webnovel

Il ne m'écoute jamais.

« Alors comme ça, vous avez étudié à l'étranger avant de revenir dans le pays ? » S'étonna Yamada Kiyo.

Elle semblait agréablement surprise de découvrir cela, même si Takao soupçonnait que son oncle en avait déjà parlé à la jeune femme. Après tout, ce type trouvait toujours des moyens détournés pour parvenir à ses fins.

Il semblait qu'inviter deux jeunes gens dans un restaurant français était sa façon de les faire se rapprocher sans trop d'interventions de sa part.

'Hé bien, raté, mon oncle,' pensa Takao.

Certes, il profitait d'un repas assez bon et hors de ses moyens, mais il ne se ferait pas acheter pour autant.

Même s'il s'était au départ fait capturer par la beauté plus que notable de la femme qui leur tenait compagnie ce soir.

Toutefois, il avait tôt fait de remarquer que mademoiselle Yamada était partie à la chasse aux informations, comme toute femme cherchant chaussure à son pied. Ou si possible, talon haut édition limitée de luxe à son pied.

Il se retrouvait donc dans l'inconfortable position d'un potentiel partenaire de mariage, alors qu'il n'avait pas du tout cela en tête. Elle lui posait des questions, comme si elle vérifiait une liste pré-établie, et lui, répondait, de façon à rapidement changer le sujet de la discussion en cours.

Il avait beau tenté de parler de l'entreprise et de son futur poste, ou même de la santé de son oncle, qu'au final, mademoiselle Yamada avait toujours le dernier mot.

Ce qui devenait lassant, au bout du compte ; et il se demanda si le coq au vin méritait vraiment cette torture mentale en contrepartie.

« Vous pensez reprendre l'entreprise, à la suite de votre oncle ? » Demanda-t-elle.

Ah.

Évidemment.

Cette fameuse question revenait sur le tapis, et ce n'était même pas son oncle qui en avait parlé cette fois.

Se pouvait-il qu'ils se soient mis d'accord tous les deux pour le faire changer d'avis sur le sujet ? Si c'était le cas, c'était de très mauvais goût.

« Il hésite encore, mais je pense que travailler au sein de Marline lui fera du bien, » renchérit Utagawa Tetsu.

Et allez…

C'était parti pour la valse des sous-entendus et des manœuvres de coercition.

« Donc, c'est officiel alors ? » L'interrogea Kiyo avec un intérêt renouvelé. « Il va travailler pour vous ? »

Travailler pour lui ? C'était quoi encore ces histoires ?

Il lui rendait service en occupant un poste à pourvoir pour une durée limitée, et c'était donnant-donnant.

« Je suis sûr qu'il va adorer la compagnie, et voudra en découvrir plus, » ajouta le vieux Utagawa.

Sûrement pas.

Il avait d'autres projets, et ce n'était qu'une étape pour se faire ses premières armes en tant que responsable du personnel.

Les grandes compagnies, ce n'était pas son truc. C'était trop impersonnel, trop polis, trop ordonné.

« Qui sait, il se pourrait que j'ai avant la fin de l'année un successeur, et même un petit-fils ! » Sourit avec entrain le vieil homme.

La vaisselle trembla avec un cliquetis désordonné en même temps que le poing de Takao s'abattit sur la table, rompant le fond sonore uniforme du restaurant créé par les bavardages des clients, la musique d'ambiance, et le bruit des couverts utilisés.

Le silence fut cependant bref, car comme une vague s'avançant et se retirant sur la plage, le brouhaha raffiné du restaurant reprit ses droits.

Là, ils avaient officiellement passé le point de non-retour.

« Mon oncle, il me semble vous avoir dit que je n'avais aucunement l'intention de prendre votre suite dans l'entreprise, » gronda Takao avec un regard désapprobateur.

Puis, se levant de table, il commença à fouiller dans son portefeuille pour jeter négligemment sur la table un billet de 5,000 Yen, avant de se tourner vers la jeune héritière.

« Je suis désolé, Yamada-san, mais je pense qu'il y a eu méprise sur mes intentions, » s'excusa-t-il tout en s'inclinant légèrement en avant.

Il s'empressa de quitter la table et d'aller récupérer ses affaires restées au vestiaire, laissant en plan Kiyo et le vieux Utagawa.

Ce dernier soupira longuement en grognant de frustration.

« Je suis désolé, Yamada-san, » dit Tetsu. « Mon neveu peut se montrer très têtu... »

Kiyo sourit avec sympathie, le pourpre de son rouge à lèvres brillant légèrement sous l'éclairage puissant du chandelier au-dessus de leurs têtes.

« Vous n'avez pas à vous excuser, Utagawa-san, » répondit-elle en posant son coude sur la table et en appuyant sa joue sur sa paume de main. « Chaque chose en son temps... »

Le vieil homme poussa un nouveau soupir las, et posa un regard terne sur le billet froissé posé en plein milieu de la table.

« Quel petit ingrat... » Dit-il à voix basse.

Kiyo, elle, claqua silencieusement sa langue contre ses dents.

Le premier contact avait été raté…

Ce type semblait plus difficile à percer à jour et à approcher, que tout potentiel héritier d'entreprise lambda. Il était méfiant, et refermé sur lui-même.

Elle se mit alors à sourire.

Parfait.

Ce type serait tout bonnement parfait. Surtout s'il ne se souciait pas ou peu des autres, et se fichait de l'entreprise.

« Tout va bien, Yamada-san ? » Demanda le vieux Tetsu en levant un sourcil ébouriffé.

La voix bourrue de l'homme d'affaires la fit revenir à l'instant présent, et elle décida rapidement de dissimuler son petit sourire calculateur par un sourire plus grand et plus charmant ; tout en fixant de ses grands yeux l'ami de son père.

« Votre neveu est très intéressant, Utagawa-san. J'ai hâte d'en savoir plus à son sujet. » Dit-elle avec une voix captivée.

Le vieil homme fut prit au piège par cette attitude enchanteresse, et rigola de bon cœur.

« Je t'ai déjà envoyé ses informations et son profil, en vue d'un potentiel mariage, » expliqua-t-il. « Après tout, c'est ton père qui m'a demandé de te trouver quelqu'un de convenable. Toutefois… Je pense qu'on pourrait aller plus loin. »

Oh ? Alors ce vieux filou avait déjà une autre idée en tête ?

Les choses prenaient une tournure intéressante…

« Que pensez-vous, quand vous dites 'd'aller plus loin', Utagawa-san ? » Demanda-t-elle avec un regard pétillant.

Utagawa Tetsu sembla réfléchir un moment, puis, prenant en main sa fourchette pour s'attaquer au gratin de canard posé devant lui, dit :

« Je vais avoir besoin de la permission de ton père, mais je pense qu'il comprendra, si c'est pour le bien marital de sa fille. »

Regardez ça…

Finalement, elle n'aurait probablement pas le moindre effort à fournir.

Et si tout se passait selon ses attentes, elle aurait bien plus que ce qu'elle pouvait espérer posséder.

J'aime les bons petits plats...

AreeSenseicreators' thoughts
Siguiente capítulo