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Chapitre 5

Il était tard dans la nuit lorsque Angélica rentra chez elle avec son père. Sur le chemin du retour, elle n'arrêtait pas de penser à l'étrange nuit qu'elle avait passée avec le roi. Il y avait quelque chose de différent chez lui qu'elle ne pouvait pas tout à fait saisir, et pourtant, curieusement, il lui plaisait malgré les signes d'avertissement qui l'effrayaient.

En parlant d'effrayant, elle se rappela les sombres yeux du seigneur Rayven. Elle ne pouvait oublier la manière dont il l'avait regardée avec une telle… haine ? Ou était-ce de la colère ? Elle n'aurait su dire, mais il était très clair qu'il ne l'appréciait pas. Angélica ne pouvait pas lui en vouloir après la manière dont elle avait réagi en voyant son visage.

« Angélica. Je ne veux pas te voir avec un autre homme. Tu dois penser à ta réputation maintenant que tu as attiré l'attention du roi. Ne gâche pas ta chance,» son père lui avait dit une fois à la maison.

Angélica voulait protester et lui dire qu'il n'aurait pas dû la laisser seule avec le roi s'il s'était soucié de sa réputation. Et si le roi ne l'aimait pas ? Alors aucun autre homme ne serait prêt à l'épouser. Mais son père pensait toujours avoir raison, alors elle ne se donna pas la peine de se battre.

« Bien, père, » dit-elle et se hâta à l'étage juste pour être seule une fois.

Sa femme de chambre, Eva, avait déjà mis du feu dans la cheminée et préparé sa chemise de nuit. Maintenant elle faisait son lit.

« Eva, aide-moi à sortir de cette robe, » dit Angélica.

Le corset écrasait ses côtes et elle avait hâte de respirer normalement. Eva s'empressa et l'aida à sortir de la robe élégante qu'elle portait. La beauté était véritablement une souffrance.

Après avoir enfilé sa chemise de nuit, elle rampa dans son lit avec un livre. Lire l'aidait à s'endormir.

« As-tu besoin de quelque chose d'autre, ma Dame ? » demanda Eva.

« Non, merci. Tu peux aller dormir, » dit Angélica.

Eva acquiesça et lui souhaita bonne nuit avant de partir. Angélica était sur le point de se glisser sous sa couverture quand elle vit son frère debout à sa porte.

« Guillaume, pourquoi es-tu encore debout ? » chuchota-t-elle.

Il haussa les épaules. « Je n'arrivais pas à dormir. »

« C'est encore les rêves ? » demanda Angélica.

Guillaume acquiesça.

Son frère faisait d'étranges rêves depuis qu'il avait sept ans. Il avait maintenant dix ans.

« Viens, » elle tapota à côté d'elle sur le lit et il grimpa et s'assit à côté d'elle.

« Qu'as-tu vu cette fois ? » demanda-t-elle.

Il la regarda avec des yeux inquiets. « Je t'ai vue être poursuivie par des monstres. »

Elle sourit et caressa ses cheveux. « Il n'y a pas de monstres. »

« Je sais, » dit-il, mais il semblait toujours préoccupé.

« Étaient-ils effrayants ? »

Il acquiesça.

« Est-ce que je m'en suis sortie ? »

« Oui, mais… » il s'interrompit et fronça les sourcils.

Angélica devint curieuse. « Mais quoi ? »

« Tu as couru vers quelque chose d'encore plus effrayant, » dit-il, sa voix devenant plus basse comme s'il avait peur que ce quelque chose d'encore plus effrayant l'entende. Il lui faisait peur.

« Eh bien, ne t'inquiète pas. Tu as eu ces rêves de nombreuses fois auparavant et rien de ce que tu as rêvé ne s'est produit, » rassura-t-elle.

Il soupira et acquiesça.

Angélica ne savait pas comment aider son frère à se débarrasser de ces rêves. Ils semblaient devenir de plus en plus vifs et perturbants chaque année. Elle en avait parlé à son père mais il avait négligé ses inquiétudes. « Ce ne sont que des rêves, » disait-il.

C'étaient ces moments-là qu'Angélica souhaitait que sa mère soit encore vivante. Sa mère était morte en couches en mettant Guillaume au monde. Angélica avait seulement neuf ans quand sa mère est décédée. Elle a dû grandir vite et prendre soin de son frère.

En plus de son emploi du temps exigeant, son père était toujours en train de travailler à la réalisation de ses rêves de recherche de richesse. Il traitait Angélica d'ingrate et lui disait qu'il travaillait dur pour eux chaque fois qu'elle se plaignait. On lui disait que sans lui, ils ne vivraient pas cette vie de confort.

C'était quelque chose qu'Angélica ne pouvait pas nier et elle était reconnaissante pour tout ce qu'il avait fait pour eux. Elle souhaitait juste qu'il écoute et se soucie plus souvent.

« Puis-je dormir ici ? » demanda son frère.

« Bien sûr, » dit Angélica et il se glissa sous sa couverture.

« J'aurais aimé pouvoir venir avec toi à la fête. Je voulais voir le nouveau roi, » dit son frère.

« Tu le verras un jour, » lui dit-elle.

La chevalerie était le rêve de son frère. Depuis qu'elle s'en souvenait, il en parlait et comptait les mois, semaines et jours jusqu'à ce qu'il puisse commencer son entraînement. Généralement, l'entraînement débutait à l'âge de treize ans.

Angélica espérait que son frère devienne autre chose qu'un soldat. La guerre, les combats et l'héroïsme pourraient lui coûter la vie. Elle ne voulait pas le perdre.

« As-tu vu l'homme maudit ? » demanda-t-il.

Angélica fit une pause. Homme maudit ?

« Tu veux dire le seigneur Rayven ? »

Il acquiesça.

« Comment sais-tu qui il est ? » demanda-t-elle.

« Tout le monde le connaît. Il s'est installé dans la tanière du loup. »

Angélica fut surprise d'entendre cela. Pourquoi un seigneur s'installerait-il dans un vieux château abandonné qui était réputé pour être maudit ? Bien qu'Angélica ne croyait pas aux rumeurs, le château était très ancien et situé au sommet de la plus haute colline de la ville. Il aurait facilement pu acheter un endroit plus agréable pour y vivre. Ou peut-être avait-il prévu de le rénover.

« Eh bien, il n'est pas maudit, et le château non plus, donc il peut y vivre s'il le souhaite. » déclara Angélica.

« Je pense que l'endroit lui convient, » dit son frère pensivement.

Angélica devint pensive elle aussi. Considérant la façon dont il l'avait fait se sentir et son aura, le château lui convenait effectivement. Comme ses yeux, il était sombre et envoûtant.

« Très bien, » Angélica ferma le livre et le mit de côté. « Dormons un peu, » dit-elle. Elle souffla la bougie sur sa table de chevet, puis se coucha.

Peu après, elle s'endormit dans le noir.

*********

En grognant, Angélica se réveilla au son régulier de la pluie sur sa fenêtre, le soleil levant étant encore loin de disperser ses rayons. S'asseyant, elle regarda par la fenêtre. Aujourd'hui serait la journée parfaite pour rester chez soi, boire du thé chaud et lire des livres. Mais le ciel maussade semblait avoir de mauvaises nouvelles pour sa ville.

« Ne quitte pas la maison seule, Angélica. » lui dit son père dès qu'elle descendit pour petit-déjeuner.

« Pourquoi ? Qu'est-ce qui se passe ? » demanda-t-elle en s'asseyant à la table. De toute façon, elle ne sortait jamais seule.

« Ils ont trouvé le cadavre d'une jeune femme, encore une fois. »

« Encore ? » Angélica fut surprise. Quand avaient-ils trouvé un cadavre auparavant ?

« Oui. La semaine dernière, une jeune femme a disparu et ils l'ont retrouvée morte le lendemain. La même chose s'est produite cette fois-ci. Le tueur semble s'en prendre aux jeunes femmes. » expliqua son père.

Angélica était horrifiée. Un tueur dans sa ville ? Ils vivaient dans une ville paisible où ce genre de choses n'était jamais arrivé auparavant.

« Cherchent-ils le tueur ? » demanda-t-elle.

« Oui, » répondit son père, buvant son café à la hâte. Puis il se leva et enfila sa veste. « Je prends ton frère au château. Il commencera aujourd'hui sa formation pour devenir courtisan. »

Angélica allait juste prendre sa tasse quand elle se figea. « Père, tu sais que Will veut devenir chevalier, pas courtisan. »

« Je croyais que tu ne voulais pas qu'il devienne chevalier ? » demanda-t-il, ajustant sa veste.

Angélica reposa sa tasse. « Je ne veux pas, mais je ne pense pas qu'on devrait lui forcer quelque chose qu'il ne souhaite pas. »

« Il est trop jeune pour décider. Il s'y habituera. » dit son père avec fermeté.

Encore une fois, son père décidait des choses selon ce qui convenait à son plan. Prenant Will avec lui, il se dépêcha de partir.

Angélica resta seule à la maison et prit le temps de se détendre. De toute façon elle n'avait habituellement pas grand-chose à faire pendant ses journées. Elle était censée être mariée maintenant après avoir appris à danser, à tricoter et à jouer de différents instruments. C'est tout ce que les femmes devaient apprendre. Tout le reste, elle l'avait appris par elle-même et aucune de ces choses ne pouvait être partagée ou discutée avec ses amies. Elles n'étaient intéressées que par les hommes.

En parlant de ses amies, elle se demanda ce qu'elles pensaient d'elle maintenant après l'incident de la veille. Angélica se sentait mal rien qu'à l'idée d'avoir envisagé une relation avec le roi alors qu'elle savait que Hilde le voulait. Peut-être devrait-elle simplement oublier le roi. Malgré ses bonnes qualités, il y avait quelque chose chez lui qui la dérangeait. Quelque chose dans son aura et sa curiosité incessante envers elle était déconcertant.

Etait-elle paranoïaque sans raison ? Qu'est-ce qui pourrait bien le rendre tant curieux ? Il n'y avait rien de plus chez elle que d'être une femme non mariée à son âge. Et qu'est-ce qui pourrait bien être différent chez lui ? Il n'était qu'un jeune royal. Peut-être essayait-il de paraître intimidant pour être pris au sérieux en tant que souverain malgré son jeune âge.

La pluie continuait de tomber avec force à l'extérieur du manoir et l'obscurité s'intensifiait. Angélica attendait le retour de son père et de son frère mais cela durait plus longtemps que prévu. Après avoir attendu un moment, elle devint inquiète. Peut-être d'autant plus qu'elle savait que des morts inexpliquées s'étaient produites dans la ville. Dieu interdise qu'il leur soit arrivé quelque chose.

Ne pouvant attendre plus longtemps, elle demanda à leur majordome Thomas de préparer la calèche. Elle irait au château voir s'ils étaient encore là.

La pluie tombait impitoyablement et Angélica pouvait entendre l'eau éclabousser à chaque fois que les roues de la calèche frappaient une flaque d'eau. Tendant la main par la fenêtre, elle sentit les gouttes de pluie froides sur sa paume. Cela aurait été si apaisant si elle n'avait pas été inquiète pour sa famille.

Lorsqu'ils arrivèrent devant le château, la calèche s'arrêta et Thomas vint lui ouvrir la porte. Il lui tint un parapluie au-dessus de la tête alors qu'elle descendait.

« Merci. » dit-elle, prenant le parapluie de ses mains.

Elle se dirigea vers l'entrée, évitant les flaques d'eau et la boue. Les deux gardes à l'entrée la regardèrent avec un froncement de sourcils alors qu'elle approchait. Ils se demandaient probablement pourquoi une dame comme elle était dehors si tard.

« Bonsoir, je suis Dame Davis. Je cherche mon père, le Seigneur Davis, et mon frère. »

« Bonsoir, ma Dame. Je suis désolé, mais nous n'avons pas le droit de laisser entrer quelqu'un après cette heure. » répliqua l'un d'eux.

« Les avez-vous vu entrer ou sortir ? » demanda-t-elle, se demandant s'ils reconnaissaient même son père, mais elle supposa que oui. « Un homme d'âge moyen et un garçon de dix ans ? » Elle continua ensuite à les décrire.

« Ma Dame. Beaucoup de gens entrent et sortent d'ici. » répondit le garde.

Angélica soupira, ne sachant pas quoi faire.

« J'ai vu le Seigneur Davis partir, mais il est parti seul. » se souvint l'autre garde.

Seul ? Qu'en était-il de son frère ? Alors, il devait encore être dans le château s'il n'était pas parti seul aussi. Espérons que non. Elle ne pouvait imaginer son frère seul dehors dans la pluie froide et l'obscurité.

« Je crois que mon frère pourrait être à l'intérieur. J'ai vraiment besoin de le trouver. » dit-elle.

« Je suis désolé ma Dame. Nous avons reçu l'ordre de ne laisser personne entrer. Vous devriez revenir demain. »

Comment pouvait-elle simplement rentrer quand son petit frère était porté disparu ?

Soudain, elle entendit des chevaux galoper dans la pluie derrière elle. Elle se retourna et vit trois hommes s'approcher sur leurs chevaux. Angélica les reconnut. C'était les hommes du roi, comme les gens aimaient les appeler. Deux d'entre eux elle connaissait leur nom. Le Seigneur Quintus et le seigneur Rayven.

Ils ralentirent à leur approche, puis s'arrêtèrent. Angélica leva les yeux vers eux depuis sous son parapluie et croisa le regard argenté du seigneur Quintus.

« Ma Dame. Qu'est-ce qui vous amène ici si tard ? » demanda le Seigneur Quintus, la surplombant du regard.

« Mon Seigneur, » Angélica fit une révérence. « Mon frère est venu ici pour étudier, et il n'est pas rentré à la maison. Mon père n'est pas rentré non plus. »

Le seigneur Quintus se tourna vers les deux autres hommes et ils se regardèrent comme s'ils échangeaient des mots non prononcés.

« Laissez entrer la Dame. » ordonna alors le seigneur Quintus aux gardes.

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