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Chapitre 37 : Début Mai 1567, Partie 3

Comme si cela avait été calculé, un messager de Nobunaga arriva juste après que Shizuko ait fini de manger le tempura.

Le message lui disait de se rendre au lieu désigné immédiatement.

Elle se nettoya rapidement et se rendit à l'endroit désigné. Cela lui avait pris environ cinq minutes.

Nobunaga était déjà arrivé, il était en train de l'attendre assis sur une souche d'arbre.

"E-Excusez mon retard."

Shizuko s'approcha rapidement de Nobunaga en baissant la tête.

Cependant, Nobunaga n'en tint pas rigueur, et après un bref regard, lui donna un ordre d'un geste du menton.

Ayant compris qu'il voulait qu'elle s'assoie, Shizuko choisit un endroit qui la mettrait plus bas que Nobunaga.

Shizuko regarda plus attentivement et remarqua que Nobunaga était seul. Non seulement ses koshō, mais même son umamawari et ses généraux subalternes n'étaient pas là.

Il était assis face à elle, seul.

"Tu vas répondre à mes questions et tu ne diras que la vérité."

Ce n'était pas que le ton de sa voix qui était tranchant, son regard, son expression et même son aura donnaient l'impression d'être capables de couper.

Son corps dégageait une aura aussi tranchante qu'un sabre. Exposée à cela, Shizuko corrigea instinctivement sa posture.

Est-ce, est-ce que c'est ça, le vrai Nobunaga… ?

Shizuko avait souvent lu des phrases comme "les serviteurs de Nobunaga étaient intimidés par sa simple présence" dans la littérature, mais elle avait toujours pensé que cela était une exagération.

Mais aujourd'hui, elle était assise devant Nobunaga et elle réalisa que ces récits n'étaient pas exagérés.

Pour être honnête, elle avait envie de s'enfuir sur-le-champ.

"Shizuko, tu n'es pas de ce monde, n'est-ce pas ?"

Cela fut davantage une déclaration qu'une question.

Soudainement frappée par la franchise de Nobunaga, combinée à son aura,

l'esprit de Shizuko cessa de fonctionner.

"… !!"

"Laisse-moi être plus précis. Tu n'es pas née durant cette période de conflits. Tu ne viens pas du Nanban non plus. C'est quelque chose de différent… ou plutôt un endroit différent. Dans tous les cas, tu n'es pas née dans ce Hinomoto."

"Eh, ah, euh…"

"Tu peux répondre simplement par [oui] ou par [non]. Ne t'inquiète pas, tant que tu ne mens pas, je ne te couperai pas la tête."

D'un autre côté, ses paroles pouvaient être interprétées comme disant que s'il pensait que Shizuko ment, il la décapiterait.

Mais Nobunaga était convaincu que Shizuko répondrait [oui] parce qu'il n'avait pas amené ses hommes avec lui.

"… Oui."

Shizuko se résigna.

Aucune preuve n'avait été présentée, mais Shizuko pensait que Nobunaga avait une preuve qui l'avait mené à cette conclusion.

En fait, Nobunaga n'avait montré aucune réaction face à la réponse de Shizuko, comme si cela avait été évident.

"Hum, c'est bien ce que je pensais."

"Euh… si cela ne vous dérange pas, quand l'avez-vous réalisé ?"

Shizuko posa timidement cette question à Nobunaga qui se caressait le menton.

Elle avait prêté une attention méticuleuse à son environnement et essayé de se comporter de la même manière qu'une personne de l'époque Sengoku.

Cependant, elle était la seule à penser qu'elle s'était fondue dans le décor.

"Je ne peux pas imaginer l'argent et les efforts qu'il avait fallu pour te donner autant de connaissances. Si l'on prend cela en compte, il est impossible que quiconque te laisse tranquille. Et je ne vois aucune influence des moines sur toi. Tu ne loues pas les enseignements du Bouddha mais tu ne les méprises pas non plus. Et pour couronner le tout, j'avais pensé que tu était indifférente vis-à-vis de l'argent mais tu le dépenses insouciamment pour répandre tes techniques."

"Eh, euh…"

"Tu n'as toujours pas compris ? Ton existence elle-même est étrange. Tu fais attention à ne pas nous dire quand, où et qui t'a enseigné toutes ces technologies mais tu ne te retiens pas à les enseigner et tu ne demandes rien en retour."

"C'est, c'est parce que je voulais vous aider, mon seigneur…"

"Peu importe."

Nobunaga coupa brusquement Shizuko avant qu'elle ne se mette à sortir des excuses.

"Tu n'as jamais demandé quoi que ce soit en retour. Toutes tes requêtes étaient des choses qui me bénéficiaient. Je n'ai rien vu qui pouvait te profiter."

Selon Nobunaga, il n'y avait aucun désir personnel dans les choses que Shizuko lui avait demandées.

Durant l'époque Sengoku, lorsqu'un vassal avec plusieurs années de service accomplissait quelque chose, il était naturellement récompensé par le seigneur.

Si le seigneur négligeait de faire cela, il y aurait naturellement de l'aliénation, de la trahison, ou de la défection pour un autre seigneur. Et cela pouvait s'appliquer dans l'autre sens.

Si un vassal n'était pas suffisamment performant, il serait durement critiqué voire même expulsé.

Mais Shizuko n'était ni avide ni difficile à satisfaire ni irresponsable.

Elle faisait ce qu'on lui ordonnait en silence. Et ses succès ne lui donnaient pas la grosse tête.

Elle avait accompli de nombreux exploits en seulement deux ans de service mais elle ne demandait rien à moins que Nobunaga ne fasse tout son possible pour la récompenser.

D'une certaine manière, Nobunaga en était effrayé.

"Et… il y a encore une chose. Peu de temps avant que je te trouve, j'avais rencontré une mystérieuse vieille femme."

"Une… une vieille femme ?"

Nobunaga hocha légèrement la tête.

"Oui, c'était sur le retour de l'étang de Korei. Un épais brouillard m'avait soudainement enveloppé et je ne pouvais plus différencier la gauche de la droite. Alors que je regardais attentivement autour de moi, une vieille femme était soudainement apparue devant moi. Cette femme avait ignoré ma surprise et avait dit : "Le [sabre] amènera le [bâtard du temps]"."

"Le [bâtard du temps]… ?"

"Un bâtard est un enfant illégitime d'une lignée. Le « temps » est souvent utilisé pour décrire les époques, alors elle avait peut-être dit ce mot dans ce sens. En d'autres termes, si les mots de cette vieille femme sont corrects, il serait logique de penser que tu es quelqu'un qui est né dans une époque différente de la nôtre. Cependant, si je racontais cette histoire à quelqu'un, il penserait probablement que je suis devenu fou."

Nobunaga cracha ces mots avec un sourire amer comme s'il avait vraiment essayé d'en parler à quelqu'un.

"Quoi qu'il en soit, mes doutes ont été dissipés. Tant que tu tiendras ta promesse, je protégerai ta vie. Par conséquent, tu vas continuer de me montrer tes talents."

Shizuko hocha profondément la tête suite à ces mots et regarda le visage de Nobunaga.

Le Nobunaga qui se tenait devant lui n'était plus celui à l'aura aussi tranchante qu'une lame mais celui au charisme incommensurable.

***

Étonnamment, Nobunaga ne l'avait pas forcée à lui remettre toutes ses connaissances.

Il lui avait ordonné de continuer de travailler comme elle l'avait fait jusqu'à présent.

Cela était apparemment une mesure pour éviter la méfiance des autres en raison de son changement soudain d'attitude envers Shizuko.

Mais ce n'était pas comme si rien n'avait changé.

"Je vais t'attribuer le titre de [conseillère du clan Oda]. Tu utiliseras tes connaissances et ta vivacité d'esprit pour me servir."

Shizuko avait reçu la position de [conseillère du clan Oda].

Bien que le nom était différent, Shizuko pensait que cela était basiquement un Otogishu1, mais elle avait décidé de vérifier au cas où.

Il n'était pas rare pour Nobunaga d'inventer de nouveaux postes.

"Monseigneur, quel genre de poste est celui de conseiller du clan Oda… ?"

"Ce n'est pas vraiment différent de ce que tu fais actuellement. Tout ce que tu as à faire est de répondre à mes questions et d'obéir fidèlement à mes ordres. L'autorité que tu recevras dépendra des circonstances. Cependant… considérant l'avenir, il ne serait pas sage de compter uniquement sur les loups pour ta protection. Je te donnerai 500 soldats et un umamawari."

"Hein ?! Ah, oui… j'accepte. Euh… puis-je utiliser ces soldats de la manière que je souhaite?"

"Oh ? Tu as déjà quelque chose en tête ?"

"Au Nanban, il y avait une nation, l'empire romain, ses soldats n'étaient pas seulement doués au combat… ils étaient également spécialisés dans la construction de villes. Je veux utiliser cela comme exemple pour créer une unité spécialisée dans l'ingénierie civile et la construction, une unité qui sera à la fois des soldats et des kurokuwa."

Kurokuwa (littéralement "houe noire") était le terme couramment utilisé pour désigner les ingénieurs civils de l'époque Sengoku à l'époque d'Edo.

Ils étaient incorporés dans l'armée en tant que kurokuwa-shū et effectuaient des travaux d'ingénierie stratégiques tels que la construction de camps ou de ponts.

Les kurokuwa-shū étaient également chargés des travaux d'après-guerre tels que le rassemblement et l'enterrement des cadavres. Un groupe de kurokuwa du district de Chita, en Owari, était particulièrement célèbre pour sa contribution à l'agriculture.

Shizuko voulait créer une unité d'ingénieurs combattants capables d'améliorer les infrastructures sociales telles que l'ingénierie civile, le contrôle des eaux, le développement de nouveaux champs de riz et la construction de routes dans les autres régions.

Naturellement, comme ces soldats servaient à sa protection, ils seraient également capables de se battre dans une certaine mesure.

Cependant, elle avait pour principe [l'homme sage ne s'approche pas du danger]. Si une situation devenait dangereuse, ils se replieraient immédiatement sans tenir compte de la différence de puissance.

"J'aurais également besoin de temps pour consolider mes fondations."

"Pourquoi ?"

"Niccolò Machiavelli, un diplomate de la république de Florence, un pays du Nanban, avait dit une fois : [La chose la plus importante à garder à l'esprit pour ceux qui héritent soudainement d'un poste de pouvoir ou de quoi que ce soit de la sorte est avant tout de poser les bases immédiatement]. Je n'ai jamais dirigé des centaines de personnes à la fois, alors je dois d'abord réfléchir à un système pour gérer ces soldats qui seront la fondation."

Shizuko regretta rapidement d'avoir cité casuellement le nom et les enseignements de Nicolas Machiavel.

La main sur la bouche, elle tourna son regard vers Nobunaga qui, comme prévu, arborait un grand sourire.

Mais pour Shizuko, ce sourire était malicieux.

"De sages paroles. Tu sais ce que je vais dire ensuite à propos de ce Nikkoro Makyaberri, n'est-ce pas ?"

"O-Oui."

Shizuko avait compris qu'elle allait devoir donner une copie du [Prince] à Nobunaga.

Dans le monde moderne, il était considéré comme le fondateur de la science politique objective et moderne, mais durant l'époque Sengoku, située à l'époque de la Renaissance, il avait été ajouté à la liste d'ouvrages bannis par l'Église catholique et brûlé durant la Contre-Réforme.

Machiavel lui-même avait été fréquemment accusé d'être un [auteur de vices qui se délectait de la trahison] et le [Prince] avait été traité avec dédain jusqu'à sa réévaluation au XVIIIe siècle.

Le [Prince] était rempli de controverses aux yeux de la moralité et de la religion de l'Europe médiévale.

Mais Nobunaga ne s'en préoccupait absolument pas.

"Les Nanban peuvent garder leur moralité pour eux. J'ai le sens des valeurs du Hinomoto."

***

Après cela, les questions de Nobunaga continuèrent.

Le contenu de ses questions était varié, allant des histoires personnelles telles que les vêtements que Shizuko portait habituellement, le type de nourriture qu'elle aimait, si sa famille était encore en vie et si ils lui manquaient, aux questions sociopolitiques telles que le type de système politique de l'endroit où elle vivait, comment ils géraient leur armée, leur taille, la variété des armes, s'ils étaient attaqués par un autre pays et comment ils se défendraient en cas d'attaque.

Et il ne se contenta pas d'écouter ses explications :

[La démocratie prend le risque d'élever un dirigeant aussi stupide que le reste de la population.]

[L'éducation obligatoire est un bon moyen d'apporter les bases mais elle enterre également les élites. Ceux qui ont du talent devraient recevoir un meilleur environnement.]

[C'est bien d'établir une Constitution et des lois, mais les sanctions ne sont-elles pas trop légères ? Simplement emprisonner ceux qui s'enrichissent en détournant l'or de la nation est particulièrement inacceptable, ils devraient directement être décapités.]

[Ces mais-dit-ah de masse qui n'assument pas la responsabilité de ce qu'ils disent devraient être détruits. Peu importe s'ils pensent qu'ils ont raison, l'incompétence n'a aucune valeur dans la société. Au contraire, elle est nuisible.]

[Nous n'avons pas besoin de bons à rien qui méprisent les autres artisans. Il en va de même pour les artisans arrogants. Ils n'ont aucune valeur s'ils refusent de se perfectionner tout au long de leur vie.]

À chaque fois qu'il considérait quelque chose comme un problème, il énonça impitoyablement son opinion.

On pouvait attribuer cela au fait que leur sens des valeurs et leurs points de vue sur la vie et la mort étaient différents, mais du point de vue de Nobunaga, le monde de Shizuko, où même les incompétents et les imbéciles pouvaient vivre, semblait étrange.

Mais Nobunaga ne s'était pas limité à simplement penser que cet autre monde était étrange.

"Si l'on crée un endroit dont personne n'y prête d'attention, le peuple ne s'en approchera pas tandis que les criminels s'y installeront. Cette théorie de la vitre brisée pour lutter contre cela… c'est vraiment bien pensé."

"Dans mon pays, ils installaient un poste de sécurité là où ils en avaient besoin et y postaient quelques personnes. Ils patrouillaient dans une zone fixe et réprimaient les violations mineures de l'ordre."

"Hum, ce n'est pas une mauvaise idée. Analysons cela immédiatement. Si cela fonctionne, nous pourrons nous en servir contre les agents secrets."

… Je suis fatiguée… mais…

Shizuko poussa un profond soupir.

Au début, Nobunaga ne lui avait posé que des petites questions sur sa vie, mais il avait graduellement étendu la gamme de sujets de conversation et avant qu'elle ne le remarque, Shizuko était en train de décrire le Japon dans lequel elle vivait.

Pendant un moment, elle se demanda si Nobunaga cherchait à lui soutirer toutes ses connaissances, mais quand elle vit le visage de celui-ci, elle réalisa qu'elle avait tort.

Ses yeux insouciants étaient semblables à ceux d'un enfant curieux, son sourire était honnête et sa curiosité pleine d'énergie. Il n'y avait aucune trace de motif secret, seulement une curiosité sincère qui pouvait facilement charmer les gens.

Shizuko se demanda si c'était ainsi que les garçons se comportaient lorsqu'ils admiraient quelqu'un.

"Castrer les chevaux est une bonne idée. Cela supprime leur tempérament et les rend plus facile à gérer, et même s'ils sont capturés par l'ennemi, ils ne pourront pas s'en servir pour la reproduction et ils ne s'excitent pas durant la saison des amours. Les guerriers ont tendance à préférer les chevaux sauvages mais nous devrions nous débarrasser de ce genre d'idioties. Quant à ces fers à chevaux… hum, cela vaut la peine d'y réfléchir."

"… Hum, désolée de vous interrompre dans vos pensées, mais je pense que nous devrions vite retourner au domaine. Le soleil va se coucher dans environ une heure."

Nobunaga leva les yeux vers le ciel comme s'il ne l'avait pas remarqué jusqu'à maintenant.

Le soleil était à l'ouest. Voyant qu'il ne lui restait plus qu'une ou deux heures avant qu'il ne se couche complètement, Nobunaga se leva silencieusement et s'épousseta.

"Tu as raison. Rentrons."

"O-Oui !"

Shizuko se leva à son tour en poussant un soupir de soulagement. Elle s'épousseta en pensant qu'elle avait enfin été libérée.

Mais cette douce pensée ne dura pas longtemps. Alors qu'elle se levait, Nobunaga lui dit en souriant :

"Nous reprendrons notre discussion après le dîner."

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