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Chapitre 9 : Mèche blanche.

Alors qu'Armand et le vieil homme s'éloignaient en direction de leur maison, Saukel, le marchand d'esclaves, continuait de mettre en valeur ces captifs qu'il considérait comme sa propriété. Devant la foule de nobles qui l'acclamait et lui demandait son attention pour en acheter un, il exposait ses marchandises. 

Soudain, un véhicule luxueux, noir et orné d'or, arriva depuis le centre de la cité. Sur une de ses portes, un symbole stylisé représentant un "B" majuscule à l'intérieur d'un soleil était visible. Les portes arrière s'ouvrirent, laissant apparaître deux hommes vêtus de noir, coiffés de chapeaux ronds. Ils déroulèrent un petit tapis rouge devant la porte centrale, où se trouvait le même symbole.

Un homme âgé, vêtu d'un costume bleu et coiffé d'un chapeau rond, sortit du véhicule. Il se tenait droit, appuyé sur une canne en or, qui ne servait à rien si ce n'est pour montrer sa richesse, marchant sur le tapis. La foule s'écarta, subjuguée. Il était évident que cet homme était connu des nobles, qu'il ignorait avec arrogance. Il s'approcha de Saukel et le salua avec grâce. Le marchand, tremblant et bégayant, ne s'attendait visiblement pas à une visite aussi prestigieuse dans ce modeste marché lugubre.

Cet homme est Edgar Baring, patriarche de la famille Baring, l'une des plus riches de Primis. Créateur de la seule et unique banque de ce monde, il est une figure emblématique. Son fils, moins célèbre, possède trois casinos à travers le monde, dont le plus important se trouve à Risoria, la cité de la fête.

"C'est... Edgar Baring ? Que fait-il dans un endroit pareil ?" S'interrogea un noble. 

"Je ne sais pas, mais il est bien plus imposant que ce qu'on m'avait dit," répondit un autre noble de la foule.

"Monsieur... Monsieur Baring ! Quelle joie de vous voir... ici," s'exclama un peu maladroitement Saukel.

"Si ma mémoire est bonne, vous êtes Sir Saukel, c'est bien ça ? Cela fait trois ans depuis mon dernier achat chez vous," dit Edgar Baring d'une voix calme et assurée.

Le marchand se souvint que cet homme avait acheté une dizaine d'esclaves pour ses propriétés et sa famille par le passé. Il se demanda pourquoi il était revenu après un tel achat et lui posa la question d'une voix intimidée.

"Qu'est ce qui amène une personne telle que vous ici, monsieur Baring ?"

"J'ai besoin de nouvelles mains-d'œuvre," lui répond-il.

"Avez-vous encore les esclaves que vous avez achetés la dernière fois ?" Demanda Saukel.

Edgar ferme les yeux et se place derrière Saukel pour examiner ce qu'il propose. Il répond en même temps qu'il a dû éliminer six d'entre eux : l'un était malade, et les autres ont eu l'indécence, selon lui, de le supplier de les guérir au lieu de travailler. La foule se tait en entendant ce discours, tandis que les deux hommes de main surveillent la scène, prêts à intervenir en cas de problème avec Baring. Saukel ravale sa salive et essaie de trouver d'autres sujets de conversation.

"Je... je vois. Et comment va votre petit-fils ? Il a doit déjà être adulte aujourd'hui, j'imagine !"

"Mon petit-fils ?" Glousse-t-il, "vous voulez parler d'Hector ? Ce garnement suit le même chemin que son père. Il passe son temps au casino à Risoria et utilise son argent uniquement pour s'amuser. Son addiction aux jeux finira par causer sa perte, mais cela ne sera pas mon problème. Je l'avais déjà averti maintes fois. La dernière fois que je l'ai vu, il m'a même dit qu'il venait d'acquérir une tour pour s'y installer je ne sais pourquoi. Il souhaite également financer un ancien événement de Risoria qu'il veut, selon lui, remettre au goût du jour. Ce gamin n'a aucune notion de l'argent."

L'homme s'approche de la cage où Saukel a mis en valeur les deux prisonniers plus tôt. Il les fixe avec intérêt. Le premier possède un corps robuste et semble doté d'une force physique impressionnante. Quant à la deuxième, il s'interroge sur le fait que son visage soit caché sous une cape à capuche. Cependant, au vu de son corps, bien que très sale et égratigné, elle pourrait être utile.

"Dites-moi, Sir Saukel, pouvez-vous enlever ce piètre tissu qui cache son visage ? Ces deux énergumènes m'intéressent beaucoup," demanda le banquier.

Saukel sursaute à la demande d'Edgar et semble réticent à l'idée de faire une telle chose. L'homme insiste, affirmant qu'il n'achètera pas un bien s'il ne pouvait pas voir son visage. Pendant ce temps, l'esclave enchaîné aux côtés de la fille entend toute la scène et regarde vers elle. 

Il distingue ses yeux cachés dans l'ombre, pétrifiés de peur et au bord des larmes, comme si elle appréhendait ce qui allait se passer si cet homme l'achetait. L'homme enchaîné a alors une idée, sa main gauche est assez proche d'elle, et il commence à gigoter dans tous les sens.

La foule s'agite, et Edgar, prêt à accepter malgré ce détail, se retourne vers la cage pour voir ce qui se passe.

"Bon sang, qu'est-ce qu'il lui prend à cet Arubéen de malheur !" grogna Saukel.

L'homme enchaîné continue de se débattre, sa main gauche se rapprochant peu à peu de la fille, qui reste immobile dans la cage. Saukel crée un fouet avec la magie et ordonne à l'homme d'arrêter sa folie tout en le frappant. Malgré les coups, il continue de se débattre comme un fou. Les chaînes s'étirent légèrement, mais bien trop peu pour se briser, ce qui n'était pas son but de toute façon.

Après quelques instants à continuer de se débattre, sa main parvient enfin à saisir la cape de la fille. D'un coup sec, il lui tire la capuche pour révéler son visage à la foule et au vieux banquier. La fille semble avoir une tête tout à fait normale : elle est belle, avec des yeux couleur noisette et des cheveux châtains longs, attachés pour rester cachés sous la capuche qui n'est maintenant plus sur sa tête. 

Cependant, la foule ne voit pas les choses de cette façon. Choquée par cette révélation, la plupart des gens reculent, se cachant les yeux ou la bouche. Cette fille possède une particularité : une mèche de ses cheveux est totalement blanche. Saukel frappe l'Arubéen avec plus de force, le maudissant d'avoir révélé son visage devant un homme comme Baring. 

Celui-ci avance vers la cage, la regardant avec une étrange fascination. Il laisse tomber sa canne et se tient aux barreaux pour l'observer de plus près, ses hommes de main lui suggérant de ne pas s'approcher.

"Cette mèche... Trouver un Arubéen dans une foire d'esclaves n'est pas si exceptionnel, mais ça... quelle merveille !" S'exclame Edgar avec fascination.

L'homme enchaîné écarquille les yeux, ne comprenant pas sa réaction. Il devrait être terrifié devant elle, mais c'est tout l'inverse qui vient de se produire : il est fasciné et encore plus intrigué qu'auparavant.

"Les Mèches Blanches étaient l'une des tribus les plus anciennes de Primis. Votre force et votre connexion à la magie sont étrangement supérieures à celles de tout autre être vivant. Mais votre naïveté et votre passivité vous ont conduite à votre perte. J'arrive même à ressentir ce fameux sceau qui sert à brider cette fascinante connexion à la magie que vous possédez depuis des générations. Je n'aurais jamais cru avoir la chance d'en voir une de mon vivant. Il reste tellement peu de personnes de cette espèce. Ce serait une honte si je laissais passer une telle occasion ," expliqua Edgar Baring.

Il lâche les barreaux, reprend sa canne au sol, puis se retourne et avance en direction de Saukel. Il lui demande de réserver ces deux-là pour lui et propose une somme d'un million de pièces pour la fille, alors que Saukel était sur le point de lui proposer les deux pour seulement cent mille pièces. Bouche bée, Saukel ravale une nouvelle fois sa salive, mais n'en dit rien et lui serre la main recouverte d'un gant de soie. 

Les deux hommes se sont alors mis d'accord pour se revoir la semaine prochaine afin d'effectuer l'échange. Edgar repart en direction de son véhicule, marchant à nouveau sur le tapis menant à sa porte. Il est interpellé par un de ses hommes de main, qui lui demande si c'était une si bonne idée de dépenser autant pour une Mèche Blanche. 

L'homme s'arrête, le regard froid, et commence à retirer son gant de sa main droite, faisant attention à ne rien toucher avec sa main. Il s'approche de son serviteur, qui ne comprend pas, et lui attrape fermement l'oreille. La foule choquée de cette scène essaie de ne dire aucun mot, car le deuxième garde les surveille toujours, malgré ce qu'il se passe et les supplications de l'homme.

"Veuillez... Veuillez m'excuser, maître Baring. Je ne pensais pas ce que j'ai dit !" Implora l'homme de main des Baring.

C'est alors qu'une aura dorée illumine la main d'Edgar, et l'oreille de l'homme commence à se recouvrir d'or, avant de continuer sur son visage et sa bouche, le faisant taire complètement. Tout son corps et ses vêtements se changent en or, jusqu'à ce que l'homme ne devienne qu'une simple statue dorée. 

Edgar le relâche et le pousse à peine, assez pour qu'il tombe sur le dos, la statue s'éclatant sur le sol, éparpillant de l'or partout aux pieds des nobles. Sans un mot, Baring remet son gant et monte dans le véhicule sans fermer la porte, lançant un regard à la foule.

"Voici ce qui arrive lorsqu'on ose remettre en question mes décisions. Faites-en ce que vous voulez de ces malheureux morceaux." Dit Baring, contrarié.

Son autre homme de main ne termine d'enrouler le tapis, après l'avoir nettoyé des morceaux d'or. Il remet le tapis dans le coffre du véhicule et referme la porte de Baring. À son tour, il entre dans le véhicule par la porte arrière, sa main tremblant sur la poignée. Une fois le véhicule complètement fermé, il démarre et tourne sur lui-même pour se diriger vers le centre-ville d'Auroria. 

Il part après un dernier klaxon d'au revoir. La foule, intimidée par ce qui s'était passé, n'ose pas prendre un seul morceau de l'or au sol. Le cœur de Saukel bat à mille à l'heure, se disant qu'il a tout intérêt à faire ce que le banquier lui a demandé. Il décide de mettre fin à son marché suite à cet événement.

Plus tard, des gardes impériaux viennent nettoyer la scène, ayant eu vent de ce qui s'était passé. Ils gardent le silence pour ne pas avoir de problèmes avec la famille Baring. L'un des gardes remarque qu'il manque la tête, mais l'un d'eux dit qu'elle a sûrement été prise par un noble, et ils ne s'attardent pas plus.

Dans une petite échoppe modeste à l'est d'Auroria, remplie d'armes, d'objets magiques et d'autres babioles en tout genre, se trouve un marchand qui a assisté à toute la scène. Il s'agit de Like, adossé au comptoir de son magasin, caché par peur des représailles. En effet, il vient de prendre la tête de la statue de l'homme.

"Bon sang, ces gens de la haute sont des tarés ! Je vais faire passer ça pour une œuvre d'art. Je pourrais m'en tirer avec un bon paquet de pièces si je trouve quelqu'un d'assez crédule. C'est morbide, mais les affaires sont les affaires...," murmure-t-il à lui-même.

La journée passe, et la nuit s'installe. Armand vient de s'entraîner à nouveau avec maître Kaka. Après le repas du soir, celui-ci part dormir comme à son habitude. Quant à Armand, il est dans le jardin depuis quelque temps maintenant, assis sur l'herbe avec une bougie éclairant le livre posé au sol. Armand est assis en tailleur, son aura orangée. Il s'entête à créer sa gourde magique, mais il n'y arrive pas. Sa structure est très complexe, et il ne parvient pas à reproduire la pompe nécessaire.

Après une dizaine d'essais, il parvient enfin à créer une gourde avec une pompe fonctionnelle et la laisse au sol. Ses yeux passent au jaune pour observer le flux de magie entrant dans la gourde, et tout semble fonctionner correctement. Il soupire de soulagement, mais quelque chose ne va pas. La gourde semble avoir atteint sa limite, mais elle continue de grossir, pompant toujours plus de magie. Elle est bien trop grosse et semble prête à exploser, ce qui finit par arriver. Armand se protège le visage avec ses bras, son aura verte, et la gourde magique explose à bout portant sur lui.

Il reprend ensuite ses esprits et cherche du regard dans l'arbre de la maison. Il voit Pica qui dort toujours, heureusement. Il pousse un soupir avant de s'écrouler dans l'herbe, trop fatigué pour continuer aujourd'hui.

"J'avais oublié ce détail. Tu m'étonnes que ce truc est difficile à créer. Même avec ma compétence et toutes les indications de ce bouquin, c'est difficile...," pensa Armand à voix haute.

Il se relève, s'essuie derrière et retourne dans la maison, légèrement déçu, bien qu'il y était presque. En se couchant sur son lit, il repense à ce qu'il a vu aujourd'hui et à quel point cela le dégoûte. Il refuse de croire qu'il doit aussi sauver ces genres de crapules horribles comme Saukel, ignorant tout de ce qui s'est passé après son départ.

Fin du chapitre 9.

Si vous en êtes là, n'hésitez pas à me donner votre avis sur mon histoire et à me dire si je dois améliorer ou corriger quelque chose ! Cela me ferait très plaisir et me motiverait beaucoup !

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