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Elle va se montrer utile.

Le lendemain matin, le calme était revenu à Marline, et Chiho, encore en route vers l'entreprise, avait encore une dernière intersection à traverser avant de se retrouver sur l'esplanade devant l'immeuble aux parois de verre.

Arrêtée devant le passage piéton, elle attendait que le passage lui soit autorisé pour pouvoir traverser, quand une grosse voiture noire s'arrêta pile devant elle.

Le conducteur descendit, vêtu d'un costume sobre et élégant, et se dirigea immédiatement vers elle ; ce qui surprit la jeune femme.

« Mademoiselle Hosoda ? » Demanda le chauffeur.

Un peu déstabilisée d'être abordée en pleine rue par un parfait inconnu, elle hésita un peu avant de lui répondre.

« O-Oui ? C'est bien moi… ? » Dit-elle en sentant les regards des autres piétons se poser sur elle.

L'homme en costume noir se positionna alors devant la porte passager arrière, et tout en l'ouvrant, il invita Chiho à monter à bord du véhicule.

« Mon employeur souhaite vous parler un instant, » dit-il en lui faisant signe de la main pour entrer.

« Votre… Employeur ? » Répéta avec méfiance Chiho.

Elle se demandait qui pouvait bien la connaître et demander à la rencontrer ainsi ; surtout à bord d'une berline de luxe dont le prix dépassait facilement les 80 mille dollars. Elle ne s'y connaissait pas en voitures, mais quand elle voyait une énorme voiture noire avec chauffeur, aux finitions chromées et avec une énorme calandre, elle savait parfaitement de quoi il s'agissait. Elle avait vu trop de séries télés avec des modèles de voitures qu'elle ne pourrait jamais se permettre même en ayant économisé des années.

Intriguée, elle baissa la tête pour voir qui se tenait assis sur la banquette arrière, et vit avec surprise la femme qu'elle avait croisé plusieurs jours auparavant dans le hall de marline : Yamada Kiyo.

« Hosoda-san, montez ! » L'encouragea Kiyo en lui faisant un petit signe de la main.

Poussée par la curiosité – et peut-être aussi par une certaine fascination pour ce monde d'opulence qui lui était hors d'atteinte – Chiho s'avança pour entrer à l'arrière du véhicule et s'asseoir à côté de Kiyo.

Le secrétaire personnel de cette dernière ferma alors la porte passager, puis s'installa derrière le volant pour commencer à conduire la voiture.

« On va faire un tour du quartier pendant notre conversation, puis on vous déposera devant Marline, alors ne vous inquiétez pas, » la rassura Kiyo.

Chiho hocha de la tête. Au moins, elle n'était pas emmenée ailleurs ou contre son gré ; et se détendit pour se mettre un peu plus à l'aise sur la banquette en cuir noir piqué de fil gris anthracite.

« Je ne m'attendais pas à vous voir arriver ainsi, » dit contemplativement Chiho.

« Je passais dans le coin, et je vous ai aperçue, » lui révéla Kiyo en souriant. « Alors j'ai pensé que nous pourrions continuer un peu notre discussion de la dernière fois. »

La voiture avança lentement dans les rues aux alentours de la société d'assurances ; le secrétaire conduisant avec fluidité et adresse pour éviter les ac-coups qui auraient pu déranger les passagers.

Les sièges étaient très confortables pour Chiho, si bien qu'elle n'aurait pas refusé de rester plus longtemps que prévu assise à l'arrière de la berline noire. C'était plutôt flatteur de se retrouver dans ce genre de véhicule avec chauffeur, et la jeune femme appréciait de pouvoir observer la foule au dehors sans être elle-même sujette aux regards grâce aux vitres teintées opaques.

« Tout se passe bien à Marline ? » Demanda Kiyo.

« Plutôt, oui, » répondit immédiatement Chiho, comme s'il s'agissait d'une réponse répétée à l'avance.

« Mais est-ce que tout se passe bien pour vous ? » Précisa la femme plus âgée.

Face à la question plutôt ciblée, Chiho se tourna vers la femme à l'allure élégante.

Cette dernière était habillée d'un costume – jupe et veste à deux boutons – de couleur vert foncé, sous lequel se trouvait un long pull beige à haut col roulé. Elle portait au poignet gauche une montre en métal gris et au cadran complexe par ses informations et richement décoré par des volutes dorées. Un objet raffiné mais aussi très voyant au poignet d'une femme.

« Que… Voulez-vous dire par là ? » Demanda avec précaution Chiho.

« Allons, vous avez forcément quelque chose qui doit vous contrarier dans votre travail, pas vrai ? » Demanda Kiyo. « Comme vous avez fait forte impression sur moi, j'aimerais vraiment vous faciliter les choses. »

La femme plus âgée sourit doucement en penchant la tête sur le côté, et Chiho se demanda si elle avait encore eu des informations sur ce qui se passait dans l'entreprise. Après tout, c'était aussi parce que quelqu'un dans l'entreprise lui avait parlé de Chiho, que Kiyo avait décidé de l'aborder dans le hall de Marline pour faire sa connaissance.

Même si l'héritière de fortune familiale ne l'avait pas explicitement dit, Chiho avait compris qu'elle pouvait obtenir toutes les informations qu'elle souhaitait sur les employés.

Restait à savoir exactement qu'est-ce que cette femme issue d'un conglomérat avait appris.

« J'ai été informée que quelque chose de surprenant s'était produit hier en fin d'après midi... » Annonça Kiyo. « Est-ce vrai qu'une employée a fait un malaise parce que son supérieur hiérarchique lui criait dessus ? »

Chiho serra les dents. Ce n'était pas vraiment ce qui s'était passé, mais elle préférait largement cette version à la vérité où elle était fautive. Elle hocha donc la tête en silence.

« J'ai aussi appris le nom de ce supérieur, et je dois dire que je suis perplexe... » Continua Kiyo. « Ce n'est pas la première fois qu'on me rapporte des choses sur cette personne, donc cela m'inquiète, en tant que future dirigeante de l'entreprise. »

Le regard de l'héritière s'était un peu durci, et Chiho vit même une pointe d'agressivité dans ses yeux ; ce qui informa la jeune femme qu'il y avait sûrement plus qu'un simple désaccord entre Yamada Kiyo et Kobayashi Shinsuke.

« Si je peux donc faire quoi que ce soit pour m'assurer qu'un élément nuisible à l'entreprise soit éliminé... » dit lentement Kiyo.

Est-ce que cette femme était en train de la tester ?

Chiho avait l'impression qu'en répondant à cette question, elle pouvait influencer son futur dans l'entreprise, et choisit donc avec soin ses mots.

« En tant qu'employée, pouvoir contribuer à l'entreprise et à son bon fonctionnement est une évidence, » dit-elle.

Ses paroles ravirent Kiyo, car même si la jeune femme ne l'avait pas dit directement, elle accepterait de donner son aide, et de suivre les instructions qui lui seraient données.

« Dans ce cas, puis-je vous demander quelque chose ? »

« O-Oui ? »

« J'aimerais que vous teniez à l'œil ce Chef de Section, et que vous me rapportiez tout ce que vous trouverez d'intéressant sur lui. »

Chiho ne laissa rien paraître, même si elle trouva cette requête plutôt étrange.

Si Yamada Kiyo avait déjà quelqu'un dans l'entreprise qui l'informait de tout ce qui s'y passait, pourquoi s'assurait-elle d'avoir une autre personne spécifiquement dédiée à espionner le Chef Kobayashi ?

C'était plus que troublant, mais Chiho savait également quand c'était le moment de poser des questions, et quand il était préférable de se taire.

Elle décida donc de garder le silence, et hocha de la tête pour signifier son accord.

Kiyo sourit, et leva alors la paume de sa main vers la jeune femme assise à ses côtés.

« Votre téléphone. » Dit-elle.

Immédiatement, Chiho fouilla dans sa poche de veste, et en sortit son smartphone. Elle le déverrouilla, et le tendit à la femme plus âgée qu'elle.

L'héritière s'en saisit, et après avoir tapé pendant une minute sur l'écran de l'appareil, une vibration retentit dans l'habitacle. Elle sortit alors un smartphone gris foncé d'une de ses poches, et rejeta un appel qui se présentait. Chiho reconnut brièvement son propre numéro de téléphone s'afficher, et comprit que Yamada Kiyo avait appelé son propre téléphone pour pouvoir échanger leurs coordonnées.

Cela fait, elle rangea son smartphone dans sa poche, et rendit à Chiho le sien. Cette dernière prit en main le téléphone, et fixant l'écran du regard, vit qu'un nouveau contact avait été ajouté, sous le nom « Y ».

« Mon numéro de téléphone, » précisa Kiyo. « Si vous avez quoi que ce soit à me rapporter, vous pouvez me joindre par ce biais. »

Chiho rangea son téléphone, et elle aperçut du coin de l'œil par les vitres teintées que la voiture était en train de revenir à son point de départ ; là où la jeune femme avait été invitée à embarquer.

Puis, la berline noire s'arrêta à nouveau sur le passage piéton, et après être descendu pour ouvrir la porte passager arrière, invita Chiho à descendre à son tour.

La jeune femme retourna sur le trottoir, et Kiyo se pencha vers la portière encore ouverte pour s'adresser une dernière fois à elle.

« J'espère que nous saurons nous entraider avec efficacité ! » S'exclama Kiyo en lui faisant signe de la main.

Le secrétaire referma la portière avant de se remettre au volant, et la grosse voiture s'éloigna doucement pour aller rejoindre la circulation ; laissant Chiho seule au niveau du feu de signalisation.

Sur la banquette arrière, Kiyo se réinstalla confortablement, et plissa des yeux pour lancer un regard acéré à l'homme qui conduisait.

« Pas de nouvelles de mon père? » Demanda-t-elle sans détour.

« Non, madame, » répondit Sakuraba Yuho.

Un peu déçue par cette réponse, Chiho fouilla dans son sac à main et sortit un smartphone identique en tout points à celui qu'elle avait utilisé en présence de l'employée de Marline, si ce n'est pour sa couleur, qui était noire au lieu de gris foncé.

Elle démarra un appel avec, et entendit son père à l'autre bout du fil.

« Kiyo ? Qu'est-ce qu'il y a ? »

« Papa, t'es toujours hors de la ville ? » Se plaignit-t-elle.

« J'ai eu un contre-temps et je dois régler des choses avec le directeur régional, » s'excusa son père.

« Papa ! On était censés manger ensemble ce soir ! » Rouspéta-t-elle.

« Vraiment désolé ma chérie. Tu devras manger avec ta mère pour l'instant. »

Kiyo fit la moue. Elle n'aimait pas trop que son père revienne sur leurs plans, mais ce n'était pas comme si elle pouvait y faire quelque chose. Elle espérait juste que ce 'contre-temps' n'allait pas avoir de répercussions importantes.

Elle avait déjà bien fait progresser les choses, et ce n'était qu'une question de temps avant qu'elle obtienne ce qu'elle voulait : se débarrasser de Kobayashi Shinsuke, et prendre la tête de Marline Insurance…

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