autoritaire.

-Chers apprentis, je vous présente le colonel Berrin. Colonel, voici ma nouvelle équipe.

-Ravis de faire votre rencontre. Mais rentrez plutôt à l'intérieur. Sinon, vous allez ressembler à de véritables glaçons.

Nous suivons alors le colonel qui nous éclaire et nous guide en montant une pente jusqu'à une falaise qui semble dépasser les nuages gris couvrant le soleil. Désormais, une grande herse dans la montagne nous fait face. Celle-ci est faite d'un acier rouillé, mais finement ouvragé. Les lames qui la composent ressemblent au corps d'un serpent géant. Ce monument est telle qu'une garnison entière pourrait facilement la franchir sans se bousculer. Étrangement, nous ne voyons rien au travers des ouvertures de cette armature de métal. Lorsque nous nous arrêtons devant cet impressionnant édifice, le colonel s'exclame avec force:

-Ouvrez-moi!

-Le mot de passe, demande une voix rauque provenant de derrière la grille.

- « Pour le bien de tous ». Mais bon sang! Vous devriez me reconnaître maintenant à force, s'agace le colonel alors que la herse remonte dans le plafond au son de centaines de mécanismes.

Lorsque nous entrons dans cette grotte, plusieurs torchent s'allument alors le long des murs et une dizaine de soldats en armure nous attendent calmement.

-Désolé, colonel. Mais ce sont les ordres, s'excuse l'un des soldats.

-Ce n'est rien, Bob. Vous faites bien d'être prudent et cela en toute situation, répond le colonel. De notre côté, nous allons rendre visite à Kugutsu. Surveillez bien l'entrée pendant mon absence.

-Oui, colonel! répondent les gardes à l'unisson.

Nous quittons donc la garnison pour nous enfoncer dans un tunnel. L'endroit est loin d'être sordide mais il semble ancien. La plupart des pierres qui forment cette entrée sont fracturés ou salis. L'endroit où nous nous tenons n'est pas très grand, mais il suffit à nous faire tenir tous ensemble. Il pourrait accueillir une trentaine de personne tout au plus. Pour nous rendre jusqu'à la cellule de Kugutsu, nous arpentons un dédale très labyrinthique. Nous ne cessons d'enchaîner des gauches, puis droites, des escaliers pour descendre puis monter. Tout ici est fait pour que la moindre évasion se transforme en échec.

-Cette partie de la prison s'appelle le labyrinthe. C'est la seule issue pour se rendre à l'entrée et par extension la sortie de la prison. De plus, le labyrinthe change de forme toutes les deux heures, raconte le colonel.

-Wow! lâche Hirion.

-Et ce n'est pas tout. Il y a de l'autre côté de ce labyrinthe, une salle un peu particulière. Vous allez voir, continue Berrin.

Nous arrivons finalement dans un hall avec douze immenses colonnes qui soutiennent la structure. Un peu partout, il y a des statues de guerriers, certains avec des haches, d'autres avec des épées. Leur seul point commun est leur splendide armure et leur taille imposante de plus de trois mètres de haut dans un marbre noire du plus bel effet.

-Ce sont des golems. Ils s'activent s'ils sentent la présence d'un prisonnier, dit le colonel.

-Comment peuvent-ils faire la différence avec nous ? demande Lyra.

-C'est une excellente question, mais c'est un secret. Disons simplement que les golems ne peuvent pas se tromper, lui répond Berrin.

-Tu l'as mis dans quelle aile ? demande le capitaine Okata.

-J'ai préféré le mettre chez Poséidon. Par mesure de sécurité, répond-il.

-Tu as bien fait.

Nous continuons notre route au travers de cette salle avant d'arriver face à cinq feux. Cinq flammes illuminent une sorte d'amphithéâtre. Chacune d'une couleur différente: noire, vert, rouge, bleu et enfin jaune. Elles sont à suspendu en l'air, disposées en arc de cercle du côté des gradins.

Le colonel s'approche de la bleue et y plonge sa main gauche et nous tend sa main droite.

-Donnez-vous la main et surtout ne touchez à rien une fois de l'autre côté.

Nous obéissons à l'ordre du colonel et nous nous donnons chacun la main. Au moment où Okata prend celle du colonel, nous sommes comme aspirés dans la flamme et après plusieurs secondes de tournis, nous sommes enfin arrivés. La sensation est assez désagréable et je ne suis pas le seul qui a envie de vomir. Hirion de son côté a l'air encore plus mal. Il prend appuie sur le mur près de lui alors que sa tête se penche en avant, comme prête à rendre son petit déjeuner.

-ça va passer d'ici quelques minutes. Respirez donc l'air frais et essayez de penser à autre chose, dit Berrin en tapant dans le dos d'Hirion.

Pour nous changer les idées, nous prenons le temps d'observer le lieu où nous venons d'atterrir. C'est un endroit paisible. Une immense grotte, avec un grand puits de lumière en son centre qui éclaire un lac turquoise avec de nombreux poissons à l'intérieur. Tout autour de nous, il y a des ruines recouvertes de plantes vertes. Cet endroit ressemble plus à un paradis qu'une prison et cela nous déconcerte tous.

-Où sommes-nous ? demande Wistom.

-Vous êtes dans l'une des cinq ailes de la prison, celle de Poséidon. On y enferme les criminels les plus dangereux qui sont une réelle menace pour la société. L'endroit est en apparence idyllique, mais il n'en n'est rien. Approchez avec moi au bord de l'eau.

Nous poursuivons notre aventure jusqu'au bord de l'eau où nous remarquons d'immenses poissons, tous plus monstrueux les uns que les autres. De vrais démons marins qui laissent apparaître des lames d'os en guise de dents. Je ne sais pas d'où sortent ces créatures, mais l'enfer doit en être jaloux.

-Regardez bien et dites-moi, si vous les voyez ? demande le colonel.

Nous nous penchons tous alors vers l'eau. Elle est tellement claire que l'on semble voir simplement au travers d'un simple verre bleuté. Après quelques dizaines de secondes de concentration, je remarque une cage de métal au fond de l'eau.

-Il y a une cage de métal au fond de l'eau, lui dis-je.

-Presque exact. Il y a en a trente-deux pour être précis. Tous les prisonniers de cette aile sont enfermés sous l'eau par trente mètres de fond. Cela les décourage de fuir en rompant la bulle d'air qui les entoure et leur permet entre autre de respirer.

-D'où le nom de Poséidon, dit Hirion.

-Exact. Mais le nom n'est pas de moi, comme tout ce bâtiment d'ailleurs, répond le colonel.

-Tous ces gens sont si dangereux que ça ? demande Lyra.

-Ceux que vous voyez ici, ont au moins plusieurs dizaines de meurtres à leur actif et ils sont tous détenteurs d'un « pouvoir ». C'est pour cela que nous prenons autant de précaution. D'autant plus que deux de nos prisonniers ont été capable de s'échapper, il y a deux ans, raconte le colonel.

-Quoi !? hurle Wistom.

-Comment est-ce possible ? je lui demande.

-Je n'aurais pas dû dire ça, je n'aurais pas dû dire cela... Oubliez ce que j'ai dit et observez plutôt votre cher ami qui va nous rejoindre.

En effet, une des cages commence à se rapprocher de la surface tandis que je réfléchis à ce que vient de nous révéler le capitaine. Il existe des gens suffisamment puissants pour qu'un tel endroit existe et de surcroît deux d'entre eux ont même réussi à en réchapper. Je serai curieux de savoir qui ils sont et comment ils s'y sont pris car cela n'a clairement pas été une partie de plaisir, vu l'étendue de la sécurité de ce lieu.

-J'espère que vos barreaux sont suffisamment solides, dit Hirion en grelottant à l'idée de se retrouver à nouveau face à Kugutsu.

-Ne vous inquiétez pas pour cela. De plus, les bêtes qu'il y a sous l'eau sont capable de dévorer n'importe quel être humain en quelques secondes. Nous avons même fait le test avec des golems de métal, s'amuse le colonel alors que Kugutsu vient d'émerger.

Il n'a plus sa belle tenue, seulement un habit beige avec un numéro: 032.

-Oh! Mais que me vaut cette charmante visite ? Vous m'apportez des oranges ? s'amuse Kugutsu comme s'il n'était pas stressé par sa nouvelle vie.

-Non, désolé. Peut-être un jour, mais aujourd'hui, je veux des réponses, répond le capitaine Okata.

-Des réponses ? Mais saurez-vous poser les bonnes questions ?

-Tout d'abord, je veux savoir qui...

-Une seconde, capitaine. Pourquoi devrais-je vous répondre ? Je ne gagne strictement rien à vous aider.

-Il est encore plus arrogant que je ne l'imaginais, s'énerve le colonel qui ne supporte pas le ton qu'il emploie.

-Tu gagnes un sursis à ton exécution. Ça te va ? lâche le capitaine, les traits tirés

-Non. Nous savons tous les deux que c'est faux. Vous nous gardez prisonniers ici, mais pourquoi ? Il serait tellement plus simple de tous nous exécuter sur le champ, au lieu de garder un tel lieu secret et si bien gardé.

-Parce que nous ne sommes pas des monstres comme vous. Nous pensons que la vie est précieuse. Toute vie...

-Non. Encore une fois, vous vous trompez. Ce n'est pas la vraie raison de notre présence ici. La question est donc : En êtes-vous seulement conscient, ou vivez-vous dans le mensonge ?

-Qu'est-ce que tu racontes ? La raison pour laquelle tu es ici, est que tu es un être violent et sadique qui n'est pas capable de vivre dehors comme le commun des mortels sans laisser tes pulsions folles maltraiter, torturer et tuer tous ceux que tu rencontres.

-Si vous préférez cette vérité...

-Il n'y en a pas d'autres. Mais je ne suis pas là pour prendre de tes nouvelles. Je veux savoir qui t'a informé pour Roy. Jamais il ne m'a dit qu'il bossait avec toi. Alors quelqu'un a fait la liaison. Je veux savoir qui.

-L'un de mes hommes le trouvait bizarre depuis quelques jours. Alors je me suis déplacé pour voir par moi-même. Il a dit qu'il allait au temple, un matin pour prier pour le repos de l'âme d'un de ses proches, au lieu de livrer l'une de nos marchandises. Je l'ai donc suivi et je l'ai interrogé, là-bas. Il faut dire que cela a été plutôt facile de lui faire cracher le morceau. A peine lui ai-je coupé trois doigts qu'il m'a balancé toute votre petite organisation. Et ce qu'il m'a raconté était totalement fou. Tout un ordre tourné vers la guerre contre la pègre sans que personne ne soit au courant. Je suis toujours au fait des dernières rumeurs mais je n'y croyais pas. Cependant, même si ce qu'il me racontait faisait écho aux rumeurs qui circulaient en ville depuis plusieurs mois, j'ai eu du mal à y croire alors je lui en ai coupé un autre. Ce n'est que lorsqu'il m'a parlé de gars possédant des pouvoirs que je l'ai cru. Il m'a parlé d'un certain capitaine Tonka qui était capable d'invoquer la mort. Puis, il m'a avoué vous attendre pour faire un point sur notre organisation. J'en ai donc profité pour créer une nouvelle œuvre en vous attendant.

-Tu n'as pas répondu à ma question. Je veux savoir qui t'a informé ?

-A quoi bon ? Qu'est-ce que vous allez faire de cette information de toute manière ?

-Je vais rendre justice. En le mettant lui aussi derrière les barreaux.

-Vous essayerez...

-Je réussirai.

Un moment de silence plane alors dans la grotte pendant que Kugutsu semble peser ses prochains mots.

-Très bien, j'accepte de te divulguer son nom. Mais à une condition.

-Laquelle ?

- Je veux des caramels.

-Quoi ?!

-Vous m'avez bien entendu. Tous les jours, je veux un sachet de caramel. La bouffe qu'on nous sert dans ce paradis est probablement trop infecte pour mon palais, si délicat.

-Ahhahahah ! Tu as beau être un criminel. Tu as réussi à me faire rire. Ça me va. Si tes informations sont exactes, tu as ma parole que tous les jours, on te donnera des caramels.

-J'ai aussi votre parole, colonel ?

-Oui. Ce n'est pas trop cher payé. Je te jure que tu les auras.

-Bien. Maintenant que tu as notre parole à tous les deux, je veux son nom.

-C'est Héliotrope. Il fait souvent les aller-retours entre G-Shokunin et L-Netsu pour effectuer des livraisons à différents clients. En théorie, il devrait se trouver à G-Shokunin en ce moment même.

-Quel genre de livraisons ? demande le capitaine Okata.

-Toute sorte d'objets de valeurs.

-Il vous sert donc de convoyeurs. Est-ce que c'est lui qui est chargé de récupérer les paiements ?

-Je crois avoir déjà répondu à votre question, capitaine.

-Ce n'est pas ce qui était convenu, s'énerve le colonel Berrin.

-C'est tout à fait ce qui était convenu. Vous vouliez savoir où il se trouve ? Maintenant c'est chose faite. J'attends avec impatience mes caramels, sourit Kugutsu.

-Espèce de salopard arrogant ! s'agace le colonel.

-Ne vous énervez pas, colonel. Il ne le mérite pas. Et au fond, j'ai ce pourquoi j'étais venu. Le reste n'aurait été qu'un petit bonus.

-Qu'allez-vous faire maintenant ? lui demande le colonel.

-Je vais demander au commandant Wolgen de m'autoriser à aller voir Bykings. Il nous permettra d'obtenir plus facilement des informations qu'avec Kugutsu.

-Très bien. Je vais vous raccompagner jusqu'à la sortie, dit le colonel pendant que la cage de Kugutsu plonge dans l'eau pour retourner auprès des autres.

Nous faisons donc demi-tour. Mais quand la cage s'est renfoncée avec Kugutsu dans le fond du lac. Je n'ai pas pu m'empêcher de remarquer son sourire. Comme s'il était satisfait de lui-même, pourtant il n'a fait que se plier au désir du capitaine. Que peut-il être en train de manigancer? Quel intérêt avait-il à nous livrer si facilement son partenaire ? Je pense qu'il nous a caché quelque chose, mais quoi ? A-t-il simplement menti sur l'endroit et cherche-t 'il à nous faire perdre du temps ? Nous a-t-il donné un faux nom ? Et pourquoi le capitaine ne l'a pas obligé à nous en dire plus. Il aurait pu facilement le forcer à nous révéler des informations supplémentaires sur ce Héliotrope. Il faudra que j'en parle au capitaine Okata une fois qu'on sera sorti de Pandore, car tout cela ne me dit rien qui vaille.