« Ça fait même pas un jour et je dois déjà aller à l'école ? » se plaint sur le chemin une fille aux cheveux rouges à sa mère. Elles s'éloignaient toutes deux du centre de la ville vers un coin plus haut où l'on pouvait voir se dessiner la cime d'une petite église.
— Je te l'ai déjà dit Marlène. Ce n'est que des formalités aujourd'hui, le plus tôt fait, le plus tôt débarrassés ! Tu vas voir, ça va être bien. Tu vas te faire des amis, parfaire tes connaissances et le mieux, c'est l'option la moins chère…
— Pourtant, je pense que j'ai plus grand-chose à apprendre, non ? Je sais lire, je sais compter et je connais même quelques sorts !
— Allons voyons, ça aide toujours. Au pire si tu te débrouilles très bien, tu n'y resteras pas longtemps. Tu vas te faire de nouveaux amis, tu vas voir.
— De nouveaux amis ? De nouveaux amis… Je ne sais pas maman, depuis ce qui est arriver au village, j'ai un peu du mal avec les gens de mon age.
— Marlène…
Leyla attrapa la main de sa fille pour la rassurer et elles se dirigèrent ainsi vers cette église. C'était un bâtiment religieux assez piètre et pieux. On pouvait sentir son vécut et comparé à celle de Mitra, elle était faite d'un vieux bois. Un bois qui avait fait son temps et donnait à la bâtisse l'air de tomber en morceaux.
— Tu es sûr que c'est pas abandonné ? demanda Marlène.
— Normalement non…
C'est alors qu'elles virent des enfants apparaître de derrière la bâtisse. Ils étaient poursuivis par une jeune nonne. On aurait dit que l'un d'entre eux tenait un drôle de bouclier surmonté d'une croix inversée. Cela devait être un objet volé. Les deux arrivèrent enfin juste devant cette église entourée d'un terrain d'herbe. Elles purent entendre la femme leur intimer tout en courant après les enfants :
— Je suis désolée, je suis à vous dans deux petites minutes !
Et la bande de coureur se mit, une fois de plus, à faire le tour de l'église. Leyla écarquilla des yeux et dit :
— Je crois que deux minutes ne sera pas assez. Je commence à douter de l'endroit…
— Orh ! T'inquiète pas, j'ai une idée, on va bien rigoler.
Marlène fit apparaître de l'eau au niveau de ses mains et en déposa une grande quantité devant l'établissement. Toutefois, Leyla lui tira l'oreille et la gronda :
— Mademoiselle ! Je t'excuse cette fois-ci mais ne recommence plus d'accords ?
— Aille, aille, compris ! Mais attends au moins de les voir glisser pour me punir…
C'est alors qu'elles les virent revenir. Il y avait en tout six enfants, tous des garçons dont l'âge semblait proche de celui de Marlène. Arriver devant elles, ils glissèrent tous sans faire attention dans la flaque, trop occupé à échapper à la jeune nonne. Ils y tombèrent et en furent recouvert de boue ce qui fit rire notre Marlène. Or, elle n'avait pas prévu que la nonne aussi s'y prenne les pieds et tombe dans la flaque. L'instant d'après, voyant sa mère se couvrir les yeux, elle commença à regretter son geste. Il y eu des plaintes des garçons qui se retrouvèrent tout sal. Toutefois, la nonne profita de cet instant pour attraper le bouclier dans ses mains en grondant :
— Enfin ! Bande de garnement, je vous ai déjà dit que notre insigne n'est pas un jeu ! Ce n'est pas un vrai bouclier mais le symbole de Lumis. Ayez un peu plus de respect ou vous finirez par vous faire châtiez par Stella dans les enfers ou encore pire, dans les abysses !
— C'est compris sœur Jeanne… chouina l'un d'entre eux.
— Non les gars ! S'offusqua un autre. C'est pas « compris » putain. On le sait bien comme les autres qu'on nous raconte que des conneries ici. Sinon pourquoi l'église de Mitra de la ville aurait plus de sous ?
— Huh, souffla d'exaspération Jeanne. Eliotte, tu peux croire ce que tu veux, je ne t'en empêche pas mais garde au moins ta politesse. Allez filez-vous changer !
Les autres garçons étudiaient les deux nouvelles venus mais furent coupé par la sœur Jeanne qui les chassa d'un signe de main. Elle regarda un instant sa robe religieuse noire qui était couverte de boue et fit une grimace. C'est ensuite qu'elle remarqua la femme qui se tenait devant elle. Incliné , Leyla s'excusa :
— Je suis désolé que ma fille vous ait causé des problèmes, cela n'arrivera plus…
Jeanne jeta un coup d'œil à la fillette qui se grattait la joue avec un sentiment de culpabilité. Elle n'osait pas la regarder dans les yeux. Cependant, Marlène fut surprise quand elle ne se mit pas en colère et répondit toute souriante :
— Mais qu'avons-nous là ? C'est toi qui as créé cette flaque ? Aurait-on une nouvelle futur mage d'eau à l'école ?
— Eh ? pouffa Marlène. Je veux pas être une mage moi, je veux devenir aventurière !
— Tu as encore le temps pour décider Marlène, enchérit sa mère. Et bien le bonjour ma Soeur, c'est un honneur de vous rencontrer. Je venais avec ma fille dans le but de l'inscrire dans votre école.
— Veuillez m'excuser ! s'empressa Jeanne. Je ne me suis même pas présentée et n'ai même pas commencé les formalités. Je suis Soeur Jeanne, l'une des quatre sœurs qui s'occupent de notre piètre petite église d'Elmoth. C'est pour une inscription ? Vous ne savez pas au combien cela me fait plaisir ! La plupart des enfants qui sont ici sont des orphelins que l'on recueil… Tu es notre cinquième avec des parents !
— UmU, comprit Marlène. Je vois le problème, c'est donc pour ça qu'ils sont si agités que ça…
— J'essaye quand même de rendre leur quotidien amusant, c'est le moins que je puisse faire. Vous voulez peut-être me suivre à l'intérieur ? Je vais vous faire faire le tour pendant que l'on discute.
Elle les dirigea donc à l'intérieur. Il y avait une salle assez grande destinée à la prière et Jeanne en profita pour y reposer l'insigne de l'église. Elle l'installa en haut d'un mur au dessus duquel se trouvait un grand vitrail à l'image de la déesse. Elle y était représentée comme une femme toute blanche possédant des ailes d'anges. La lumière qui la traversait rendait coloré la salle et émerveilla ainsi notre jeune Marlène, bien qu'elle pût y apercevoir un trou. Elle les guida aussi vers une petite salle de classe vide où était disposés des tables en rangées. Or, leur état laissait à désirer, cela se voyait qu'ils devaient manquer de fond pour tout entretenir. Il y avait aussi un dortoir pour les orphelins, il n'était pas trop grand mais comportait assez de lit superposés pour accueillir une trentaine d'enfant. C'est en arpentant ce bâtiment que Marlène vint avec une question :
— Mais ils sont tous où les autres enfants alors ?
— Ah ça ! La matinée est plutôt destinée aux activités physiques. Soeur Corelia est en train de surveiller ceux qui jouent dans la cour de derrière. Soeur Orelia, elle, s'occupe des jardins et y fait participer ceux qui sont intéressés tandis que la dernière et la plus vieille, Soeur Mésandre, s'occupe de l'administratif et des plannings. Pour ma part, je gère comme vous les gens qui viennent ou bien l'entretiens.
— Vous arrivez à tout ça à vous quatre ?! s'étonna Leyla. Et dire que j'ai du mal seulement avec une famille de trois, je n'imagine pas votre situation…
— C'est pour ça, nous éduquons les enfants en les obligeants à nous aider dans les taches de tous les jours. C'est assez formateur mais les orphelins comprennent vite grâce à ça que l'entraide entre eux est nécessaire pour survivre. Nous leur inculquons ainsi par la même occasion les valeurs de Lumis, seconde prêtresse de Stella, et ce, de façon active.
Elles arrivèrent toutes trois dans une salle à l'étage, c'était un bureau et une vielle nonne s'y trouvait, elle remplissait des papiers. Elle les invita gaiement à entrer et ils commencèrent les formalités. Vint enfin un moment important de la procédure. Jeanne sortit du dessous du bureau un cristal blanc incrusté dans un petit pieds de support en bois. Elle intima à Marlène en le posant sur le bureau devant elle :
— Bien, il est temps de voir quels sont tes affinités. Tu as déjà utilisé un sort d'eau si je ne me trompe ? Alors le cristal brillera normalement d'une couleur bleue. Il faut que tu y transmettes ton mana comme quand tu créé un sort…
Ah… D'après grand-frère et nos tests, je réussissais le mieux avec la terre et la lumière. Toutefois, au fil du temps, j'ai réussi à créer de l'eau ou du feu… Bon, on verra bien ce que me dit la bouboule !
Elle s'exécuta ainsi et… Ce fut le silence, cette lumière qui s'en dégageait, elle était, elle était !
— Arc-en-ciel ?!!! s'écria Jeanne en s'effondrant de surprise sur son derrière.
La vielle nonne, Mésandre écarquilla des yeux avec un sourire mais ce fut à Leyla de demander en première :
— Qu'y a-t-il, c'est mal ? Je n'ai jamais passé de tel tests, petite. Qu'est-ce que cela veut dire pour ma fille ?
— Rien de trop grave madame Wallheart, répondit Mésandre souriante. Seulement que votre fille possède une affinité à toutes les catégories de magie. C'est très rare voyez-vous, très rare. Les seules femmes du Royaume dans la même situation sont toutes rentrées dans l'ordre des Valkyries…
— Dans l'ordre des Valkyries ? s'étonna Marlène.
Elle se tint alors le menton en y réfléchissant :
C'est pas les femmes dont parlait grande-sœur ? Celle qui était là aussi à côté de la Reine quand elle a…
— Ah bah non ! Je veux pas être une Valkyrie moi, je veux être aventurière !
— Ho, je vois, répondit Mésandre. Tiens, que dirais tu de passer une journée avec les autres enfants ? En attendant, je terminerais les formalités avec ta maman et tu pourras découvrir notre école.
— Eh… Hmmm, pourquoi pas…
Aller Marlène, tu peux surmonter ça ! Tu as été en contact qu'avec des adultes en ce moment, il est temps de se faire de nouveaux amis.
Jeanne l'accompagna alors jusque dans la cour où elle put faire connaissance avec les autres enfants. Elle découvrit dans la cour arrière le même groupe de garçon que tout à l'heure. Ils étaient en train de jouer avec deux autres pendant que trois filles discutaient ensemble sur le côté. Elle put aussi voir sous un arbre une fillette aux cheveux noirs et aux attribues animal tel qu'une fine queue noire et des oreilles de chat. C'est alors que Jeanne lui intima :
— Et voilà ! Tu veux que je te fasse la présentation des filles pour commencer ? Je suis sûr que vous vous entendrez très bien…
— Merci mais non merci ! Je sais déjà qui je vais aller voir en premier.
— Ah bon ? C'est vrai que tu as l'air de nature très sociable, je te laisse te débrouiller alors.
Soeur Jeanne repartit ainsi dans l'église la laissant seule. Marlène se dirigea au niveau de l'arbre où se trouvait la fille aux oreilles de chats. Sa présence attira bien sûr les regards des autres enfants mais elle n'en avait que faire. Ce qui l'intéressait, c'était cette fille qui restait seule sous l'arbre. Toutefois, la jeune thérianthrope ne la vit pas arriver. La petite fixait le sol comme perdue d'un regard vide. C'est alors que Marlène l'interpella :
— Eh salut toi ! Ça va ? Pourquoi tu es toute seule ?
Elle n'eut pas une réponse mais décrocha tout de même le regard de la fillette. Cela lui permit d'apercevoir sur le cou de la petite thérianthrope une cicatrice… Elle se secoua toutefois la tête pour s'asseoir ensuite à côté d'elle et continuer :
— Moi c'est Marlène ! Je suis nouvelle ici… Et toi ?
Cette fois-ci, les yeux de la jeune fille reprirent un semblant de vie. Se serrant les genoux, elle lui répondit faiblement :
— Ma-Marlène ? Je… Roxane…
— Roxane ? Enchantée ! Tout va bien ? Tu as peur de quelque chose ?
Elle vit bien la queue de la thérianthrope s'enroulait autour du buste de Roxane. Elle avait l'air… stressée ? Non, peut-être pas... intimidée plutôt ? Toutefois, elle eut sa réponse sans le lui demander. La fillette lui montra sa cicatrice au cou et lui intima :
— Problème… Voix …Et pas connaître… Bien, Eurasien…
C'est vrai que maintenant qu'elle l'entendit un peu plus, elle le remarqua. La voix de Roxane était cassée et elle voyait bien que la seule manière pour elle d'émettre un son était de forcer énormément. Marlène se gratta la tête de gêne et lui répondit :
— C'est vraiment dommage ça, votre peuple a de si belle voix d'habitude… Et si j'essayais la magie ?! Ah non, je ne crois pas que cela fonctionne sur d'ancienne blessure...
— Magie… toi connaître… ? Mage ? Impressionnan ...
— Oh que non, réfuta Marlène. Je ne suis pas une mage mais une apprentie aventurière !
— Aventurière ? …Toi, visiter - endroit ?
— Oh oui ! J'ai visité plein d'endroit avec mon grand-frère et ma grande sœur. Ce sont eux qui m'ont appris la magie.
— Tu as… Vu autre part que… ville ?
Roxanne eut l'air de s'intéresser aux histoires de Marlène et surtout en ce qui concerne l'extérieur. C'est donc ainsi que Marlène affirma :
— Oui, j'ai vu des golems de fers, combattus des monstres et ais vu des paysages à couper le souffle !
— L'extérieur… Je n'ai …jamais vu. Tu crois que si… moi aussi, aventurière, alors… Voir extérieur ?
— Elle en fait une belle d'aventurière à deux sous ! ricana soudainement un garçon.
Marlène se retourna donc en entendant la voix venir de derrière elles et elles se retrouvaient né à né avec eux. Ils étaient six en tout et à l'avant d'eux se trouvait cet Eliotte. Un fin garçon de grande taille, aux cheveux bruns très court. C'était celui de tout à l'heure, celui qui avait volé le symbole… Elle pouvait le sentir, elle n'allait pas l'aimer.
— Tu parles beaucoup trop pour une personne qui s'est fait avoir par un piège aussi bête qu'une flaque d'eau !
— Que- ?! C'était toi ?! grogna Eliotte.
— C'est à cause d'elle qu'on a dû se changer ! ronchonna un autre.
— Donnons-lui une bonne leçon ! dit un autre. Je savais bien que ce n'était pas naturelle …
Face à ces provocations, Marlène se leva pour leur faire face. Elle leva la tête pour regarder Eliotte qui faisait une tête et demie de plus d'elle puis souffla :
— Vous les garçons, toujours à vouloir recourir à la violence en premier… Bon, ça ne me dérange pas si vous voulez. Vous ne me faites pas peur !
Un des garçons s'avança d'un pas mais fut directement retenu par Eliotte qui clama :
— Je reconnais ton talent et courage, petite ! Dis, tu ne veux pas traîner avec nous ? On pourrait te montrer l'endroit et ce sera toujours mieux que d'être avec cette trisomique de chatte de gouttière.
…
….
....
Marlène explosa, elle pouvait supporter les insultes sur elle, oui, mais celle-là ! CELLE-LÀ !! Bien qu'il fût imposant, elle attrapa subitement Eliotte par le col et lui mit une droite ! Il en fut si surprit et déstabilisé qu'il en tomba au sol. Les autres en furent tout aussi ébahis qu'ils furent figés devant ce spectacle. Marlène, elle, beugla après ce coup :
— Ça ,c'est pour avoir insulté mon amie sans raison ! J'ai horreur d'un tels comportements…
— A...mie ? s'étonna Roxanne en se relevant, perdue.
— Oui, amie ! Tu ne veux pas ?
Les yeux de Roxanne reprirent définitivement vie. Elle hocha de la tête en se plaçant derrière Marlène quand elle sentit le regard des garçons se poser sur elle. C'est alors qu'Eliotte se releva en se frottant la joue, il eut un regard noir sur notre Marlène. Il cracha au sol et grogna :
— Un vrai cinglé pour vouloir être amie avec un tel monstre. T'as pas vu qu'elle n'est pas humaine ?!
— Et ? C'est une personne comme une autre ! Si tu penses comme ça, tu vaux moins bien qu'elle. C'est plutôt vous les monstres de mon point de vue.
— Toi, sale petite peste ! Je vais te donner une bonne leçon tu vas voir, ça va t'apprendre ta place avec tes grands airs.
C'est alors qu'Eliotte se jeta sur elle. S'en suivit une bagarre féroce avec des échange de coup. Mais que faisais Soeur Corelia qui était sensée les surveiller ? La nonne s'était endormit sur son banc… Roxanne, voyant la nouvelle arrivante se battre pour elle se mit alors à courir en direction de la dormeuse. De leur côté, les autres garçons ne firent que regarder. Ce n'était qu'une fillette, ils n'avaient pas besoin d'aider Eliotte surtout que ce serait humiliant pour lui de… perdre ? Il était en train de perdre ?!!! Marlène avait l'ascendant sur le jeune garçon bien qu'il était plus âgé et grand. Ses coups étaient plus précis, plus vif et doué de sens. Elle recopiait la technique d'auto-défense que lui avait Adamantine mais aussi les mouvements de Mylon. Elle l'avait bien étudié surtout lorsqu'il avait défendu Emilie des voyous. C'est au bout d'un dernier coup qu'elle vint à bout d'Eliotte qui s'effondra inconscient au sol. Cela décrocha la mâchoire des autres garçons qui ne surent que faire…
Toutefois, ils purent entendre une voix gronder :
— Marlène Wallheart !!! Petite chipie, cela fait un jour, un seul jour et tu te bats déjà avec des jeunes de ton âge ? C'est donc comme ça que tu te sers de ce qu'on t'a appris ?!
Elle se retourna donc puis les remarqua : devant elle, accompagnée de sœur Jeanne tout essoufflée, se trouvait…
— Grande-sœur ? Grand-frère ?! Vous faites quoi là ?