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Irina

Six jours s'écoulèrent avant qu'Eiji et Tahrren ne puissent rejoindre la ville sainte, Ophélia, et faire enfin face à ses impénétrables murs ivoirins qui s'élevaient, reflétant les rayons d'un soleil encore à son zénith.

"Impressionnant, n'est-ce pas ?"

Eiji voyait pour la première fois de ses propres yeux cette légendaire muraille. Il resta figé quelques instants à la vue de cette merveille architecturale.

Tandis que les chevaux avançaient au pas en direction de la cité, Tahrren sortit un collier de sa besace. Simplement ornementé d'un petit miroir, l'objet paraissait classique, mais Eiji reconnut du premier coup d'œil sa particularité grâce à la rune présente au dos de l'accessoire.

"Un collier de traduction."

Les sourcils de Tahrren se levèrent de surprise.

"Ainsi donc, tu connais."

Eiji sourit légèrement. La remarque de Tahrren blessa un peu son cœur d'Higashito.

"Même si nous sommes étrangers à la magie, nous utilisons tout de même de nombreux artéfacts, particulièrement de communication. Nous utilisons souvent les colliers de traduction pour le commerce maritime."

Il attrapa le collier et l'enfila. Rapidement, ils arrivèrent à la grande porte. Haute comme cinq hommes et large comme quatre, ses imposants battants immaculés étaient constamment gardés par de nombreux hommes.

La file d'attente face à celle-ci était à l'image du reste de la ville : considérable. Cependant, Tahrren doubla la file, ce qui provoqua une vive indignation parmi les individus la composant. Rapidement, un des gardes vint à la rencontre des deux hommes, alors que des sueurs froides perlaient du front d'Eiji.

"Halte ! Entrez dans le rang !"

Tahrren descendit de son cheval, et s'approcha du jeune chevalier qui posait la main sur le manche de son épée.

"Reculez, ou je dégaine ma lame."

Tahrren ralenti le pas et sorti lentement un emblème de l'une des poches de sa tunique. Il le présenta au garde.

"Regardez. Cela devrait faire l'affaire."

Le visage du chevalier blêmit.

"Le sceau de Sa Sainteté ?"

Il libéra le manche de son épée, et s'agenouilla face à Eiji.

"Veuillez me pardonner, monseigneur."

Gêné, Tahrren lui fit signe de se relever.

"Pas d'inquiétude, nous souhaitons simplement entrer dans la ville, mon apprenti et moi."

"Je vous en prie. Laissez-nous donc vos chevaux. Nous Nous en occuperons. Vous pourrez les récupérer à l'étable principale, près de la sortie est de la ville." Dit-il en lui faisant signe de circuler.

A la vue d'Eiji, le jeune garde ravala sa salive. Tandis que les deux hommes traversaient la porte, tous les gardes presque sans exception fixaient le jeune Higashito. Bien qu'Eiji sut se montrer pacifiste, il est toujours difficile d'éteindre les flammes d'une haine qui a traversé les générations.

Heureusement, aucun d'entre eux ne semblait avoir l'envie de lui faire du tort. Après tout, les saints d'Ophélia accueillaient tout le monde.

"Qu'as-tu utilisé pour qu'ils nous laissent si simplement passer ?"

Tahrren répondit à l'interrogation de son apprenti en lui présentant le sceau.

"C'est le sceau des Saints. Il ne peut être décerné que par sa Sainteté, autrement dit la personne qui règne sur Ophélia et ses territoires. Bien que nous agissions dans l'ombre, nous avons tout de même quelques relations avec les plus grandes instances politiques d'Aurdalia."

"Ne pouvions-nous pas utiliser ce sceau pour passer par le Jardin des Saints ?" demanda Eiji, suspicieux.

"Impossible. Les routes sont possédées et entretenues par la guilde des marchands de la région. Bien que le sceau ait un puissant pouvoir diplomatique et politique, il n'a aucun pouvoir envers la guilde des marchands. Il nous faut un passeport de leur fabrication. Mais pas d'inquiétude, notre contact saura nous en fournir un."

Ils continuaient à traverser le hall sous les murs de la cité. A sa sortie, Eiji fut surpris par la splendeur de la ville. Tous les bâtiments sans exception étaient fabriqués du même matériau blanc. Il n'eut que peu de temps pour admirer la ville, Tahrren ne ralentissant guère son pas. Bien que le jeune épéiste fût complètement perdu, l'elfe semblait quant à lui savoir exactement où ils devaient aller. Alors il le suivit et tout en contemplant les environs.

"Cette ville est fantastique. C'est si différent des nôtres. Où trouverons-nous donc le contact ?"

Tahrren sourit, voyant son apprenti ainsi. C'est comme si toute sa rancœur avait disparu. Cette ville avait cet effet sur les gens. Il était convaincu que si les peuples apprenaient à mieux se connaître, de nombreux conflits pouvaient être évités. Eiji, en ce moment, en était la preuve.

"Elle est à la tête d'une marbrerie dans les quartiers sud. On devrait la trouver facilement."

Les deux hommes avançaient en direction des quartiers sud.

"Cette roche est donc du marbre ?" demanda Eiji.

"En effet. Les routes menant à Myr-Khandur et Randurin sont jonchées d'impressionnantes carrières de marbre. Ils sont transportés par caravane jusqu'Ophélia où ils sont travaillés. On y fait le marbre le plus blanc de tout Aurdalia !"

Les ophéliens étaient les seuls au monde capable de travailler ainsi le marbre. Par un processus de fabrication qu'ils gardaient jalousement, ils étaient capables de retirer les impuretés du marbre en surface, obtenant ainsi un blanc immaculé. Polis et sculpté, il devient entre les mains des meilleurs artisans une roche calcique très solide.

Ils marchèrent encore pendant quelques minutes le long d'une artère principale de la ville, avant d'arriver à proximité de vastes terrains.

"Qu'est-ce que vous foutez, bande de fainéants ! Vous croyez que ces marbres vont se poncer tous seuls ! Aller ! Au boulot !"

Au loin, ils purent apercevoir une femme d'une trentaine d'années à la carrure impressionnante : mesurant à vue de nez au moins deux mètres et possédant des bras aussi épais que les deux cuisses d'Eiji réunies, elle réprimandait deux hommes à la stature beaucoup plus délicate. Tahrren ne put s'empêcher de laisser s'échapper un petit rire.

"La voilà ! Elle n'a pas changé…"

Il s'avança vers elle, qui remarqua rapidement la présence des deux hommes.

"Qu'est-ce qu'un crétin de barbare fabrique sur mon territoire ! Dégage si tu veux pas finir comme ces marbres !" dit-elle, passant à côté de Tahrren sans même le remarquer, et menaçant Eiji de son poing.

"Allons, allons. Calmons-nous s'il te plaît, Irina. Ne menace pas mon apprenti."

Elle se tourna cette fois-ci vers Tahrren, ce dernier l'ayant arrêté de la main.

"Tahrren ! Enfin ! Ça fait bien trois jours que je t'attends ! Où diable étais-tu passé ?"

Tahrren soupira légèrement avant de reprendre.

"Désolé, j'ai été pas mal occupé ces derniers temps. C'était un peu tendu à Ninakami."

"J'imagine que c'est là que tu as trouvé le gamin. Ton nouveau protégé ?"

"En effet. Je te présente Eiji Kawasaki. Je l'amènerai au quartier général une fois que j'aurai retrouvé Amalia."

Eiji interpela son mentor.

"Amalia ?"

"Mon binôme. Je te la présenterai plus tard. Mais plus important." Tahrren marqua un temps de pause. "Irina, je pense qu'il y a un ou plusieurs immortels au Jardin des Saints."