Chapitre 7 : Entrainement en condition extrême.

Le lendemain, Armand se repose paisiblement dans un lit douillet dans la maison du maître, il est endormi avec une serviette humide posée sur le front pour le rafraîchir. Pica, le petit oiseau somnole sur le bord de la fenêtre entrouverte de la chambre comme s'il restait prêt d'Armand pour veiller sur lui. Une brise légère s'infiltre par l'ouverture caressant la joue d'Armand accompagnée des rayons de soleil et ses paupières s'entrouvrent lentement. 

Sa vision est trouble mais se stabilise petit à petit, il se redresse tout doucement poussant la couette révélant son torse nu et laissant glisser la serviette sur la couette . Il se touche le front, ressentant une légère fatigue et regarde autour de lui en se demandant combien de temps il a dormi et où est-ce qu'il est précisément jusqu'à ce qu'il remarque le petit oiseau et se remémore ce qui s'était passé avant qu'il perde connaissance.

"J'espérais que tout cela n'était qu'un rêve, mais apparemment c'est bien réel," murmura-t-il pour lui-même. "Heureusement, je me suis réveillé... Mes oreilles me font encore souffrir rien qu'à y penser..."

La porte de la chambre s'entrouvre discrètement et le vieil homme fait son entrée, un plateau en main sur lequel repose un petit gâteau ressemblant à une viennoiserie et un flacon rempli d'une potion verdâtre. Surpris de trouver Armand déjà éveillé, il s'approche et prend place sur une chaise à côté du lit, déposant le plateau sur la table de chevet avec précaution.

"Ah, tu es déjà debout, c'est un soulagement. Prends ceci à manger et bois cela, ça te redonnera des forces rapidement. Tu n'as rien pu avaler hier soir, n'hésite pas à demander plus si tu as faim, j'ai encore quelques provisions," dit Maître Kaka avec un sourire bienveillant.

Armand prend la viennoiserie après l'avoir remercié et la mange doucement pour voir quel goût ça a. Elle lui rappelle étrangement celle d'un chausson aux pommes, et poussé par la faim, il la consomme rapidement sans prendre le temps de la savourer. Après avoir remercié une fois de plus le maître, il se penche sur le flacon qu'il tient désormais entre ses mains, l'examinant sous tout les angles.

"Qu'est-ce que c'est, exactement ?" demanda-t-il, curieux.

"C'est un remède extrêmement efficace, obtenu à partir d'extraits minéraux d'une pierre précieuse trouvée à Primis. Une fois diluée et traitée, elle peut être utilisée comme un revigorant, accélérant le métabolisme et renforçant le corps contre les petites à moyennes maladies ainsi que les blessures. La dose que je t'ai donnée est exactement adaptée à ton état actuel. Prendre une quantité excessive pourrait avoir de graves effets sur ta santé."

Armand retire le bouchon et le pose délicatement sur le plateau. Il avale sa salive avant de boire le contenu avec réticence. Dès qu'il finit, il ressent immédiatement les effets, il ne se sent plus fatigué et son regard retrouve la vivacité qu'il avait perdu. Il se redresse sans peine, sortant du lit, et se tapote légèrement le visage de ses mains.

"On dirait que j'ai ingurgité une cafetière entière, je me sens en forme comme jamais !"

"Haha ! Voilà une bonne nouvelle. Tu as de la chance, on a toute la journée devant nous. Il est à peine dix heures. Habille-toi et rejoins-moi derrière la maison."

Le vieil homme sort de la chambre tandis que Pica, à peine réveillé et qui par chance, n'a pas chanté, suit le maître en volant à travers la chambre. Armand se dirige vers le mur où sa modeste tunique est soutenue par un crochet. Il l'enfile rapidement et quitte la chambre après s'être chausser. En traversant la porte, il pénètre dans un salon au charme rustique, où il s'attarde un instant pour admirer l'arbre majestueux qui traverse le plafond au milieu de la pièce. 

Il entend tout d'un coup, le maître l'appeler dehors et il s'excuse à haute voix avant de sortir de la maison pour le rejoindre. Armand vient de sortir et trouve le maître l'attendant un peu plus loin dans le jardin, sur une parcelle étonnamment plane. L'appréhension d'Armand était palpable face à ce qui allait arriver. Il se dirigea vers le maître, mais ce dernier lui fit signe de s'arrêter à environ cinq mètres de distance, puis croisa les mains dans son dos.

"Comme je te l'ai déjà dit, deux mois, c'est insuffisant pour un entraînement traditionnel. Hier, tu m'as révélé les capacités de ton pouvoir, bien que deux couleurs de ton aura gardent encore leurs mystères. Tu dois donc comprendre que, même si tu sors tout juste d'un léger coma, nous allons poursuivre les entraînements sans relâche."

Armand répondit avec une détermination sans faille, prêt à poursuivre son apprentissage coûte que coûte.

"Bien sûr, maître ! Je comprends parfaitement !"

"Laisse-moi t'enseigner une chose à propos des mages : chacun se spécialise dans un type de magie. Certains restent fidèles aux fondamentaux et à la simplicité de la magie pure. Elle prend une forme semblable à ce que tu as vu hier à travers tes yeux jaunes, mais elle devient visible pour tous une fois utilisée par un mage. D'autres se spécialisent dans un domaine précis, comme un élément, des techniques particulières ou d'autres forces naturelles. Une fois qu'on s'écarte de la magie pure pour se consacrer à une forme spécifique, il devient très difficile d'élargir ses connaissances au-delà de cette spécialité. Je ne connais personne qui ait réussi à se détacher de la sienne. Quant à moi, tu l'auras sans doute remarqué, je me suis consacré à la magie naturelle, en lien avec la terre et les plantes."

Maître Kaka s'accroupit, posant sa main sur la terre tout en parlant. Lorsqu'il termine, il ferme les yeux un instant et libère un flot de magie dans le sol, provoquant une légère secousse qui dure quelques secondes. Puis, il se relève, essuyant sa main sur sa tunique. S'écartant d'Armand, il se retourne vers lui, l'expression plus grave que jamais.

"Retiens bien, mon garçon, que ma méthode d'enseignement favorite est l'entraînement en conditions extrêmes."

Armand avale difficilement sa salive, anticipant le pire après ces mots.

"J'espère que tu te souviens comment alterner entre les couleurs, car je vais évaluer ta capacité à improviser face à un danger imminent."

Armand tente de dissimuler son appréhension, mais ses yeux trahissent son inquiétude.

"Attendez, que voulez-vous dire par... ?"

Les secousses s'intensifient et un monticule de terre émerge des fissures, se modelant peu à peu en une forme humanoïde. En quelques instants, le monticule prend l'apparence d'un golem de terre de près de trois mètres de haut, qui reste immobile. Armand est stupéfait, ses jambes tremblent, mais il serre les poings, se ressaisissant à l'idée qu'il va devoir affronter cette créature.

"Je te fais assez confiance pour savoir ce qui t'attend. L'entraînement se terminera lorsque tu auras vaincu ce golem. Cela pourrait prendre des jours, voire des semaines, mais tu devras improviser et apprendre par toi-même à maîtriser la magie qui t'entoure et à contrer ton adversaire. Sur ce..."

Il s'éloigna ensuite, se dirigeant vers sa maison où il s'installa sur une chaise d'extérieur, après avoir érigé un bouclier protecteur autour de sa propriété. Pica observa la scène depuis son nid dans l'arbre, et le vieil homme leva la main, prêt à claquer des doigts.

"Es-tu prêt, Armand ?"

Armand se mit en garde, ses yeux passant au vert se rappelant que cette aura lui procure une meilleure défense. Le maître interprète son geste comme un acquiescement et d'un claquement de doigts, anime le colosse de terre qui s'éveille et cible aussitôt le jeune homme. Le golem se précipite vers Armand, chaque pas faisant vibrer la terre, et lance un puissant coup de poing. Armand, encore incertain de la protection offerte par son aura verte, esquive de justesse, laissant le golem frapper le sol avec force. 

"Ce vieux fou cherche à me tuer ? Comment suis-je censé gérer ça ?" se demanda Armand, en panique.

Il continue de courir, mais s'arrête brusquement pour faire face à la créature qui s'apprête à attaquer de nouveau. Rassemblant son courage, ses yeux s'embrasent d'une couleur rouge vive et il canalise rapidement de la magie dans son poing avant de frapper. Le choc entre leurs poings est intense, et Armand recule d'un pas, souriant alors que le poing du golem se fissure. Cependant, la terre du bras du golem coule vers sa main pour se régénérer, puis il continue son assaut. 

Armand, pris au dépourvu et sans échappatoire, change la couleur de ses yeux à nouveau au vert et croise ses bras devant lui pour se protéger du coup du golem. Mais le poing l'envoie valdinguer à l'autre bout du terrain, où il s'écrase contre la barrière et il retombe sur le sol proche de là où le maître s'est installé. Bien qu'il n'ait pas subi de graves blessures grâce à son aura, il commence à ressentir de la fatigue. Il jette un regard vers le maître qui semble indifférent, plongé dans un sommeil paisible.

"Je dois vraiment gérer ça seul..."

Le golem patiente, attendant qu'Armand se relève, ce qu'il fait. Armand fonce et esquive désormais avec agilité, ses yeux bleus lui conférant une vitesse accrue, et il réfléchit à une stratégie. Sachant qu'il est plus rapide que lui sous cette aura, il envisage d'attaquer le golem en alternant entre les auras rouge et bleue, l'affaiblissant progressivement sans lui laisser l'occasion de riposter. Armand s'arrête alors et attend que le golem se rapproche suffisamment de lui alors que chacun de ses pas émettent une secousse de plus en plus importante.

 Une fois qu'il était assez proche, Armand cours dans sa direction à grande vitesse et le contourne pour venir derrière lui avant qu'il puisse se retourner et comme il avait prévu dans son plan, il passe en rouge et assène un coup moins puissant que tout à l'heure derrière le golem dû au manque de temps pour se préparer mais, suffisamment pour déséquilibrer le golem. Il continue ensuite de tourner autour de lui, le frappant sans relâche. 

Finalement, le golem fléchit un genou, mais malgré ça, il prépare un nouveau coup qu'il lance devant lui en ayant anticiper la position qu'aurait Armand grâce à sa vitesse. Il esquive de justesse et s'éloigne, haletant sous l'effort de sa tactique et très frustré du peu de dommages qu'il lui a fait.

"Bordel, je l'ai à peine fait fléchir et il ne cesse de se régénérer. Je n'ai pas le temps de préparer une attaque suffisamment puissante... Je dois tout de même profiter de cette position avant qu'il ne se relève."

Armand reprend son souffle et se précipite de nouveau vers le golem, visant cette fois-ci son visage. Mais le géant de terre frappe violemment le sol, prenant Armand par surprise. La secousse de l'impact le déséquilibre en plein élan. Des fissures se forment autour de lui, d'où jaillit un poing de terre. Pris au dépourvu, Armand reçoit un coup direct dans l'abdomen, crachant de la salive sous la force de l'impact et s'envolant légèrement dans les airs avant de retomber. Le golem s'immobilise, attendant qu'Armand soit prêt à reprendre le combat. 

Au sol, Armand halète, se tenant le ventre de douleur, n'ayant pas réussi à se protéger, il subit tout les dégâts du coup. Cependant, il sait qu'il doit continuer et se relève lentement. Il se sent légèrement mieux mais sa fatigue commence à davantage se ressentir. Il se remet en position, son aura toujours bleutée, et signale au golem qu'il est prêt. La créature se redresse et charge vers Armand, qui fonce également pour reprendre l'affrontement.

Les heures défilent et trois heures se sont écoulées depuis le début du combat d'Armand contre le golem. Le maître ouvre les yeux, sortant de sa sieste, et observe l'état de l'entraînement. Le jardin est méconnaissable, totalement ravagé, et le golem se tient toujours là, immobile et intact, tandis qu'Armand gît au sol, ses vêtements en piteux état et son corps couvert d'égratignures.

Le maître claque des doigts cette fois-ci pour transformer le golem en un simple amas de terre comme à l'origine. Il s'avance ensuite vers Armand en enlevant sa barrière et il vient lui relever légèrement sa tête. Il pousse un souffle de soulagement voyant qu'il est toujours conscient.

"Je dois admettre que tu t'es bien battu pour une première journée petit," s'étonne le maître. 

" Vous plaisantez ?.. Vous n'avez fait que dormir, comment auriez-vous pu voir quoi que ce soit ?"

"Je ne dormais pas vraiment, je contrôlais ce golem de là où j'étais. C'était donc comme si c'était moi que tu affrontais. Crois-tu vraiment que je puisse créer une créature de terre et l'animer ? Ma magie ne le permet pas en tout cas," lui explique-t-il.

Le maître soutient Armand avec précaution, l'accompagnant jusqu'à sa demeure en lui passant un bras autour des épaules pour l'assister dans sa marche. Il l'assoit ensuite sur la chaise du jardin et lui tend de nouveau une fiole entrouverte, contenant juste trois gouttes du remède. Armand la boit et ressent peu à peu son corps se régénérer, la fatigue s'évanouissant comme par magie.

"C'est dingue ce truc, une si petite dose pour un tel effet."

Son ventre commence à gargouiller terriblement et le maître esquisse un sourire amusé et l'invite à le suivre dans la maison.

"Tu as bien mérité un repas, Mais n'oublie pas, dès que nous aurons terminé, tu retourneras affronter le golem. Et ce, jusqu'à ce que tu le vaincras."

"Compris..., " répond Armand un peu abattu. 

Il l'accompagne alors dans la maison pour l'aider à préparer à manger et c'est donc ainsi que l'entraînement d'Armand débute réellement.

Fin du chapitre 7.