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Le Retour de la Sainte

La nymphe se figea à ces mots, et pas même un frisson ne la fit trembler. Eiji, intrigué par l'évolution des événements, s'approcha lentement. Lorsqu'il était à portée d'épée de la dryade, il fut capable de lire le flux de son mana en détail. Celui-ci s'emballait rapidement : le mana présent dans les racines convergeait vers le cœur, là où il tourbillonnait à un rythme effréné.

Le corps de celle-ci changea une nouvelle fois, s'affinant de plus en plus pour adopter une stature quasiment humaine. Sur son visage se dessinait deux orbites, au premier abord vides, mais rapidement comblées par de magnifiques iris d'un bleu profond, desquelles quelques larmes perlèrent.

"Je me souviens… Je suis de retour."

Sa voix cristalline avait également changé. Toute aussi légère, le timbre était cependant plus humain. Soudain, un phénomène encore plus étrange se produit : son écorce s'effrita, et tomba par morceau, dévoilant un épiderme presque aussi pâle que les murs qui les surplombaient. Le processus s'accéléra jusqu'à entièrement dévoiler le corps nu d'une jeune femme d'une beauté rarement égalée. Ses cheveux extrêmement longs ruisselaient jusqu'à ses chevilles, tandis que ses yeux céruléens étaient sans doute capables de charmer tout être en ce monde. Son visage affichait un sourire sans demi-mesure, contrasté par les larmes qui continuaient à s'écouler sur ses joues immaculées.

La voyant ainsi, Eiji ôta naturellement son manteau de cuir et s'approcha pour la lui enfiler. Cependant, alors qu'il n'était qu'à mi-chemin, la jeune femme perdit connaissance et s'effondra lentement au sol. D'un geste habile, il se précipita vers elle et la rattrapa avant qu'elle ne heurte le sol. Il la porta dans ses bras, couvrit son corps du manteau et tourna son regard vers son mentor.

"Que lui est-il arrivé ?"

Ce dernier lui sourit en retour.

"Je n'en suis pas vraiment certain, nous en discuterons plus tard. Mais ne t'en fais pas, elle semble aller bien. Elle a juste utilisé trop de mana. Nous devrions partir avant que la situation ne s'emballe. Prend soin d'elle, je vais demander à Irina de vous trouver un lieu où loger pendant que je continue à me renseigner en ville."

Eiji prit délicatement Ophélie dans ses bras, et le suivit, lui qui se dirigeait vers les portes de la ville. Ils passèrent à côté de nombreux soldats, mais aucun d'entre eux n'osa leur dire quoique ce soit. La créature n'était plus hostile, et surtout, tous étaient trop effrayés par la magie de Tahrren pour leur dire quoique ce soit.

Ils passèrent les portes, attendus juste derrière par Irina. Elle remarqua instantanément la femme présente dans les bras du jeune Higashito.

"Qui est-ce ?" demanda-t-elle, un peu ébahie.

Tahrren s'approcha d'elle, passa sa main derrière son épaule et lui murmura à l'oreille :

"Je t'expliquerai cela un peu plus tard, mais c'est quelqu'un d'important, que ce soit pour notre lutte contre les immortels, ou pour Ophélia en tant que nation. Alors tu as intérêt à lui trouver un lieu confortable pour se reposer."

Irina ricana légèrement, cachant son sourire du dos de sa main.

"Je vois, je vois. C'est donc ça. Je vais donc leur trouver un magnifique toit de ce pas !"

Tandis qu'elle s'éloigna de lui et guida Eiji dans la ville, Tahrren ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter, se grattant le dos de son crâne.

"J'espère qu'elle ne se méprend pas."

Finalement, il leur sourit, les voyant s'éloigner dans la rue principale. Bien qu'ils attirassent un peu les regards, il ne s'en fit pas pour eux, après tout, Eiji n'était pas si faible et Irina était avec eux. Enfin il se retourna vers les soldats qui se remettaient encore de la bataille qu'ils venaient de mener. Les quelques corps qui jonchaient le sol étaient délicatement ramassés et posés sur des planches en bois. Des prêtres étaient dépêchés pour accomplir les premiers rites funéraires. Ils couvraient les corps d'un drap blanc, sans distinction de leur grade ou de leurs origines.

N'y ayant plus sa place, Tahrren s'éloigna de la zone et se dirigea plutôt vers le grand temple, en espérant obtenir davantage d'information sur les légendes de la région, notamment celles mentionnant la sainte originelle, Ophélie, car bien qu'il en connût les grandes lignes, il n'était pas non plus un expert dans l'histoire de la région.

Pendant ce temps, Irina amenait Eiji et Ophélie dans leurs nouveaux appartements. En moins d'un quart d'heure, elle sut leur dégoter un lieu où se reposer, à l'abri des regards. Bien qu'il s'agissait d'une seule pièce, on y trouvait deux lits, ainsi qu'une cuisine et suffisamment de meubles pour y rendre la vie confortable.

Eiji s'approcha de l'un des lits pour y déposer Ophélie. Cette dernière ne s'était pas encore réveillée mais présentait toutefois des signes de rétablissement, notamment son visage qui reprenait des couleurs.

Il l'allongea délicatement, la tête sur l'oreiller et retira les quelques cheveux qui couvraient son visage. Il se leva et se dirigea vers Irina qui attendait toujours à la porte.

"Merci, Irina." Il la salua rapidement d'un geste de la tête. "S'il y a quoi que ce soit que je puisse faire pour vous, n'hésitez pas."

Elle sourit légèrement avant de lui répondre.

"Allons, Allons. Tu nous as déjà bien assez aidé, en repoussant les monstres aux portes de la ville ! C'est plutôt à moi de te remercier. Enfin, je dois te laisser maintenant, j'ai à faire. A tous les coups les autres profitent de mon absence pour lambiner !" dit-elle, brandissant son poing.

Avant de partir, elle posa violemment ses mains sur les épaules d'Eiji, ce qui lui fit presque perdre l'équilibre. Irina était après tout une véritable force de la nature !

"Occupe-toi bien d'elle, entendu ? Si par malheur tu venais à la rendre triste, tu aurais affaire à moi !"

Elle s'éloigna ainsi en rigolant bruyamment. Eiji préféra quant à lui ignorer ses derniers mots. Après tout, elle devait se méprendre !

Il prit un panier et lança un dernier coup d'œil derrière lui pour voir si elle était bien installée, avant de sortir et fermer la porte à double tour derrière lui. Il avait quelques achats à faire, il décida donc de se rendre au marché. Après tout, la pauvre n'avait pas de vêtements, et elle aurait certainement faim en se réveillant. Il avait une belle cuisine, mais aucun ingrédient !

Lors de sa première traversée de la ville, il avait remarqué quelques échoppes dans la rue principale et les ruelles adjacentes. Bien que ses traits atypiques attirassent les regards, il ne s'en soucia guerre et continua son chemin. Il visita en premier lieu un couturier.

Bien qu'il s'agît d'achat de vêtements féminins, ce domaine n'était pas étranger à Eiji. Après tout, c'était lui qui s'occupait principalement de sa sœur, et les vêtements faisaient partie de ses achats réguliers.

Malheureusement pour lui, sa bourse n'était cette fois-ci pas très remplie. Ne souhaitant pas non plus acheter de vêtements de premiers prix, il se contenta donc d'une simple robe blanche toutefois élégamment taillée et de sous-vêtements. Il les plia et les rangea au fond de son panier, avant de sortir de la boutique. Sur la route du retour, il acheta quelques ingrédients pour réaliser un plat simple mais nourrissant.

Lorsqu'il pénétra de nouveau dans l'appartement, Ophélie n'avait pas bougé, et Tahrren n'était lui non plus toujours pas rentré. Il déposa les ingrédients sur le plan de travail de la cuisine, et la robe dans l'armoire qui juxtaposait le lit. Passant à côté d'Ophélie et la voyant dormir ainsi, paisiblement, cela ne manqua pas de lui rappeler les années passées à aider sa sœur, bien souvent alitée à cause de sa maladie.

Il retourna ensuite dans la cuisine, et commença à préparer le souper : après tout, le soleil s'apprêtait à se coucher et le ciel se peignait de rouge. Tahrren ne tarderait certainement pas à rentrer et lui-même commençait à avoir faim. Cela faisait si longtemps qu'il ne s'était pas préparé un véritable repas, et il avait réussi à trouver du riz !

Il commença par éplucher les légumes : une partie d'entre eux servira à préparer une soupe, tandis que l'autre accompagnera le poulet qui aura mariné dans une préparation à base de graines et de plantes au goût sucré-salé.

La forte odeur des ingrédients qui cuisaient se répandit dans tout la pièce, jusqu'à caresser les narines de la jeune fille endormie. Celle-ci huma pendant quelques secondes, avant de brusquement se lever. Elle regarda tout autour d'elle, un peu perdue.

"Où suis-je ?"