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Quelque chose a changé entre ces deux-là.

« Des rumeurs sur ta perte de connaissance d'hier ? » Dit avec curiosité Mari.

« Oui, des rumeurs qui accuseraient le Chef Kobayashi d'en être la cause... » Précisa Hana. « Si possible, j'aimerais rétablir la vérité si elle a été déformée... »

Mari sembla soucieuse, et Yuuto en profita pour s'incruster dans la conversation en s'asseyant avec elles à une des tables de la salle de pause.

« Shinohara-chan, t'es sûre que le Chef t'oblige pas à t'occuper de cette rumeur contre ton gré ? » S'enquit-il.

« Non… Il me l'a demandé, mais il m'a laissé le choix... » Dit la jeune femme. « Et c'est ce que j'aimerais faire... »

« Mais pourquoi ? » Demanda Yuuto. « Il t'y a pas obligé, d'accord. Mais il a quand même été infect avec toi... »

Mari tapota l'épaule de Yuuto plusieurs fois en souriant avec un air lasse.

« Ça, tu n'as pas besoin de le savoir... » Dit-elle.

« Même si le Chef a été un vrai enfoiré avec elle ? » Chuchota Yuuto.

Mari hocha de la tête. Le moins Yuuto essayait d'en savoir, le mieux il se porterait. Après tout, il était totalement immunisé aux charmes féminins, comme il était toujours ignorant à propos de ce qui se passait autour de lui. Ce qui était un énorme contraste, par rapport à l'attitude très informée de Ren.

« Vous pensez vraiment pouvoir vous rapprocher de lui en acceptant de l'aider à dissiper ce malentendu ? » Dit-il.

Si l'homme élégant était psychologiquement rigide, il était aussi toujours au courant de tout ce qui se passait. Hana se demandait si tout savoir impliquait notamment de savoir aussi quelle était la personne que Mari portait dans son cœur. S'il le savait, il avait probablement gardé cela pour lui, au lieu d'exposer la situation aux yeux de tous.

« C'est vrai que nous sommes partis du mauvais pied, avec le Chef, » concéda Hana. « Mais j'espère sincèrement lui montrer que je ne suis pas quelqu'un de mauvais... »

« Hum hum, ce n'est pas forcément le résultat final qui importe, mais la façon d'y parvenir, » l'encouragea Mari.

« La façon d'y parvenir peut être semée d'embûches, » la contra Ren. « Il en faut peu pour que les intentions de quelqu'un soient mal interprétées. »

« Sois pas pessimiste le vieux ! » Le réprimanda Mari. « C'est pas comme si la situation était idéale pour commencer, donc ça ne peut que s'améliorer ! »

Ren ne dit rien, mais son hésitation était tout de même visible sur son visage. Il était inquiet au sujet de quelque chose, mais n'osait pas dire à propose de quoi. Peut-être trouvait-il ridicule de faire part de ses craintes, ou peut-être pensait-il que ça n'en valait pas la peine d'en parler.

Il ne s'attarda pas avec ses trois collègues, et retourna rapidement s'asseoir à son propre bureau pour continuer à traiter des dossiers ; laissant Mari, Yuuto et Hana derrière lui.

Yuuto sortit alors son smartphone pour commencer à jouer à un jeu de rythme dessus, ce qui permit à Hana et Mari de continuer tranquillement leur conversation.

« Hum, pour répondre à ta question, il y a bien des rumeurs qui circulent, » soupira Mari. « Ren les as aussi captées avec ses antennes de roi des ragots, et il semble que non seulement le Chef Kobayashi est considéré comme fautif, mais que toi aussi, on te traites de personne trop faible qui ne sait pas prendre des reproches et qui s'évanouit pour un rien. »

« C'était une réaction allergique... » Plaida Hana. « Comment la version des faits a-t-elle pu changer à ce point ? »

« L'amusement des gens : plus ça s'éloigne de la vérité, et plus c'est distrayant, » soupira à nouveau Mari avec une voix las. « Ça les amuse trop de voir les choses comme ça les arrange… »

Puis, mettant sa main sur celle d'Hana, Mari lui sourit.

« Mais ne te décourages pas pour si peu ! » l'encouragea et la rassura Mari. « Je te soutiens à 100 %! »

« M-Merci... » répondit timidement Hana.

La femme plus âgée trouvait probablement cathartique le fait d'encourager Hana et de suivre sa progression sentimentale ; étant donné que Mari elle-même n'osait pas approcher la personne pour qui elle avait des sentiments. Peut-être qu'elle s'était résignée, depuis le temps, à cause de sa propre gêne et de sa situation personnelle. C'était déjà dur d'être mère célibataire, et encore plus de travailler en même temps. Alors entretenir une relation amoureuse avec quelqu'un, c'était un peu une sorte de mirage inatteignable qu'elle n'osait plus considérer comme envisageable.

Peut-être que pour soulager sa soif de romance, Mari soutenait Hana pour la voir réussir là où elle, avait échoué.

Après tout, Mari pouvait toujours voir cette personne tous les jours, détailler ses mouvements et son comportement, et même lui parler. Être en sa présence lui suffisait amplement, et la rendait heureuse. C'était mieux ainsi, d'avoir une attirance non réciproque, en secret. Comme ça, personne n'était blessé, et elle pouvait fantasmer sur tous les possibles en toute tranquillité.

C'était peut-être grâce à toutes ces années passées à admirer quelqu'un en secret, que Mari avait compris dès le départ qu'Hana avait des sentiments pour quelqu'un. Elle avait vu les regards insistants de la jeune femme, ses sourires récurrents et toujours un peu nerveux quand elle croisait les yeux du Chef Kobayashi, ou encore la légère couleur rosée qui s'emparait de ses joues et de ses oreilles quand elle arrivait à voler un regard vers l'autre homme.

Au départ, elle s'en était étonnée et s'en était sentie intriguée.

Une jeune femme intéressée par un type plus vieux qu'elle ? Est-ce que c'était réel, ou juste une façon de se rapprocher d'un supérieur hiérarchique pour se faire bien voir ?

Elle savait que le Chef Kobayashi n'était pas du genre à tomber pour ce genre de tactique, et que si c'était là l'objectif de la jeune femme, elle abandonnerait d'elle même quand elle se rendrait compte que sa cible n'était pas affectée par ses avances. Leur Chef de Section financière était comme cela ; il ne s'intéressait à personne en particulier, et ne cherchait pas à se mêler de ce qui ne le regardait pas.

Pour avoir travaillé les 3 dernières années sous sa direction, Mari avait appris beaucoup de choses à propos de cet homme qui refusait de dire quoi que ce soit sur lui, et se comportait comme un véritable tyran au cœur de glace. La seule température sociale qu'il connaissait était le zéro absolu, qui se transformait en blizzard lorsqu'une erreur était commise ou que quelqu'un n'était pas assez professionnel. Il avait une façon de traiter tout le monde avec la même froideur, à l'exception près d'Ogawa Saizo, son subordonné direct. Les deux hommes avaient montré à plusieurs reprises qu'ils se connaissaient déjà avant de travailler à Marline, et Mari soupçonnait même qu'ils avaient fait une partie de leur scolarité ensemble.

C'était donc avec calme que Mari avait observé les interactions entre Kobayashi Shinsuke et Shinohara Hana. Avec les premiers jours passés, elle avait bien compris que la jeune femme était plus que sérieuse dans son affection pour l'homme bien plus âgé qu'elle ; et Mari ne pouvait que respecter – peut-être même admirer - sa ténacité.

Qui plus est, Mari soupçonnait aussi Ogawa Saizo de se délecter de la situation actuelle ; à voir le sourire amusé qu'il dissimulait parfois à son ami. Tous les deux auraient presque pu tenir des paris sur ce qui allait se passer entre Shinsuke et Hana ; s'ils l'avaient voulu.

L'incident d'hier n'était qu'un énième rebondissement dans cette affaire, et la collègue plus âgée d'Hana espérait que cela pourrait faire changer pour le mieux la relation entre ces deux-là.

Certes, elle était un peu déçue que le Chef Kobayashi demande à Hana de rectifier les rumeurs à leur sujet ; mais elle sentait aussi qu'il y avait eu une sorte de progrès.

Kobayashi Shinsuke, demandant un service à quelqu'un ? Qui plus est quelqu'un qu'il avait l'air de détester ?

C'était nouveau, et plus que surprenant.

Non… Peut-être que ce qui était encore plus surprenant que cela, était le comportement ce lundi matin dudit Chef Kobayashi.

Avec amusement, Mari continuait de l'observer discrètement.

À chaque fois qu'Hana avait le nez collé à son écran d'ordinateur, le Chef semblait lever la tête au-dessus de la cloison pour l'observer sans qu'elle s'en doute. Puis, dès qu'Hana relevait un peu trop la tête, les yeux et la tête du Chef disparaissaient comme un chien de prairie apeuré rentrant dans son terrier.

Même quand la jeune femme se levait pour aller chercher des documents, faire ds photocopies, ou aller faire des boissons pour ses collègues, les yeux du Chef de Section acariâtre continuaient de suivre Hana. Certes, il avait les sourcils froncés et semblait avoir une expression courroucée, mais ayant l'expérience des années passées pour déchiffrer ses expressions, Mari savait qu'il était plus curieux qu'en colère envers Hana.

Pour ajouter du ridicule à la situation, Hana ne se doutait pas du tout du regain d'attention que lui accordait le Chef Kobayashi, et entravait même ses observations en bougeant beaucoup trop dans tout l'étage et en se tournant parfois dans sa direction.

Ah, c'était tout bonnement hilarant, même si Mari se disait qu'elle devrait éviter de rigoler ouvertement, et plutôt continuer d'encourager silencieusement la jeune interne.

Cependant, si l'ambiance avait été plutôt tranquille et détendue toute la matinée jusqu'à la pause de 10 heures, un sentiment de tension avait rapidement envahi l'air.

Alors que Yuuto continuait de jouer à son jeu de rythme, et Hana à boire son café, Mari laissa errer son regard vers le bureau occupé par le Chef Kobayashi. Ce dernier, les sourcils froncés, observait quelque chose de l'autre côté de la pièce, et suivant son regard, Mari comprit qu'il avait aperçu quelque chose qui lui déplaisait.

Devant les portes de l'ascenseur se refermant, se tenait le nouveau Directeur du Département Catastrophes Naturelles ; et Mari étouffa un petit rire.

Le Chef Kobayashi semblait mécontent de voir le jeune homme s'aventurer dans leur étage, même s'il était leur supérieur hiérarchique à tous. Le jeune homme avait déjà passé beaucoup de temps en compagnie d'Hana, et Mari savait très bien où les choses allaient déraper.

Si le Chef Kobayashi s'intéressait soudainement avec plus de sincérité à Hana, il semblait aussi qu'il avait contracté une maladie incurable pour toute personne s'intéressant à autrui : la jalousie.

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