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La Grande Chasse

Lewoal · Fantaisie
Pas assez d’évaluations
6 Chs

Chapitre 1

Tôt dans la matinée, mon père m'avait demandé de le rejoindre dans la prairie d'élevage. Cela faisait une éternité qu'il ne m'avait pas autorisé à y mettre les pieds, probablement depuis la dernière éclosion. L'endroit était brûlé, inondé, irrespirable, voire totalement sens dessus-dessous... Comme à chaque début de jeu, me racontait-il souvent. À peine les pousses voyaient le jour à nouveau, à peine étaient-elles brûlées par la chaleur infâme.

Cette fois-là, j'allais pouvoir admirer la naissance de toutes ces majestueuses créatures, du haut de mes sept ans. Ma tante, que je considérais comme ma mère aujourd'hui, même avec ses trente-cinq ans passés, était toujours inquiète à l'idée qu'il puisse m'emmener aussi près, mais il le fallait bien. Un jour ou l'autre, à l'âge adulte, ça sera à moi d'amener mes enfants sur ce terrain sec, et ça sera à mon tour de m'occuper de tous ces œufs.

Aujourd'hui, il se tenait à mes côtés, il ne me regardait pas, mais regardait vers le ciel, enfin, ce qu'il y avait devant lui. Une énorme coquille, à semi-transparente, qui contenait une magnifique ou bien une créature d'une laideur incommensurable.

- Regarde un peu mon fils, disait-il gaiement, tous ces œufs seront éclos lors du prochain jeu. Et tous ces futurs dragonnets seront des proies pour les hommes, ou bien seront leurs chasseurs. C'est un bien triste jeu, mais qu'est-ce qu'on rit quand ils reviennent nous raconter leurs aventures ! Mais, reprit-il, ton rôle, ça sera de leur permettre de voir le jour, pas de courir après ou d'être poursuivi. Ces dragons n'attaqueront jamais celui qui leur a permis de voir la lumière de la vie, non, ils te considéreront comme un parent. Il se peut qu'ils te chassent, mais pour jouer, tout comme Drabank avait fait avec moi, bien que j'y ai perdu un mollet.

Comme il se promenait toujours avec un pantalon qui s'arrête aux genoux, je pouvais toujours voir la trace de croc géante dans sa jambe, des cloques s'étaient formées depuis le temps, toujours aussi rougeâtre et pleine de croûtes.

- Prends toujours garde. Ne les laisse pas entrer dans la maison. Surtout, si tu as des enfants. Les premiers jours, les nouveaux-nés sont difficiles à suivre, n'oublie pas que ce sont des œufs abandonnés, probablement parce que leurs parents les jugeaient trop chétifs sous leur coquille ou qu'ils apparaissent indignes. Les retardataires de la portée, si je peux te l'expliquer comme ça. Bien que je ne puisse pas te dire avec certitude qu'ils le soient vraiment, après tout ce n'est pas mon travail de les ramasser.

- Mais pourquoi ils ne s'envolent pas dès qu'ils sortent ? Demandais-je enfin.

En réalité, je connaissais déjà la réponse à cette question, j'aimais tellement écouter mon père parler de ces naissances que je m'en fichais. Il valait mieux que je sois prêt et à l'écoute de chacun des détails.

- Eh bien, tout simplement parce que leurs membranes ne sont pas prêtes à fendre l'air. Quand ils naîtront, leur peau ne sera pas prête non plus, ça ne sera qu'une boule de muscles et d'os à l'air libre avec de petites cornes. Les dents et les griffes se formeront dans deux semaines environ, alors que la peau est toujours la dernière à se former. Puis on attendra deux semaines de plus avant de les lâcher pour le jeu. Ensuite, ils commenceront à grandir, jusqu'à dépasser la montagne là-bas, finit-il en me la montrant du doigt. Mais je t'ai déjà dit tout ça, non ?

- Seulement un mois ? Donc, dans vingt-huit jours, il y a le début des inscriptions.

- Exactement. Yuvan annoncera le début dans le stade, comme tous les quatre ans, mais tu n'avais que trois ans lors de la dernière. Il se fait vieux, son fils prendra sûrement la relève d'ici la prochaine fois, dit-il d'un ton austère.

- Oh non pas lui ! Je le déteste ! J'espère qu'il sera mangé par une vache ! Il vient toujours voler mes jouets ! Grognais-je.

Mon père n'ajouta rien ni ne me réprima. J'allais lui demander à quoi ressemblait un dragonnet pour changer de sujet, puisque je n'avais pas atteint l'âge de raison lors de la première chasse, mais les œufs commencèrent à se fissurer, se craqueler, jamais il n'y en avait eu autant d'après mon père. Je souhaitais lui redemander quelque chose, mais il me donna aussitôt un ordre à la place.

- Ils vont être morts de faim, va réclamer ses vieilles brebis et vaches au fermier.

- Tout de suite ! M'empressais-je de répondre.

Enfin ! Je servais à quelque chose ! J'avais tellement peur de rater l'éclosion que j'ai préféré couper par la forêt plutôt que faire le long détour au travers des montagnes de basalte. Prendre ce raccourci au travers de la forêt me permettrait sûrement d'arriver à temps pour voir les coquilles s'ébrécher jusqu'à entrevoir ces bêtes. La forêt séparait parfaitement la ferme de la prairie d'élevage, - ou plutôt du canyon désertique -, mais elle était dangereuse pour un enfant de sept ans comme disait mon père, notamment à cause des loups qui chassaient jusqu'à l'après-midi, car la nuit, c'était les Créatures qui rôdaient. Si un loup osait sortir sa truffe, il était comme mort, c'était inéluctable. Même les ours étaient en difficulté, si peu soit-ils, si mon père m'avait vu passer par ici, il m'aurait probablement attrapé par la peau du cou et ramené sur le bon chemin. Mais il ne se doutait sûrement de rien, alors tout allait bien.

La forêt était inondée de vase depuis le dernier jeu, m'avait-on dit. Des marais boueux s'étaient formés et des empreintes griffues étaient parfaitement visibles sur la mousse des rochers. D'ailleurs, elles étaient très espacées. On liait souvent ces traces à celle d'un dragonnet unijambiste, blessé par un chasseur. Bien que je fasse semblant de ne pas être au courant pour ne pas alerter mon père de mes passages par ici.

Ces marécages sont tellement épais ! Tout est tellement vert, impossible de retrouver son chemin sans le connaître par cœur !

La première fois que je m'y suis aventuré, je me suis perdu, j'ai dû trouver plusieurs excuses pour expliquer ma présence dans la forêt au vieux fermier, mais maintenant, il sait que je passe par ici, au moins il sait garder un secret.

Tout d'un coup, j'eus des frissons, je sentais la panique m'envahir, instinctivement, je me baissais, puis à quatre pattes entre les roseaux du marais et la boue gluante qui me collait aux mains et les jambes. Je trébuchais sur une racine et tombais à plat ventre dans la gadoue, « beurk » dis-je tout haut avant de me souvenir du prédateur qui me suivait à la trace. Je savais qu'il était là, je l'entendais marcher à pas feutrés sur la mousse, des bruits de succion à chaque pas. Il était proche, très proche. Je me posais sur mes fesses, les pieds complètement ensevelis dans la boue, en essayant de trouver de quel côté venait ce bruit exactement. J'écartais les roseaux le plus silencieusement possible, quand je tombais nez à nez avec la truffe humide d'un énorme chien noir. Un chien ? Plutôt... un loup, ses yeux rouges semblaient me fixer. Je manquais un battement de cœur, je croyais mon heure venue, mais il ne bougeait pas. Il ne me voit pas ? Il ne me sent pas ? Qu'est-ce qui se passe, pensais-je à toute vitesse. Puis le froid mordant mes jambes me rappela que j'étais noyé dans la boue. Ma survie ne tenait qu'à ça, si je n'avais pas trébuché, je serais mort. Je respirais le plus faiblement qu'il m'était possible de faire, mes poumons semblaient en réclamant plus d'air frais. La bête devant moi reniflait rapidement, en approchant sa gueule au plus proche de mon visage, inspirant l'air froid de la forêt avant de repartir à travers les roseaux.

J'aurais mieux fait de contourner la montagne ce jour-là, mais heureusement, papa ne le saura jamais. D'ailleurs, je vais rester coincé dans cette boue verdâtre et mes bottes vont y passer si je ne me dépêche pas. Et le soleil qui ne traverse jamais les branchages, on y voit rien du tout. Mais d'un autre côté, si la lumière traversait, je serais bloqué pour de bon sous la terre séchée.

Maintenant que j'y pensais, ramener le bétail allait me prendre trop de temps, j'allais certainement rater l'éclosion, la vraie ! J'irai prendre une corde dans son étable, ça m'évitera de perdre les bêtes en route. Pourvu que j'arrive à temps. Voilà le chemin. Heureusement que les plantes n'ont pas poussé par-dessus sinon elles s'arrêteraient tous les mètres pour brouter. Vivement, qu'ils taillent une route au travers, mais comme je suis probablement le seul à emprunter ce chemin, il n'y aura que moi pour le faire dans le futur, j'imagine.

Alors que je commençais à sortir de la forêt, j'aperçus la vieille bicoque du fermier. Le toit de chaume, comme celui de ma propre maison.

- Vival ? Merald ? Hé oh ! Les œufs vont éclore, on a besoin de bétail !

- Les vieilles vaches sont dans l'enclos à droite de la maison, lui répondit une voix masculine rauque et chevrotante.

Elle venait de la fenêtre ouverte sous la chaleur étouffante. Un vieil homme, le nez plongé dans son journal, sur sa chaise en paille le regardait d'un œil.

- Et les brebis ?

- Au même endroit, les œufs sont très gros ?

Je ne savais pas quoi répondre, pour moi, ils me paraissaient tellement gigantesques !

- Je ne sais pas, ils sont plus grands que les arbres de la forêt !

- Ah, des petits alors, il y a quatre ans, j'ai dû me séparer de plus de bétail qu'à l'accoutumée. Heureusement que Yuvan m'a remboursé le supplément !

- Je pensais que vous les donniez.

- Donner mes bêtes gratuitement ? Bah tiens ! Ça va pas la tête. Je vivrais comment si je donnais ma ferme, tiens ?

Il n'avait pas tort, mais je n'avais aucunement l'intention de continuer cette conversation, ignorant le badinage du vieux fermier, je me dirigeais vers l'enclos, mais avant, une corde ! Hors de vue, j'en arrachai une dans l'étable, adjacente à l'enclos où broutaient les bêtes. Elle était effilochée, mais devrait tenir jusqu'à la prairie.

- Alors les vavaches ? Qui veut se faire manger ? Leur chuchotais-je.

Évidemment, aucune réponse, je ne m'attendais pas non plus à entendre un meuglement de joie. J'attachai la corde autour du cou de l'un d'entre elles, puis continua à rassembler les autres, passant la corde dans leurs colliers à cloche.

En prendre autant d'un coup allait être difficile, mais il les fallait dans l'heure, comme m'avait apprit mon père, heureusement que l'on vivait loin de la ville, les rues étaient désertiques avec cette chaleur, alors qu'en ville, il y avait sans doute une centaine de personnes affalées près des étalages au marché à réclamer des fruits juteux et frais.

- Alleeez ! Grommelais-je entre mes dents, venez !

Je tirais sur la corde de toutes mes forces, j'avais l'impression que mes bras étaient sur le point de s'arracher. Le bétail ne bougeait pas d'un iota, et moi j'étais déjà fatiguée de ma traversée du marais, à sautiller par dessus la mousse glissante.

J'ouvris grand la barrière, car même après dix bonnes minutes je n'en étais toujours pas sorti, puis je commençai à marcher à reculons, je serrais les poings si fort sur la corde que mes jointures blanchirent. Les bêtes commençaient à me suivre, le pas lent et en meuglant. Je continuai de me diriger vers le chemin sans verdure entre deux montagnes de basalte, où, sous celle de droite, se trouvait mon ancienne maison.

Finalement, après près d'une heure de marche, j'étais arrivée à la limite de la prairie d'élevage, les œufs n'avaient pas encore éclos mais ils étaient devenus d'un blanc vaporeux, où la silhouette des dragonnets disparaissait clairement.

- Ah te voilà ! Regarde, ils commencent à brûler l'intérieur de leurs coquilles, sans payer attention à la horde de bétail.

- Je dois mettre les animaux au delà de la barrière ?

- Oui, laisse-les gambader, ils vont servir de repas à nos nouveaux colocataires pour le moment. Ça ne devrait plus tarder. Tu vois celui là, là-bas ? Il a percé la coque déjà, il devrait sortir dans quelques instants.

En effet, il avait raison, à peine je tournais la tête vers lui que sa tête dragonnet était déjà dehors, humant l'air extérieur, mais je n'arrivais pas à le discerner, son crâne était plongée dans un brouillard blanc. J'étais tellement déçu d'avoir raté ce moment !

- Où est le liquide amniotique qu'il y a normalement ? Tous les œufs en ont, non ?

- Il a été transformé en vapeur, c'est pour ça que les œufs deviennent blancs, je t'ai dis qu'ils brûlaient la coquille de l'intérieur.

Je suis certain qu'il ne me l'avait jamais dit. Quelque chose que je ne savais pas !

- Mais, comment vont-ils savoir que tu es leur « parent » ? Ils ne vont pas te voir d'ici.

- Bien sûr que si, leur vision est déjà parfaite à cet âge. Regarde, tu vois le dragonnet qui casse le reste de sa coquille là-bas ? Dès qu'il aura fini, il se dirigera par ici, il comprend parfaitement que je suis son tuteur, il faut les fixer droit dans les yeux, puis je vais le nourrir pour lui montrer qui est le patron, même s'il arrive que parfois, ils se lient à une vache.

- Papa, il est répugnant, dis-je avec dégoût. Tu as vu ses yeux ? Ils sont vert caca !

- Ne dis pas ça, toi aussi tu étais laid à ta naissance.

- Mais ! Criais-je sans avoir rien rajouter.

La bête glissa une énorme patte en dehors de son cocon, comparé à la taille de l'œuf, il paraissait minuscule. La chair blanche rosâtre et les os de la créature étaient totalement nus, c'était terrifiant, jamais je n'imaginerai cette bête avec une peau supplémentaire, plus dangereuse. Les muscles était flasques, je n'arrivais pas à comprendre comment il arrivait à bouger.

- N'oublie pas que se sont les plus faibles de la portée, les retardataires, les confronter à un loup pourrait les tuer, il faut les surveiller en permanence toute la journée. Surtout ainsi.

- Mais ils ne sont pas censés être dangereux ?

- Si, bien sûr, mais dans un mois. C'est pour ça qu'on les gardes jamais plus longtemps. Il y a huit ans, au bout de trois semaines ils étaient déjà tous adultes, on a dû les enfermer pendant une semaine supplémentaire pour que les participants arrivent et soient prêts. Mais le bâtiment n'a pas résisté, on ne pensait vraiment pas que l'un d'eux vomirait de la lave, pendant trois jours il volait en cercle autour de notre ancienne maison, l'ensevelissant sous la lave, d'où la montagne de basalte là-bas, mais ça tu le sais déjà, mais tu étais peut-être trop petit pour t'en souvenir. Puis ils sont restés, presque tous, en fait. On les maintenait près de la plaine avec de la viande puis trois jours plus tard ils sont partis en dehors de la ville. Ça laissait quand même un certain train d'avance sur les participants.

- Et après ils sont partis se faire tuer, car c'était trop dangereux de les garder pour chez soi, ça je le savais. Qui voudrait garder un dragon qui vomit à tout bout de champ de la lave en fusion ? Pas moi en tout cas !

- Bon ! Trouvons un nom à celui-là.

- Un nom ? Ils sont tous nommés ?

- Évidemment ! Il leur faut un nom fougueux ! Dit-il.

- C'est toujours toi qui t'en charges ? Je peux leur trouver des noms moi aussi ? Demandais-je aussi innocemment que possible .

- Si tu m'en trouves des bons, peut-être que je ferais une exception.

- Finistra alors ! C'est trop cool comme nom.

- C'est un mâle ! Rit-il, je ne m'étais même pas rendu compte que je ne t'avais jamais appris à faire la différence, hahaha ! Pauvres bêtes, dit-il en commençant à m'expliquer. Alors, les mâles peuvent avoir des cornes sous le menton, alors que les femelles jamais, mais là on peut pas encore très bien voir, dit-il en me montrant leur emplacement du doigt. Par contre, les dames ont les ailes plus longues, dans le cas où tu pourrais hésiter. Car ils ne possèdent pas toujours de cornes.

- Herreur ? Proposais-je en crachant le H pour lui faire saisir mon jeu de mots.

- Tu dis ça à cause de son apparence ? Quand il grandira, il sera très différent. À part la forme de son corps, tu auras du mal à le reconnaître.

- Si j'aurais du mal à le reconnaître, comme tu sauras que c'est lui ? Et si on lui donnait un nom plus tard ? On aura qu'à l'appeler Sale Bête, tout simplement.

Mon père ignora ma remarque, il avait visiblement pour habitude de tous les nommer à la naissance, une tradition que notre famille d'éleveur je suppose, tout comme on nommerait un enfant.

- Ça sera Seipher, décida-t-il enfin.

- J'ai le droit de donner mon avis ?

- Non ! Répondit-il avec un grand sourire vers mon visage.

- Surveille l'éclosion, je vais aller prévenir Yuvan qu'il prépare le bureau des inscriptions.

- Pas de problème !

J'avais drôlement peur tout le même. Il veut me laisser tout seul, du haut de mes quelques centimètres avec des bestioles géantes ? Aussitôt qu'il aura le dos tourné il va me croquer celui-là !

Et surtout... Il ne va pas me confondre avec son tuteur pendant que mon père sera parti... N'est-ce pas ? Demandais-je à ma conscience.

- Papa ! Me laisse pas !

- T'en fais pas, il a pas de crocs, cria-t-il en partant.

Maintenant qu'il avait disparu derrière la forêt, j'étais seul. Ma tante était à la maison, loin des regards en train de faire les comptes, mais je ne l'appellerai pas ! Je dois être grand, intelligent, pas faible et dépendant.

Je faisais les cent pas le long de la clôture, le regard dur, attendant patiemment le retour de mon père, tandis que le premier né jouait avec le bétail. Une des coquilles avait craquée. Je l'avais entendu, je m'étais penché sur la barrière, regardant de tous les côtés dans l'espoir de trouver une fissure sur un des œufs blancs, mais l'enclos était beaucoup trop grand, il y avait au moins dix mètres entre chaque œuf. Depuis qu'ils avaient étés amenés, je n'avais jamais pensé à les compter. Cinq...neuf...onze ? Onze noms... Je peux peut-être en trouver le temps que papa soit parti.Voyons voir... Seipher, je n'aurais pas eu le choix sur ton nom, sale moche. Et s'il y a une femelle... Dilapha ? C'est joli ça.

- TATA ! Hurlais-je pour atteindre la personne dans ma maison.

- AAH ! Cria-t-elle, j'entendis des tasses heurter le carrelage. Tu m'as fais peur ! Ça va pas de hurler comme ça ? Qu'est-ce que tu veux ?

- Je voulais te demander si tu aimais bien le prénom Dilapha.

- Un prénom ? Hum, oui, pourquoi pas, répondit-elle. Pourquoi tu n'en appellerai pas un comme moi ? Plaisanta-t-elle.

- Bah non ! Imagine s'il meurt ?! Jamais. Tout comme papa, ou moi. Peut-être maman à la rigueur.

- Ne dis pas ça ! Ah, ma pauvre belle-sœur...

- Mais elle n'avait pas le droit de participer, c'est papa qui me l'a dit.

- Non mais il peut pas se taire celui-là ? Ronchonna-t-elle. Non, c'est vrai, mais elle voulait sauver Le Boiteux.

- C'est qui celui-là ? Demandais-je.

Elle posa ses coudes sur le bord de la fenêtre brûlante, le regard noir perdu vers la plaine. Une faible brise décoiffa ses cheveux châtain aussi raides que des murs.

- Comme tu t'en doutes, c'était un dragonnet qui boitait à sa sortie de l'œuf. Ta mère et moi l'adorions, il l'a prise pour son parent, mais il est mort. Quand ils l'ont lâché dans la nature pour la chasse, ta mère est parti discrètement le poursuivre dans la forêt que tu vois là-bas derrière pour le ramener et le libérer ailleurs, mais ça ton père ne l'a jamais su, tu es dans la confidence maintenant ! Elle reprit, je ne connais pas les détails mais quand on l'a rattrapée, elle hurlait à l'aide dans un ravin, elle était gravement blessée, et puis, elle est morte d'hémorragie, peu de temps après.

Elle se tut quelques instants.

- Tu sais... cette année-là, il y avait nos deux médecins qui participaient, ces égoïstes. Pas moyen de les faire abandonner la compétition ni même de les retrouver pour une blessée grave, évidemment ! Quelle tragédie...

- C'est elle qui l'a cherché. Maman savait pertinemment qu'elle n'avait pas le droit d'y participer en tant qu'éleveuse.

- Ne dis pas ça de ta mère ! Elle ne participait pas et je ne sais pas ce que mon frère t'as dis, mais c'est sûrement Yuvan qui a influencé son opinion sur ce sujet ! Maintenant va plus loin, je ne veux plus te voir, me gronda-t-elle.

"Ne dis pas ça, ne dis pas ça", mais j'ai rien fais, pensais-je. Après tout, papa m'a toujours conseillé de ne jamais faire comme maman, si c'est pour finir derrière les barreaux avec un sceau de vipères sur la tête, non merci.

Je m'étais installé sur le petit bout de pelouse en face de la maison d'où je pouvais voir toute la prairie. Le nouveau-né me regardait de temps en temps, à chaque fois que je détournais le regard, il me fixait, puis quand je le regardais, il regardait ailleurs. C'était assez amusant de le surveiller finalement mais quand est-ce que papa allait revenir ? Cette sale bête n'a rien de mignon tout de même et aucun autre œuf n'a éclos, c'est que je commence à m'ennuyer moi ! Quelques instants plus tard un CRAC se fit entendre.

- Enfin ! Tata vient voir !

- Arrête de m'interrompre ou tu ne mangeras pas ce midi !

- Mais il y a un œuf qui est en train d'éclore, tu as raté le premier déjà. Je me demande si c'est une femelle cette fois.

L'énorme coquille se craquelait progressivement, une vapeur chaude explosait en colonnes de fumée blanche miniatures au travers des fentes. De l'autre côté de la coque, on pouvait distinguer la petite forme potelée du dragonnet qui donnait de faibles coups de pattes contre la paroi et cracher se qui semblait être des petits jets de feu.

- Il essaye de sortir ! M'exclamais-je.

- De ce que j'ai compris, il y a toujours trop de mâles, ils se battent souvent pour les femelles mais elle périssent les trois quarts du temps dans le combat, m'expliqua-t-elle sans que je pose de questions. Et puis, c'est la même chose que la naissance d'un poussin, mon cœur, juste en plus gros, dit-elle en retirant tout le caractère passionné du moment.

- De toute façon il y a jamais rien qui t'intéresse. J'espère que Le Moche vert-caca tuera pas une jolie dragonne de la prairie.

- Ça tu le sauras si jamais ça arrive.

Elle parlait de ça si froidement que je ne pouvais pas m'empêcher de lui en vouloir. Puis après plusieurs heures de paperasse et certainement de discussion futile, mon père était enfin revenu de chez Yuvan et de son satané fils, je le déteste celui-là ! J'espère qu'il participera et se fera tuer ! Oui ! Mais non ! Parce que ça veut dire qu'il pourra y aller et moi pas ! C'est pas juste !

- Papa ! On a un nouveau dragon ! C'est une femelle et je lui ai même trouvée un nom ! Dilapha !

- Super, super, dit-il sans grande conviction. Si tu lui as trouvé un nom, écris-le, je dois aller chercher un truc pour Yuvan.

Je le regardai les yeux grands écarquillés.

- Je peux vraiment l'appeler comme ça ? C'est vrai ? Il n'a pas de cornes sous le menton mais de grandes ailes, donc une femelle. Tu as vu Papa ? Je suis super doué !

- Oui, oui, tu n'as qu'à me faire une liste des dragons nés, j'irai la déposer plus tard. Ça m'épargnera du travail.

- Aucun problème ! Depuis le temps que j'attends ça ! Marmonnais-je.

Salut :)

On m'a conseillé de publier sur Webnovel donc je suis venue tester !

Les premiers chapitres changeront certainement jusqu'à ce que je termine l'histoire, il y a certaines choses que je veux rajouter mais je ne suis moi-même pas sûre de comment les fixer sans avoir à tout recommencer, donc on verra ça pour plus tard :D

-> Il existera une version anglaise du webnovel d'ici quelques temps quand j'aurais réussi à trouver une traduction qui me plaise :)

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