Mariage contractuel (2)

"Est-ce que ton père a arrangé cela ?" C'était le seul scénario plausible pour Edgar.

"Mon père n'a aucune idée que je suis là en train de te parler, Duc Edgar. Je t'ai dit que la fête est à l'intérieur. Personne n'était censé me voir passer. Mon père ne sera pas content de te voir ici avec moi," répondit Alessandra avec la vérité pure et simple.

Peu de gens pouvaient dire qu'ils voyaient souvent la fille du baron puisque Desmond gardait sa fille hors de vue. Alessandra ne lui était d'aucune utilité à cause du masque qu'elle portait et des rumeurs qui circulaient à son sujet.

"Tout ce que je dis en ce moment n'a rien à voir avec mon père. Je te laisse le soin de me croire. Je ne suis pas intéressée à me marier par amour. Je veux seulement quitter cet endroit et ne jamais me retourner."

"Qu'est-ce que c'est ? Ton père a des projets pour te marier à un homme beaucoup plus âgé que toi ou il t'envoie juste quelque part où tu ne veux pas aller ? Il faut que ce soit quelque chose de drastique pour demander à un homme que tu ne connais pas de t'épouser", dit Edgar en appuyant son cigare contre le mur de pierre pour le finir.

"C'est suffocant d'être ici. Je suis oubliée par mon propre père. Je me moque de ton apparence, Duc Edgar, ni de ton argent ou de tout ce que les autres pourraient vouloir. Franchement, je ne te vois que comme une échappatoire", expliqua-t-elle les raisons de son choix.

Leur rencontre était complètement inattendue de son côté, mais Alessandra ne voulait pas partir sans proposer ce qu'elle avait en tête.

"J'ai entendu ma famille dire que le roi souhaite que tu te maries. Pour un homme qui ne souhaite pas avoir de relations amoureuses avec qui que ce soit, je pourrais être un bon choix. Je vivrai tranquillement, comme un fantôme, m'occupant de ce que tu voudras de moi, et je ne t'aimerai jamais."

"Vraiment ?" Pour une fois dans sa vie, Edgar ne trouvait pas ses mots invraisemblables. Cependant, il n'était pas encore question de songer à l'épouser. "Il n'est pas difficile pour moi de trouver une actrice pour jouer le rôle de ma femme."

"Si c'était si facile, tu l'aurais déjà fait", dit Alessandra, voyant à travers son bluff. Il avait probablement besoin d'une femme qui aurait du sens aux yeux du roi. "Si le roi a fait cela pour se jouer de toi, choisir une femme comme moi le fera certainement regretter."

Les coins de la bouche d'Edgar se soulevèrent. "Tu es rapide d'esprit. Voilà pourquoi je ne cesse de dire à mes pairs de ne pas croire aux rumeurs. On a dit d'innombrables fois qu'Alessandra Barrett est une jeune fille timide qui s'effraie et s'enfuit dès qu'elle est repérée par quelqu'un."

"On dit de toi que tu es un monstre, mais tu as l'air humain pour moi. Je fais ce que je dois pour survivre ici. Si tu ne veux pas conclure un contrat avec moi, je te laisserai tranquille", Alessandra fit un pas en avant et attendit une réponse.

Quand Edgar ne répondit pas, elle fit un autre pas en pensant que l'homme ne voulait pas de ses projets, mais il la surprit.

"Rendez-vous demain à ma résidence. Nous en discuterons davantage là-bas et je vous donnerai ma réponse."

Alessandra se retourna précipitamment, manquant de tomber. Elle était surprise qu'il y pense réellement, mais était encore plus surprise que Edgar veuille qu'elle le rencontre chez lui. "Je ne quitte pas ici."

"Je l'ai compris en te voyant te faufiler. C'est un test pour toi. Je veux voir à quel point tu es déterminée. Je suis désolé de mettre fin à notre conversation ici, mais je suis resté chez toi plus longtemps que je ne le voulais. C'était agréable de discuter avec toi, Alessandra. J'espère que nous nous reverrons bientôt", dit Edgar en se retournant pour retourner à l'intérieur et trouver son père.

Alessandra commença à paniquer en pensant à la manière dont elle rencontrerait le duc demain. Au moins, il semblait la prendre au sérieux, à moins qu'il n'y ait une foule prête à se moquer d'elle pour avoir cru qu'il l'épouserait même avec un contrat. "On se reverra demain", promit-elle.

"Duc Edgar ? A qui parles-tu ?" Kate Barrett, la cadette du baron, sortit dehors.

Elle avait entendu dire que le duc était tout seul et avait pensé lui tenir compagnie. Voir le duc s'éloigner alors que la fille de son père était dehors faisait bouillir son sang.

Kate avait une haute opinion d'elle-même. Elle utilisait son apparence pour élever sa position parmi ses pairs. Elle était le portrait craché de sa mère avec ses cheveux blonds et ses yeux bleus. Deux choses qu'elle pensait la rendre plus belle que les autres.

Vêtue comme une poupée, Kate espérait échanger quelques mots avec le duc et attirer son attention. Elle suppliait son père de lui accorder un moment seule avec le duc, mais Alessandra le lui avait volé.

"J'espère qu'elle ne t'a pas offensé, Duc Edgar. Elle n'était pas censée être ici," dit Kate en lançant un regard noir à Alessandra, lui intimant de s'enfuir.

"Hmm," Edgar s'arrêta juste à côté de Kate. "Elle ne m'a pas offensé. Pas comme ton père l'a fait."

"Dieu merci. Elle -"

"Cela doit être dû au fait que je suis enfant unique, mais ne devrais-tu pas parler d'elle comme de ta sœur ou au moins en utilisant son prénom ?" Edgar comprit rapidement que la cadette n'appréciait pas l'aînée.

Voyant le duc parler à sa sœur, Alessandra profita de cette occasion pour s'enfuir avant que l'un ou l'autre ne lui demande de parler. Elle aurait souhaité que Kate reste à l'intérieur plutôt que de sortir.

Maintenant que Kate savait qu'elle avait parlé au duc, ce serait l'enfer demain.

Edgar écouta calmement le bruit d'Alessandra qui s'enfuyait tandis que Kate cherchait une bonne réponse à sa question. Il se demandait ce qu'Alessandra craignait tant chez Kate.

"Vous avez raison, Duc Edgar. Cela doit avoir un rapport avec le fait que vous n'avez pas de frères et sœurs. Quand des frères et sœurs se disputent, nous avons tendance à faire des choses mesquines, mais j'aime ma grande sœur. Comme vous pouvez le voir, elle est extrêmement timide et peut être maladroite. C'est pourquoi je craignais qu'elle ne vous offense", dit Kate en mettant son masque de bonne sœur.

Elle ferait n'importe quoi pour montrer au duc qu'elle était une bonne personne. Il n'y avait personne d'autre qu'elle considérait digne d'être son mari.

"Si cela te permet de mieux dormir la nuit", Edgar continua à marcher après qu'Alessandra se soit éloignée. Si seulement il était à sa place et non coincé avec Kate.

"Tu sais, j'espérais avoir un moment d'intimité entre nous deux. Je veux te montrer que je peux être un excellent choix pour ta femme", dit Kate en le suivant, en agrippant son bras pour le ralentir.

Edgar soupira, agacé par Kate qui ne comprenait pas l'allusion. Le baron et sa femme l'avaient élevée comme une princesse gâtée. Heureusement, il avait l'expérience d'une véritable princesse gâtée pour savoir comment gérer Kate. "Y a-t-il une idée fausse que je cherche une femme qui ne peut me satisfaire qu'au lit?" Il lui donna une claque sur la main.

Si quelqu'un les voyait ainsi, des rumeurs se répandraient rapidement. Il ne ressentait pas le besoin d'ajouter une autre rumeur à la longue liste qu'il avait.

"Je suis désolée," dit Kate, surprise qu'il refuse ses avances. Il y avait beaucoup d'hommes qui seraient ravis de ce qu'elle faisait pour Edgar. "Tu vas dans le quartier rouge."

Edgar haussa les épaules, ne voyant pas ce que cela avait à voir avec sa future femme. "Qui peut dire que je n'y vais pas pour lire un livre ?"

"C'est terriblement bruyant là-bas."

"Je travaille mieux quand il y a beaucoup de bruit autour de moi, mais s'il te plaît, éclaire-moi. Comment sais-tu à quel point c'est bruyant ?", demanda Edgar en souriant, savourant le moment où Kate réalisait son erreur. "Qu'est-ce que la fille du baron ferait là-bas, à moins qu'elle n'écoute les ragots sur ce que font les autres ?"

"N...Non. Vous avez mal compris", essaya Kate de clarifier tout de suite. Elle n'avait jamais visité un tel endroit.

"Comprenez ceci, Kate. Ce que vous faites ne m'attirera jamais. D'ailleurs, j'ai reçu une meilleure offre. Excusez-moi", dit Edgar avant de laisser Kate derrière lui, à la fois totalement confuse et gênée.