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Briefing Au Petit Déjeuner

Le matin, les plaines herbeuses enclavant la ville sainte d'Ophélia étaient baignées de la douce et chaude lumière du soleil. Bien plus paisibles que les steppes plus à l'est, leurs routes principales étaient bondées de caravanes marchandes, faisant de la ville un véritable pôle commercial : des marchands de toute la région venaient échanger des biens de tout type. Décorations en or, armes pour aventurier, mobilier de bois ou en métal, ornements et bijouterie, aliments secs et céréales : chacun pouvait y trouver son plaisir.

Cependant, depuis quelques semaines, de nombreuses caravanes reportaient avoir été attaqués par des monstres ou des bêtes. Ce nombre d'agression était croissant, et mêmes les zones les plus calmes de la région n'étaient pas épargnées. Il restait donc deux solutions pour ces marchands : attendre que les attaques cessent, ce qui pouvait bien prendre plusieurs mois selon le nombre de créatures. Sinon, les plus fortunés, faisaient appels aux guildes de mercenaires pour les escorter.

En plein cœur de la ville, dans l'un de ses plus grand et des plus luxueux quartier résidentiel, Eiji, Ophélie et Tahrren discutaient de leurs prochaines actions pour limiter cette prolifération de monstre, et surtout éliminer la source du problème. Car ils le savaient très bien : ce n'était que le commencement.

L'odeur du jambon grillé et du pain tout juste cuit préparé par Eiji se diffusait dans toute la chambre. Le bonheur pouvait se lire dans les yeux d'Ophélia qui dégustait son pain avec une délicieuse confiture de myrtilles, fruits cueillis dans les montagnes plus au nord-ouest, à proximité de Myr-Khandur. Même pour la famille royale, il était rare de trouver des mets aussi succulents à son époque, tandis qu'il s'agit de biens très communs dorénavant.

Eiji afficha un sourire amusé en voyant Ophélie manger : elle mit tellement de confiture sur sa tranche de pain qu'au moins la moitié coula sur la table. Il servit le jambon grillé qu'il venait de préparer à tout le monde. Il s'approcha ensuite de la jeune fille et l'aida à essuyer le surplus de confiture sur la table. Elle le remercia rapidement avant de reprendre sa dégustation.

"Au final, nous ne savons toujours pas pourquoi d'humaine tu es devenue dryade, et de dryade tu as pu redevenir humaine, Ophélie."

Eiji s'assit à côté d'elle et la regarda, comme s'il attendait une réponse. Elle s'arrêta de manger et éclaircit silencieusement sa gorge.

"Pour être honnête, je ne sais pas vraiment non plus. En revanche, pour ma transformation en dryade, je pense que c'est lié au sort que j'ai lancé à l'époque. Tout espoir était perdu, et j'étais prête à sacrifier ma vie pour sauver le royaume. J'ai donc décidé de changer mon existence en mana. Certainement que la forêt s'est imprégnée de celui-ci, et je renaquis de ces traces."

Peu convaincu, le regard d'Eiji bascula vers Tahrren, espérant qu'il puisse affirmer ou infirmer ce qu'Ophélie avançait. Après tout, il ne pouvait pas vraiment juger par lui-même, de par ses faibles connaissances en magie. Tahrren réfléchit quelques secondes avant d'acquiescer.

"La magie n'est pas tout à fait mon domaine de prédilection, mais je pense que cela est possible. Si l'existence même de la personne fut imprimée dans le mana libéré, toutefois. Tout dépend du sort utilisé. En revanche, je ne comprends pas pourquoi entendre son nom lui permit de retrouver forme humaine. Je suis désolé de le dire comme cela, Ophélie, mais il y a une possibilité non négligeable que vous ne soyez plus complètement humaine."

Ophélie ne fut pas vraiment surprise par les propos de Tahrren. Après tout, elle-même était une grande magicienne ! Bien que la recherche et les théories magiques n'étaient, comme Tahrren, pas son point fort, elle était au moins capable d'analyser et de comprendre ce qu'il avançait : si elle put conserver sa mémoire jusque-là, c'est que cette dernière était inscrite dans son flux de mana qui s'était répandu dans la forêt autrefois. Mais rien ne dit que son génome y fut également inscrit, ou que ce corps est encore le même qu'autrefois. Il peut ne s'agir que d'une simple copie.

Voyant la jeune fille mal à l'aise, Eiji décida de changer de sujet tout en affichant un sourire forcé.

"Qu'allons-nous donc faire, à propos du ou des immortels au Jardin des Saints ?" dit-il attrapant une assiette à l'autre bout de la table. Il y déposa sa propre tranche de jambon et se prépara une tranche de pain où il y déposa un peu de beurre.

"Nous ne pouvons pas prendre de décision hâtive. Nos informations sont peu nombreuses, et floues. Je pense que nous devrions partir tous les trois pour le Jardin des Saints, et y mener une enquête."

Eiji tiqua face aux mots de son mentor.

"Ophélie doit-elle réellement se mettre en danger ? Elle vient tout juste de se réveiller !"

Tahrren soupira légèrement, avant de reprendre en affichant un large sourire dessinant un rire presque moqueur.

"Tu t'es fait battre à plate couture face à elle sous sa forme de dryade ! Et crois-le ou non, mais le combat hors de leur forêt n'est pas vraiment le point fort de ces nymphes. N'est-ce pas plutôt toi qui est en danger ?"

Ophélie lui tapota à l'épaule, s'approcha davantage de lui et lui murmura à l'oreille.

"Ne t'inquiète pas. Je te protégerai."

Elle se mit à rire de bon cœur, tandis qu'Eiji rougit légèrement. Il était rare que lui, habitué aux compliments pour sa force, soit mis dans une telle position de faiblesse. Poing serré, il se jura une fois de plus de devenir plus fort.

"Très bien, très bien j'ai compris. Donc, quel genre d'informations recherchons nous ? Avons-nous ne serait-ce qu'une piste ?"

Tahrren sirota un peu son café avant de lui répondre.

"Te rappelles-tu du Père Andréa ? Des prêtres en avaient parlé lorsque nous étions à l'auberge de Kyōniko."

Eiji essaya de se remémorer de son mieux la scène.

"Oui. Ils essayaient d'être discret à ce moment-là. Bien que je n'eusse pas encore l'amulette de traduction, j'en comprit les grandes lignes. Un certain Père Andrea avait disparu au Jardin des Saints. Tu penses que c'est lié ?"

Tahrren acquiesça.

"Certainement. Il se trouve que le Père Andrea enquêtait déjà sur des apparitions de monstres et des faits étranges qui se produisaient dans cette région. Si nous le retrouvons, il pourra peut-être nous en apprendre davantage. D'ailleurs, il s'agit le l'oncle de d'Irina, et d'un nain de Myr-Khandur. Si nous parvenons à le sauver, peut-être les nains nous seront reconnaissant et sauront nous fournir un soutien financier voire matériel pour combattre les immortels… Ce qui en fait un bon bonus pour cette mission !"

Sceptique, Eiji fixa son mentor, cherchant à en savoir davantage. Ce dernier se sentit bien obligé de développer.

"Parmi les cinq grandes races qui foulent le sol d'Aurdalia, toutes ne sont pas actives dans le combat contre les immortels. Les humains, de par leur nombre, représentent le fer de lance de la rébellion. Mais on compte aussi les elfes, reconnus pour notre magie, ainsi que les géants, maitres en architecture. En revanche, les nains et les pharas sont toujours neutres et n'interviennent pas dans cette guerre. Bien que puissants, il sera difficile de faire appel aux pharas, isolés dans leur désert. En revanche les nains, riches, forts de nature et ingénieurs de renoms, seront importants dans notre lutte. Il est primordial pour nous de les rallier à notre cause, mais faute d'arguments financiers, les négociations sont au point mort depuis plusieurs années déjà. Une très grande majorité des nains restent cloitrés leur vie entière dans leur montagne, ils ne se sentent donc pas concernés par ce conflit. Espérons que le Père Andrea saura les convaincre pour nous s'il a des informations intéressantes à fournir."

Après cette petite tirade, Tahrren termina rapidement sa tasse de café et se leva.

"Très bien. Je vous donne cinq minutes pour terminer votre repas et vous préparer. Ensuite nous partons pour le Jardin des Saints. Un refuge se situe à près d'une journée à cheval de la ville. Espérons l'atteindre d'ici la fin de la journée, et nous commencerons nos recherches demain."