Récolter de la sympathie (2)

Su Xiaofei raconta alors soigneusement et lentement ce qui venait de se passer avant que les deux hommes ne parviennent à leur modeste demeure et comment ces deux femmes qu'ils avaient vues quitter le domaine plus tôt étaient l'ancienne amante de Su Haoran et sa fille.

Les deux hommes ne l'interrompirent ni ne lui posèrent de questions. Ils écoutaient seulement attentivement ce qu'elle disait. Su Xiaofei n'était pas sûre de la réaction de Maître Ouyang, mais voyant l'empressement de Yun Xiang à l'aider, elle et sa mère, sûrement que cette nouvelle parviendrait aux oreilles du Vieux Maître Yun.

Le Vieux Maître Yun était déjà dans la fin de la soixantaine et sa santé n'était pas aussi bonne qu'avant. Autrefois, Su Xiaofei avait entendu dire qu'il était décédé juste un mois après la mort de sa mère et les gens supposaient qu'il était mort d'un cœur brisé après avoir découvert que sa seule fille était décédée dans un accident sans avoir eu la chance de réparer leur relation en tant que père et fille.

« Leur visite soudaine n'était pas du tout attendue. Maman et moi n'avions aucune idée qu'elles viendraient aujourd'hui et supplieraient ma Maman de permettre à ma nouvelle Grande soeur de vivre avec nous. Je n'ai pas pu m'empêcher de dire des mots blessants envers elles et de les chasser une fois que l'hypertension de Maman a commencé à se manifester. Je sais que je n'aurais pas dû faire ça mais... »

« Il est normal de se sentir agité dans ces circonstances, Xiao Fei, mais ce serait mieux si tu pouvais contrôler tes émotions. Les mots peuvent facilement être dits, mais il serait difficile de les reprendre une fois que tu réalises que tu ne les pensais pas. » commenta Yun Xiang. Il regrettait que lui et Maître Ouyang ne soient pas arrivés plus tôt pour épargner à sa tante et à Su Xiaofei une telle rencontre.

Hélas, rien ne pouvait être fait maintenant. Le seul point positif qu'il pouvait voir était que sa Tante Qing et Xiao Fei étaient désormais conscientes de l'existence de la maîtresse et de l'autre fille de Su Haoran.

Yun Xiang savait que ses aînés, en particulier son grand-père, ne seraient pas contents s'ils apprenaient que sa Tante Qing et Su Xiaofei étaient traitées injustement de cette manière. Bien qu'il soit vrai que son grand-père et sa Tante Qing ne s'adressaient plus la parole, Yun Xiang savait pertinemment que son grand-père la regrettait terriblement.

« Enfant, Xiao Xiang a raison. Ce que tu as fait n'était pas bien, mais je ne te blâme pas de réagir de cette façon. Tu as eu l'impression que ta mère était intimidée par ces étrangers, et tu as ressenti cette urgence de la protéger. À l'avenir, tu ferais mieux de garder ton sang-froid et de ne pas discuter inutilement avec ce genre de personnes. » Maître Ouyang partagea ses réflexions.

« Je vous remercie de m'avoir écoutée, Maître Ouyang, Frère Xiang. Je me sens un peu mieux maintenant. » Su Xiaofei leur fit une révérence polie. « Je suppose que je devrais aussi parler à Maman et m'excuser pour mon attitude déplaisante plus tôt. »

« Ce n'est pas une mauvaise idée. Tante Qing a besoin de toi maintenant plus que jamais, Xiao Fei. Vous devriez toutes les deux rester fortes l'une pour l'autre. »

« Je le garderai en tête, Frère Xiang. »

Après une autre heure de conversation avec Su Xiaofei, les deux hommes partirent lorsque le soleil était sur le point de se coucher. Su Xiaofei les escorta à l'extérieur, son expression bien meilleure que lorsqu'ils étaient arrivés plus tôt.

« Je n'avais même pas remarqué qu'il se faisait tard maintenant. Xiao Fei, transmets nos salutations à ta mère. J'espère que nous pourrons la voir lors de notre prochaine visite. »

« Je le ferai, Maître Ouyang et merci d'avoir apporté les médicaments dont j'avais besoin. » répondit Su Xiaofei.

« C'est parce que j'ai entendu dire que tu n'étais pas encore allée voir Han Zijun. »

« J'ai l'intention de l'accompagner ce week-end avec Maman avant la reprise de mes cours, mais je suppose qu'elle préférera rester à la maison pour l'instant et se concentrer sur le travail. » dit-elle d'une voix solennelle, ce qui leur valut effectivement leur sympathie.

« Ne t'inquiète pas trop. Le problème passera avant que tu ne t'en rendes compte. » Yun Xiang lui tapota l'épaule avant de monter dans la voiture avec Maître Ouyang.

Su Xiaofei resta et regarda la voiture quitter leur domaine, satisfaite du résultat de sa rencontre avec Ye Mingyu et sa mère aujourd'hui. Elle avait également réussi à susciter la sympathie de Maître Ouyang et Yun Xiang.

Pour sa mère, elle devrait travailler davantage à semer la discorde entre elle et Su Haoran pour leur propre intérêt. Su Xiaofei était certaine que Ye Mingyu et sa mère n'accepteraient pas facilement la défaite et reviendraient pour leur causer plus de problèmes.

Lorsque Maître Ouyang et Yun Xiang arrivèrent au Domaine Yun, à une heure de la Ville de Qiying où résidaient Su Xiaofei et Yun Qingrong, ils trouvèrent le Vieux Maître Yun les attendant dans le salon.

En tant qu'homme issu d'une longue lignée militaire, Yun Guanyu, malgré son grand âge, avait une aura imposante qui empêchait les gens autour de lui de remettre en question son autorité. Lorsqu'il aperçut Yun Xiang, son expression se durcit, sachant que le jeune homme venait de rendre visite à sa fille éloignée qu'il n'avait ni vue ni parlée depuis des années.

« Je suppose que tu as rencontré cette fille personnellement cette fois-ci ? » demanda-t-il directement à Maître Ouyang, qui avait pris place en face de lui, tandis que Yun Xiang s'excusa, sachant que son grand-père voulait être laissé seul avec Maître Ouyang.

Maître Ouyang humma et se versant une tasse de thé fraîchement infusé.

« Nous sommes venus juste à temps pour assister à un drame. Il semble que ta fille rentrera bientôt à la maison. »

Yun Guanyu émit un ricanement et détourna le regard. Il savait que Su Haoran n'était pas un bon parti pour sa fille et quant à ce que Qing'er voyait chez cet homme pitoyable, il ne voulait plus y penser.

« Tu as cependant une petite-fille très intrigante. Bien qu'elle ne soit pas la vraie fille de Qing'er, sa personnalité est complètement différente de ce que les rumeurs laissaient entendre. » Maître Ouyang se réjouit.

« Ah ? Comment ça ? »

« Où peut-on trouver une jeune femme capable de chasser une maîtresse ? »