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Ils ont la même intention.

« Est-ce que ça va mieux ? » Lui demanda Takao.

Hana hocha de la tête ; les emballages d'onigiris et les bouteilles de jus de fruit vides rangés dans le sac plastique qui avait servi à les transporter jusqu'ici.

Elle en était sûre à présent : Takao avait fait exprès de la chercher pour l'amener ici et lui remonter le moral. Sa question, alliée à un léger sourire, lui avait bien confirmé ceci.

« Si jamais vous vous sentez encore mal, n'hésitez pas à venir profiter de la terrasse, » reprit-il en regardant devant lui le jardin qui les entourait.

« J'y penserai, » dit Hana avec un léger sourire.

Le temps s'était à nouveau refroidi à l'approche de la fin de la journée, et la circulation des voitures s'était faite beaucoup plus dense ces dernières minutes. Le bruit des moteurs et des coups de klaxon montaient jusqu'à la hauteur où ils se trouvaient, et les rues éclairées par les phares des véhicules, les lampadaires, et les lumières provenant des devantures et des vitrines de magasins ressemblaient à des guirlandes découpant le sol en un quadrillage strict et précis.

« Ce n'est peut être pas quelque chose dont vous voulez parler, mais y-a-t-il quelque chose entre vous et Hosoda-san ? » Demanda à tout hasard Takao.

Il avait bien remarqué ces derniers jours qu'une certaine tension existait entre les deux jeunes femmes ; et d'autant plus quand il avait observé qu'Hana revenait encore seule après avoir travaillé en extérieur. C'était comme si les deux femmes étaient en froid, ou du moins, que Chiho détestait Hana, car cette dernière ne laissait rien paraître et continuait d'être courtoise et souriante.

Cependant, voir la jeune femme revenir avec cette expression perdue et distante avait suffisamment alarmé Takao pour qu'il aille chercher de quoi manger et qu'il essaie de remonter le moral à la jeune femme. Malgré cela, peut-être que sa question restait déplacée et trop indiscrète.

« Pour tout dire, je pense que Chiho a une mauvaise opinion de moi depuis longtemps, et que rien ne la fera changer d'avis. » Répondit Hana avec un air abattu.

« Depuis… Longtemps ? » Répéta avec curiosité Takao.

Elle ne travaillait à Marline que depuis quelques jours, tout comme lui, alors pourquoi avait-elle employé ce mot ? Se pouvait-il que les deux jeunes femmes se soient connues avant ?

« C'est assez dur de changer le point de vue de quelqu'un qui est persuadé de regarder la vérité, » dit-elle. « C'est probablement pour cela que je n'ai jamais réussi à me faire d'amis. Les gens avaient du mal à voir au-delà de leurs préjugés. »

« Pourtant, vous m'avez moi, maintenant ! » Se manifesta Takao. « Votre tout premier ami ! »

Hana hocha de la tête, et prit un air amusé.

« Techniquement, vous êtes mon second ami, » dit-elle avec un petit sourire.

« Attendez, je croyais que vous n'aviez pas du tout eu d'amis ?! » S'exclama Takao, offusqué.

« Vous êtes bien la première personne à me demander d'être ami avec moi, » le rassura-t-elle.

« Alors pourquoi je suis quand même second ? » Demanda-t-il avec insistance.

« Disons… Que mon seul et unique ami ne m'a jamais demandé mon avis ? » Dit-elle avec un air interrogatif.

« Il vous as jamais demandé votre avis ? » Répéta avec confusion Takao.

Hana eut alors un petit sourire contemplatif, et se rappela encore une fois de ce garçon qui n'avait pas voulu la lâcher d'une seule semelle.

« Hana, Soyons amis ! » S'imposa Tounishi Jun.

Sans même lui lancer un regard, la jeune fille esquiva l'autre lycéen pour continuer tout droit son chemin entre le lycée et chez elle.

Elle entendit des bruits de pas se rapprocher en accélérant, puis le jeune garçon la dépassa pour à nouveau se mettre en travers de son chemin.

« Soyons amis, ok ? » S'exclama-t-il en tendant une main vers elle.

Hana fronça les sourcils. Celui-là ne savait vraiment pas quand abandonner.

Toute la semaine, il n'avait pas arrêté de la suivre partout et de se mettre dans son champ de vision en appelant son nom. Cette insistance commençait à agacer la jeune fille, qui se demandait combien de temps cette blague allait durer ; les autres lycéens continuant de glousser en voyant ce qui était devenu une occurrence quotidienne entre les deux.

Elle pensait vraiment que continuer à ignorer le garçon le ferait sûrement abandonner, mais le bougre s'était montré plus insistant et coriace que prévu ; jusqu'au point où il se trouvait à présent devant elle, à la suivre jusqu'à chez elle.

Contrariée par ce harcèlement, Hana finit par lever les yeux, et vit que le garçon du nom de Jun souriait.

Est-ce qu'il se moquait déjà d'elle, avant même qu'elle ait donné sa réponse à ce qui n'était qu'une blague cruelle ?

« Ah, tu me regardes enfin ! » Dit-il avec un air ravi. « C'est le moment où on devient amis ? »

Hana se mordit l'intérieur des joues avec anxiété. Est-ce que ce type allait encore continuer à dire ça longtemps ?

Elle ne voulait pas gaspiller son temps à se battre pour une cause perdue d'avance – se défendre des rumeurs qui courraient à son sujet – mais si cela pouvait aider ce garçon à revenir à la réalité, elle n'avait pas vraiment d'autre choix que de lui adresser la parole. Elle poussa alors un soupir lasse.

« Je ne sais pas ce qu'on t'as dit à mon sujet, mais tu devrais savoir que personne ne m'approche, » dit-elle en lui lançant un regard réprobateur.

« Dans ce cas je serai le premier ! » Dit-il avec bonne humeur.

« Je ne veux rien avoir à faire avec qui que ce soit... » Continua Hana, imperturbable.

« Dans ce cas je te ferai changer d'avis ! » Répliqua aussitôt Jun.

« Non, tu n'as pas compris… Je me fiche de ce genre de blagues, alors si tu espères que je vais gentiment m'humilier moi-même, c'est trop m'en demander. »

« Une blague ? Comment ça ? » Demanda-t-il avec une expression perplexe.

Ce garçon le faisait exprès pour lui taper sur les nerfs ou quoi ?

« Je sais très bien ce que tu essaies de faire, alors laisse tomber. » Dit-elle avec un ton sévère. « Je ne tomberai pas dans le panneau, alors fiches-moi la paix. »

Le garçon resta un instant silencieux, un air pensif sur son visage.

Est-ce qu'il était en train de réfléchir à quoi faire par la suite ? Ou à un nouveau moyen de la tourmenter ?

« Tu penses que je suis pas sérieux en te demandant d'être mon amie ? » Demanda-t-il avec sérieux.

À la grande surprise d'Hana, le lycéen commença à s'asseoir en plein milieu du trottoir, avant de s'allonger de tout son long devant les regards surpris et interrogatifs des autres passants. Même Hana se sentait gênée de le voir agir ainsi.

« Qu'est-ce que tu fais?! » Dit-elle avec une expression paniquée.

« Je proteste, » dit-il en regardant le ciel.

Allongé sur le dos et perpendiculairement au trottoir, nul doute qu'il causerait des soucis de circulation à tous les piétons souhaitant emprunter cette route. Qui plus est, il semblait sérieux, et restait immobile même quand d'autres personnes tentaient de passer – pour finir par l'enjamber.

Paniquée, Hana regarda le lycéen continuer de sourire tandis qu'il faisait s'impatienter les passants.

« Restes pas là ! » Dit-elle avec précipitation, sentant l'embarras la gagner.

« Pas tant que tu ne seras pas mon amie, » dit-il avec un air déterminé. « Je ne bougerai pas d'ici tant que tu ne m'auras pas dit oui. »

Hana respira un bon coup. Ce type ne voulait rien entendre.

« Dans ce cas, ne bouges pas d'ici, » dit-elle sèchement.

Elle leva alors le pieds droit, et commença à enjamber le lycéen pour continuer sa route.

« Hé ! Attends ! » S'exclama-t-il en se redressant. « Pars pas comme ça ! »

Hana continua son chemin sans se retourner ni lui répondre, mais dût se rendre à l'évidence : ce type continuait de la suivre, à en juger par les bruits de pas qui imitaient les siens.

Sur le moment, elle aurait dû se douter que les choses ne finiraient pas aussi simplement, car les jours suivants, le jeune garçon continua de la suivre sur le chemin du retour.

« Soyons amis, Hana ! » S'exclama-t-il encore une fois.

Ah, ce qu'il était persistant. Hana se rappela qu'il l'avait suivi comme ça pendant au moins deux semaines, et ne put s'empêcher de sourire. Malgré elle, ce garçon avait trouvé sa place dans son cœur, s'y faufilant de force sans lui demander son avis. Il ne fallut qu'un seul jour où le père d'Hana aperçut le lycéen par hasard, pour qu' il invite ce dernier chez eux contre le gré d'Hana, et ne renforce définitivement l'étrange lien qui s'était tissé entre sa fille et ce garçon.

« En un sens, cette personne ne m'a jamais demandé mon avis, et a simplement décrété que nous étions amis, » avoua-t-elle avec un petit sourire affectif.

Takao soupira, et Hana crut avoir dit quelque chose de mal. Était-il toujours déçu de n'être que son second ami ?

« Ah, si j'avais su, j'aurais utilisé la même méthode, » dit-il en soupirant.

Hana eut un mouvement de recul, et ne put s'empêcher de se demander ce qui sa tramait dans la tête de cet homme assis à ses côtés. Puis, avec un regard sérieux, Takao ajouta :

« Hana, soyons amis ! » Dit-il en la regardant droit dans les yeux et en exagérant grandement son expression.

La jeune femme ne put s'empêcher de lâcher un petit rire face à la situation. C'était si ridicule, la façon dont il l'avait dite, mais pas le moins dénuée de sincérité.

Comme Jun à l'époque de leur rencontre, Takao s'était montré sous son vrai jour et avait tout fait pour la rassurer et la mettre à l'aise. C'était peut-être le signe qu'elle attendait afin de pouvoir lui faire confiance à lui aussi ; et ravie, elle regarda devant eux le jardin où l'éclairage s'était allumé pour éclairer bosquets et chemins.

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