La salle était en ruine, la pluie continuait inlassablement son assaut contre la forteresse et le vent hurlait à la mort tandis que le tonnerre rugissait de rage.
Un trio gisait au sol, épuisé après une bataille acharnée contre un vampire redoutable. Alors que tout semblait perdu, une jeune femme ensanglantée brandit un anneau d'or vers son ennemi, une lueur brillante dans ses yeux noisette.
Noctis connaissait ce regard. Il était froid et implacable, avec une pointe d'amusement indifférent. C'était un regard tranchant, un regard d'acier qu'il n'avait jamais vu qu'aux yeux d'un seul homme.
« Ne me dites pas que...»
- « Je suis Artémis, fille du roi d'Acier et de la Sorcière Écarlate," déclara-t-elle d'une voix ferme. "Et par l'autorité suprême que me confèrent mon nom et mon sang, j'invoque ici…» Chacun de ses mots faisait briller l'anneau d'une lueur de plus en plus vive, de plus en plus incandescent. Thrór se précipitait vers elle avec une rage déformant ses traits, mais avec dans ses yeux une peur grandissante.
- «...J'invoque ici le domaine de Throne d'Acier, roi de Miyang ! »
Juste au moment où Thrór atteignait Artémis, sa main tendue pour l'attaquer, une onde de choc traversa l'air. Le vampire fut projeté en arrière, violemment repoussé. L'anneau qu'elle tenait se changea en une lumière éclatante, et dans cette lumière apparut une immense double porte en fer, ornée de motifs complexes. La porte s'élevait jusqu'au plafond, imposante, et s'ouvrit lentement, sans un grincement, dans un silence presque solennel.
Ce qui se trouvait derrière était une brume profonde qui ne laissa rien la pénétrer, pas même le regard. Noctis regarda attentivement, s'attendant à voir la brume se lever pour attaquer Thrór, mais elle ne bougea pas. Au lieu de cela, un milliers de petites bruits se firent entendre à travers elle.
Soudain, une pluie d'épées surgit de la porte. Chacune d'elles était unique, forgée d'une manière qui ne pouvait être qualifiée que d'art, et surtout, elles semblaient animées d'une volonté propre. Elles flottaient dans l'air comme une véritable tempête de métal, se dirigeant droit sur Thrór.
Les épées fondirent sur le vampire dans un fracas de métal, formant une tempête assourdissante. En un instant, Thrór fut englouti par cette légion d'épées volantes. Ses hurlements déchirants résonnèrent dans la salle alors que des centaines de lames transperçaient son corps.
La tempête d'épées continuait de le lacérer sans relâche. Les lames sifflaient dans l'air, frappant encore et encore le vampire terrassé. Chaque coup faisait jaillir un flot de sang noirâtre, chaque entaille arrachait un morceau de sa chair immortelle. Pourtant, malgré la fureur de l'attaque, Thrór luttait encore, son corps se tordant sous la douleur insupportable.
Lorsqu'enfin les épées, leurs éclats désormais ternis par le sang, se décidèrent à retourner dans le monde que cachait la porte de fer, Thrór n'était plus qu'un tas de chair ensanglantée s'agrippant à peine à la vie à l'aide de ses ignobles griffes brisées.
La dernière des lames meurtrières franchit la porte, qui se referma dans le même silence solennel que lors de son ouverture. Puis, elle brilla d'une lumière pâle et aveuglante, et disparut toute entière, emportant avec elle la pression familière du domaine du roi d'Acier.
Artémis s'effondra à terre, l'adrénaline ne soutenant plus son corps. Noctis courut vers elle tandis que Loyd s'effondrait de fatigue.
Tous les trois étaient dans un état misérable, c'était le cas de le dire. Ils étaient couverts de sang et de blessures, avec des côtes cassées et des coupures profondes.
Si cela continuait, ils risquaient même de mourir par manque de sang, ou même d'épuisement. Le monde était parfois injuste.
Noctis s'arrêta à genoux face à Artémis, ne sachant que faire ; il avait ses bases en médecine, mais n'avait ni les matériaux ni le temps nécessaire. Soudain, Artémis toussa du sang et lui saisit le poignet.
- « Noctis, dans...Dans ma poche...»
Sans attendre, il fouilla dans ce qui restait de la poche de la tenue de chasse noire d'Artémis, qui était en lambeaux. Il en sortit un petit flacon, de la taille d'un doigt, qui semblait contenir trois petites gouttes de sang.
- « Ouvre-le...» La voix d'Artémis était faible, et elle toussa à nouveau. Précipitamment et maladroitement, Noctis retira le bouchon du petit flacon. Puis, magiquement, les trois gouttes de sang eurent une aura brillante.
Elles sortirent de leur flacon, flottant gracieusement dans l'air, puis se dirigèrent vers les trois voyageurs, chacune pénétrant dans leurs poitrines respectives. Soudain, Noctis se sentit revigoré. Ses plaies se refermèrent, son épuisement disparut partiellement, et ses os et ses côtés se réparèrent magiquement.
«Comment...»
Mais Noctis avait bien plus urgent à faire que de penser à ça. Il glissa le flacon vide dans la paume d'Artémis, qui était désormais inconsciente, sûrement rattrapée par l'épuisement. Loyd était dans le même état. Les laissant se reposer, il se dirigea vers ce qui restait de Thrór.
Étrangement, il vivait encore, bien que difficilement. Noctis soupira et leva l'épée bâtarde, prêt à tout terminer.
Thrór le regarda de son dernier œil, et tout son corps se contorsionna. Des sons inaudibles sortirent de ce qui lui restait de la bouche ; il n'était vraiment pas prêt à mourir.
C'était ironique. Noctis se souvenait des paroles de Thrór, quelques instants auparavant : «Pourquoi te relever ? Vous avez perdu. Aucun de vous ne peut me vaincre.»
Avec un sourire de rage, Noctis planta la lame de l'épée dans le cœur de Thrór, qui cessa bientôt de se débattre.
[Vous avez contribué à tuer un vampire Maître, Thrór Clavem Sanctuaria]
[Vous obtenez une partie des âmes récoltées par le vampire Maître]
[Votre âme déborde de puissance...]
[Votre âme évolue]
Une faible lueur entoura les corps de Noctis, Artémis et Loyd. Les âmes récoltées par Thrór durant des centaines d'années avaient dû se répartir équitablement entre les trois, et ils avaient dû en acquérir assez pour évoluer tous les trois en Maîtres.
Noctis ne savait pas comment se déroulerait le processus, mais il allait bientôt le savoir.
Alors, la voix féminine mélodieuse lui chuchota à l'oreille :
[Le sang du Dévoreur s'agite...]