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Affrontement au Clair de Lune

Eiji ne se lamenta pas davantage. Il se leva et prit son sabre qui était rangé dans son fourreau dans un coin de la chambre. Il s'approcha de la fenêtre et l'ouvrit.

Bien qu'il fût au premier étage, sauter d'une telle hauteur était simple pour lui. Il n'hésita donc pas et s'élança, effectuant une roulade à l'arrivée, atténuant sa chute. Sa chambre était face au jardin, personne ne le remarqua donc.

Et c'est bien ce qu'il cherchait actuellement : de la discrétion. Il ne voulait pas être dérangé par quiconque, et certainement pas Ophélie ou Tahrren.

Il attacha ensuite son sabre à la ceinture, et se dirigea en direction de la sortie sud-ouest. Habituellement, les extérieurs de la ville n'étaient pas protégés par des gardes.

Mais ces dernières semaines, avec les attaques à répétition, la Ville Sainte ordonna à quelques chevaliers d'assurer la sécurité en ville. Après tout, sans Hortux, c'est tout le royaume qui serait en danger de famine.

Ils avaient pour ordre de ne laisser entrer ni sortir quiconque la nuit, afin d'éviter tout drame. Si Eiji voulait sortir de la ville, il n'avait d'autre choix que de les esquiver.

La ville n'étant pas entourée de murs, il était facile pour Eiji de se faufiler hors de la ville sans se faire remarquer. Même si les gardes étaient nombreux, trois rien que pour la sortie sud-ouest, et plusieurs d'entre eux effectuant des rondes qui venaient s'ajouter à ce compte, il était difficile pour eux d'être constamment à l'affut sur un terrain aussi vaste.

Eiji se faufila sur un terrain riche en végétation, et attendit le bon moment. Ce qui ne tarda pas à arriver, car après seulement quelques dizaines de secondes, les gardes effectuant leur ronde lui tournèrent le dos et s'éloignèrent.

Il saisit l'opportunité et s'enfonça rapidement dans la forêt. Il parcourut plusieurs centaines de mètres au travers de la dense végétation.

Contrairement à la partie nord de la ville, qui accueillait de nombreux champs, la région sud était boisée, laissée intouchée pendant des siècles, surtout dans ses régions les plus profondes. Ce choix fut réalisé par respect pour la Sainte Ophélie, afin d'honorer son sacrifice.

Il était donc difficile pour Eiji de trouver ce qu'il cherchait : un endroit calme avec suffisamment d'espace. Après avoir parcouru plusieurs centaines de mètres supplémentaires, il arriva enfin dans une petite clairière, avec en son centre un chêne des plus majestueux, haut de plusieurs dizaines de mètres et au tronc large comme dix hommes.

Eiji s'approcha de l'arbre et toucha son écorce. Il se sentit comme revivre, comme si celui-ci cherchait à le réconforter en lui transmettant son énergie.

Il posa son sabre au pied du chêne, puis s'avança au milieu de la clairière. Là, il s'assit, et commença à méditer. Ce soir, il était bien décidé à maîtriser la magie, quitte à devoir y passer une nuit blanche.

Après avoir médité pendant une petite demi-heure afin de se calmer, il se le va et ferma les yeux. Il se concentra longuement sur sa main, y rassemblant son mana. Enfin, il visualisa une petite flamme, à mi-chemin entre la boule de feu et la braise.

Après avoir fait circuler son mana pendant quelques minutes, il le libéra enfin, puis ouvrit les yeux. Là, face à lui, au creux de sa main, dansait une petite flamme. Très petite, certes, mais elle était bien présente.

Eiji, bien qu'heureux d'avoir enfin pu utiliser la magie, ne pouvait toutefois s'empêcher d'être un peu déçu. Qu'allait-il donc faire une si petite flamme en plein combat ? Il ne pouvait même pas la lancer, ou autre ! Elle restait stoïque quoique dansante au creux de sa main. Ce n'était que de la perte de mana !

Il se rassit le sourire aux lèvres et continua à méditer. Bien que déçu, il n'avait pas à s'éterniser sur cela. Son objectif principal était atteint : il avait enfin utilisé la magie ! Il ne tenait qu'à lui désormais de s'entraîner durement pour la maîtriser.

Mais alors que la lune était haute dans le ciel, et que voilà maintenant plus d'une heure qu'il méditait au sol, il s'arrêta brusquement, entendant le feuillage bouger anormalement autour de lui. Il scruta les alentours, essayant d'apercevoir quelque chose dans la pénombre, en vain.

Hésitant, il se dirigea doucement vers son sabre, encore posé au pied de l'arbre, à quelques pas de l'emplacement où il méditait. Un œil sur son sabre et un œil au alentours, il se déplaça pas à pas, ne sachant pas encore si menace il y avait ou non.

Bien que les animaux étaient nombreux dans ces bois, la plupart étaient petits et craintifs, et aucun d'entre eux ne pouvaient bouger autant de feuilles rien qu'en se mouvant. Il craignait donc une attaque de loups d'argent, qui rôdaient dans ces bois depuis quelques semaines d'après les dires de certains marchands ayant subit une attaque de ces derniers.

Alors qu'il n'était plus qu'à quelques centimètres de son sabre, une importante gerbe d'eau sous pression fut projetée depuis un buisson. Surpris, il bondit en arrière et esquiva habilement la masse d'eau qui passa à quelques centimètres seulement de son bras tendu vers son arme. Celle-ci, rapide et puissante, aurait aisément arraché son bras s'il ne l'avait pas esquivé.

Il se précipita rapidement vers son sabre et l'empoigna fermement. Il n'avait rien à craindre du bruit ou des mouvements brusques, car son adversaire savait déjà précisément où il était. De plus, ce n'était certainement pas une bête qu'il affrontait. Seul un humain aurait pu tendre un tel piège.

Mais qui ? Qui pourrait bien en vouloir ainsi à sa vie ? Les immortels ? Impossible, il n'en avait pas trouvé la moindre trace. Quels avantages auraient-ils à se montrer ainsi ? De nombreuses questions se bousculaient dans son esprit, alors qu'une autre vague d'eau sous pression fut projetée cette fois-ci d'un autre buisson.

Il esquiva une nouvelle fois, la gerbe d'eau termina sa course sur l'arbre derrière lui, endommageant son écorce sur plusieurs centimètres.

Eiji inspira un coup avant de se reconcentrer. "Peu importe qui tu es. Ton cadavre parlera pour toi."

Il balaya du regard les buissons face à lui, mais les lunes n'illuminaient que peu la terre ce soir-là. Il changea de posture, abaissant son point de gravité et concentrant ses forces dans ses jambes.

Après quelques secondes de silence, une nouvelle gerbe d'eau apparut d'un buisson. Mais plutôt que d'esquiver, Eiji se précipita vers le sort. Au moment précis où le liquide allait frapper son visage, il s'abaissa, esquivant sans pour autant arrêter sa course.

Il continua à courir en direction du buisson d'où provenait la lance d'eau, et l'atteint en un temps record. Il fouilla furieusement autour de buisson, ne trouvant malheureusement rien ni personne.

Il tiqua de frustration, son regard se portant désormais sur les autres buissons autours de lui. Il passait frénétiquement d'un buisson à l'autre, n'hésitant pas à donner de violents coups de sabres à l'aveugle.

Après quelques secondes de chasse qui lui parurent une éternité, une nouvelle lance d'eau fut propulsée en sa direction. Cependant, cette fois-ci, le lanceur de sort était tout proche. Il était si proche qu'Eiji n'eut le temps de réagir. La gerbe d'eau frappa violemment son thorax, le projetant au sol, suffoquant.

Couvert d'éraflures et de brûlures, Eiji gisait au sol, en proie à une crise de toussotement involontaire.

"Enfoiré !" Parvint-il à hurler.

Il entendit des pas à proximité de lui. La démarche était lente et assurée. Son assaillant approcha et s'agenouilla à côté de lui, lame à la main. Habillé d'une soutane de prêtre, son visage était altéré par la rage et la soif de sang, affichant un sourire disproportionné. Semblant amusé, il se fendit d'un rire psychotique qui agaça Eiji, qui peinait encore à se mouvoir.

"Enfin ! Grâce à toi nous serons libres ! Merci à toi, de bien vouloir mourir ainsi. Grâce à toi, nous pourrons vivre ! Nous serons pardonnés !"

Le prêtre approcha la lame du coup d'Eiji. Ce dernier fit de son possible pour se mouvoir, mais ne parvint qu'à reculer de quelques pas et fut rapidement rattrapé par son assaillant.

"Voyons, voyons. Où vas-tu comme ça ? Reste bien sagement ici ! Crois-moi, ça ira plus vite, et ce sera moins douloureux. Avec le temps j'ai pris l'habitude."

A la fois paniqué et fou de rage, Eiji agrippa férocement son sabre, jusqu'à en saigner. Alors que le prêtre approcha sa lame et commença à la planter dans la nuque d'Eiji, ce dernier ressentit une puissante chaleur dans la paume de sa main droite, celle qui tenait son sabre.

Rapidement, cette chaleur commença à absorber son énergie, son mana plus précisément. Le processus ne dura que quelques dixièmes de secondes. Enfin, son sabre s'embrasa, comme s'il était fait de feu. Surpris par cette manifestation, le prêtre extrait rapidement sa lame et recula de quelques pas.

Encore toussotant, Eiji réunit toutes ses forces pour se lever. Il asséna un coup en direction de son adversaire. La frappe étant lente, le prêtre eut le temps de reculer de quelques pas et prépara une nouvelle lance d'eau.

Cependant, alors que la frappe d'Eiji était pratiquement arrivée en bout de course, de cette dernière surgit une violente vague de feu qui se dirigea tout droit, en direction du prêtre. Ce dernier se précipita et envoya son sort, en vain.

La vague de feu, plus fort, passa au travers l'eau. L'importante quantité de vapeur émise propulsa le reste du liquide dans toutes les directions, ce qui ne manqua pas de blesser davantage le jeune homme. Enfin, la vague de feu continua sa course jusqu'au prêtre qui, prit de court, ne sut esquiver à temps.

Engouffrer dans les flammes, ses cris de douleurs distordaient le silence habituel de la forêt. Après avoir parcouru quelques dizaines de mètres en courant frénétiquement dans des directions aléatoires, il s'effondra, ayant succombé à ses brûlures.

Eiji s'effondra à son tour. Blessé de la tête au pied et peinant à respirer, il subissait chaque seconde qui s'écoulait.

Après plusieurs longues minutes, il entendit une voix familière qui traversait les bois en écho.

"Eiji. Eiji ! Tu vas bien ? Par tous les dieux, Eiji ! Que t'est-il arrivé ?"

La jeune femme se précipita à ses côtés, et plaça ses deux mains sur le corps de son camarade.

"Ne t'en fait pas, je vais te soigner." Larmoyante, elle réunit cependant tout son mana dans ses paumes. "Ne t'en fais pas, je vais tout faire pour te sauver."

Eiji s'évanouit à ces mots.