Stratégie social

La porte de la chambre s'ouvrit en grand sur une fille d'environ 2 mètres de haut. La personne qui entra d'une démarche nonchalante jeta un rapide coup d'œil à la salle avant de poser son spar-sac sur le second lit et de s'assoir à côté, me faisant face.

Son visage était dur et fermé. Elle m'observait de haut en bas, ce que je ne manquais pas de faire avec elle. Ses jambes étaient croisées avec ses mains posées dessus, et sa grande queue de lézard reposait tranquillement sur le lit.

La fille qui me faisait face était clairement une demi-Kobold. Je dirais que la moitié de son corps devait être recouverte d'écailles rouges, dont sa jolie queue devant avoir une épaisseur équivalente à 2 fois la taille de mon poing. Ses chaussures, ou plutôt ses bottes en lanières, lui arrivait jusqu'aux genoux. La partie recouvrant le talon ainsi que le bout des pieds étant en métal, avec le bout légèrement en forme de griffe.

Elle avait une protection en métal au niveau de la cheville ainsi qu'au niveau des genoux. Elle portait ensuite une sorte de jupe en cuir recouverte en grande partie avec du métal et ouverte à l'avant, avec un bout de tissue vert malachite. Son haut était composé d'un débardeur noir en cuir avec 3 ceintures autours de son ventre, de deux épaulières en métal simple et d'une paire de gantelet en cuir et en métal.

Je pouvais voir qu'elle avait des écailles sur l'arrière de ses jambes, peut-être au niveau du bassin, et aussi sur les avants bras et les joues. Elle était rousse et avait une grosse et longue tresse descendant au niveau de son bassin.

Les secondes qui suivirent furent longues, silencieuses et surtout gênantes ! De mon côté, je ne pouvais m'empêcher d'admirer son corps parfaitement sculpté. Sa carrure était imposante, mais pas au point d'un bodybuildeur.

Je regardais sa queue, statique au début, mais dont le bout se mit à se soulever de manière régulière au bout d'un moment. A ce moment-là, je compris qu'elle commençait à s'impatienter. Je pouvais même sentir une légère tension dans l'air. Du coup, je finis par ouvrir la discussion. Je respirais un bon coup, puis je dis, avec une petite voix un peu timide :

- (moi) Bonjour… Je m'appelle Espérance… Et toi ?

Tout en parlant, Je me frottais l'arrière de ma tête à cause de la gêne que me procurais ces quelques paroles. De son côté, la fille répondit rapidement avec une voix impassible :

- (Astéria) Je m'appelle Astéria. Enchantée !

« Ok ! Et maintenant ? … J'ai pas de sujet de conversation en tête moi… bon bah… »

- (moi) Si on est dans la même chambre, je suppose que tu as aussi le grade A !!!

- (Astéria) Les chambres ne sont pas rangées par grade !!!

- (moi) Ah bon ? Et t'es de quel grade du coup ?

- (Astéria) Je ne suis pas obligée de répondre à cette question !!!

- (moi) Oui mais… J'essaye de sociabiliser là ! Tu pourrais pas faire un effort s'il te plait ???

J'essayai, en même temps que je parlais, de lui faire une tête de chien battu afin de la convaincre ou de l'attendrir un peu. Elle me regarda toujours avec la même expression neutre, avant de finir par répliquer :

- (Astéria) Qu'est-ce qui te dit que j'ai envie de sociabiliser ?

- (moi) Puisqu'on va passer un bout de temps ensemble, ça serait mieux de faire connaissance, non ?

- (Astéria) … De base, je voulais une chambre seule. C'est juste qu'ils n'en avaient plus de dispo !

- (moi) Certes, moi aussi je voulais une chambre pour moi toute seule ! Mais bon, tant pis ! Il va falloir faire avec. Du coup, tu ne veux toujours pas me dire quel grade tu as ?

- (Astéria) Non, et arrête avec cet air de chien battu ! C'est pas ça qui va m'affecter !!!

J'étais en train de réafficher ma plus belle tête demandant pitié à mon interlocutrice, mais il semblait qu'elle était complètement impassible… Enfin, ça, c'est juste qu'à ce que je remarque sa queue en train de se balancer de droite à gauche. Je restais donc immobile pendant quelques secondes avant de montrer mon meilleur sourire malicieux que j'avais !

- (moi) C'est marrent, j'ai l'impression que ta queue n'est pas d'accord avec toi !!!

- (Astéria) C-C'est qu'une impression !!!

Sa petite hésitation me fit dire que non, ce n'était pas qu'une impression !!! Et le remarquer avait pour effet de détendre beaucoup l'atmosphère. Je commençai à rire doucement, probablement à cause de la nervosité que j'avais accumulée pendant les précédentes minutes. Du coup, Astéria répliqua, alors que son visage commençai à se distordre un peu tant elle commençait à peiner à garder son calme !

- (Astéria) C'est… c'est pas drôle !

- (moi) Désolé ! Ça doit être les nerfs !!!

Je pris quelques instants supplémentaires pour inspirer et expirer. Pendant un moment, j'avais cru que j'allais devoir vivre ici en longeant les murs, mais au final, ma colocataire n'était pas aussi fermé qu'elle le montrait. J'étais plutôt heureuse de ce fait, mais maintenant, il était temps pour moi de revenir au sujet principale.

- (moi) Revenons-en à nos moutons ! Tu sais, même si tu ne me dis pas quel grade tu as, il me suffira juste d'aller jeter un coup d'œil au tableau des résultats pour avoir l'info !

- (Astéria) … Ok, puisque tu y tiens tant, je suis de grade A !

- (moi) … Dit moi, pourquoi tu as dit qu'on n'était pas rangé par grade tout à l'heure ? Non, laisse-moi deviner, t'as demandé l'info à l'accueil !

- (Astéria) … Cela va de soi !

« Non, ce n'est pas quelque chose que tu ferais normalement… Quoique, en vrai, ce n'est peut-être pas le cas avec les standards de ce monde. Techniquement, Samu m'avais bien dit de faire attention à ce que je faisais et avec quelle personne j'interagissais… Mais dans mon cas, c'est surtout parce que je dois faire attention à mon pouvoir… »

Sur l'instant, ça ne m'était pas venu à l'esprit mais, en y réfléchissant plus en détail, je me rendais compte qu'en fait, Astéria agissait assez prudemment ! C'est un peu comme si elle ne voulait pas s'approcher des autres… Au moins, maintenant, je commence un peu à la cerner. Même si j'ai encore un peu de mal à bien visualiser son caractère, je pense qu'il y a peut-être moyen que l'on s'entende bien.

Je me rassis bien droit sur mon lit, face à elle, avec un regard de nouveau sérieux. De son côté, elle reprit son air impassible, même si je pouvais sentir qu'elle était légèrement suspicieuse.

- (moi) Désolé si j'ai mis un peu de temps à le comprendre, mais, même avec ça, je ne pense pas que se renfermer sur soi-même et rejeter les autres soit le meilleur moyen de passer ton temps ici. Déjà parce que tu vas rapidement trouver le temps long, et aussi et surtout parce que cela risque d'attirer l'attention sur toi. Du coup, tu veux bien sociabiliser un peu ?

Elle continua de me regarder alors que je lui tendais ma main solennellement afin de lui montrer mon engagement.

Au bout d'un moment, elle finit par pousser un petit soupire et empoigna ma main avec un geste qui était peut-être naturel pour elle mais qui fut relativement douloureux pour moi ! Et pour la première fois depuis qu'elle était là, elle se mit à sourire. Un petit sourire carnassier remplit de force et d'assurance. Un sourire qui pouvait aussi bien inspirer la crainte que la confiance. Un sourire qui allait bien avec le reste de son corps et la démarche qu'elle m'avait montrée jusque-là.

- (Astéria) Ok, mais juste un peu !

- (moi) T'inquiète, je suis sure que ça fera l'affaire. Et puis, je suis sure que tu n'es pas la seule personne à cacher quelque chose dans cette académie !

- (Astéria) Et en parlant de ça, je me demande bien ce que peuvent cacher ces bracelets que tu portes à tes poignets ?

Elle affichait toujours le même sourire sur le visage, bien que ce fût le côté effrayant qui en ressortait ce coup-ci. Elle me montra le bracelet autour du poignet de la main qu'elle continuait de tenir, et elle me fit rapidement comprendre qu'elle ne me lâcherait pas tant qu'elle n'aura pas reçu de réponse satisfaisante de ma part.

Sur le moment, je paniquais un peu. Sa question m'avait vraiment prise par surprise et je commençais à balbutier quelque chose d'incompréhensible avant de me rappeler de la réflexion que j'avais eu juste avant.

Si elle est capable de dire une telle chose avec autant d'assurance, c'est qu'elle doit déjà avoir expérimenté quelque chose de similaire. Du coup, je me remobilisais rapidement et cherchait sur elle un objet qui pourrait avoir un rôle similaire à mes bracelets. Et vu que j'avais déjà eu le loisir de bien explorer son corps, il ne me fallut pas plus de quelques secondes pour en trouver un.

En fait, je devrais en dire 2 ! 2 bagues sur le majeur de chacune de ses mains. Des bagues couleurs argent avec une petite pierre blanche dessus. En termes de perception, ces bagues semblaient plutôt normales, mais si mes déductions étaient correctes, alors rien d'autre de ce que je voyais à ce moment-là ne pouvait remplir un tel rôle.

Du coup, après quelques secondes de silence, je finis par lui répondre :

- (moi) Et bien, je dirais qu'ils cachent quelque chose de similaire à tes bagues !

- (Astéria) … Tu n'es pas décidée à cracher le morceau facilement on dirait.

- (moi) Si je dois lâcher une information aussi précieuse, il faut bien que ce soit en échange de quelque chose d'aussi précieux, tu ne crois pas ?

- (Astéria) … C'est un raisonnement qui me va !

Après ça, elle finit par me lâcher la main et commença à déballer ses affaires et à ranger quelques bricoles dans l'armoire. Je la regardais faire pendant un petit moment, un peu déçu par ce dénouement, avant de finir par lui demander :

- (moi) Quoi ? C'est tout ! Tu ne veux pas savoir ce que je cache ?

- (Astéria) Pour quoi faire ? Tu as tes problèmes et j'ai les miens ! Ça ne sert à rien de se les partager ! Au pire, je me dis que tu finiras par faire une erreur qui révèlera ce que tu caches !

- (moi) C'est… euh… Ouais… C'est vrai…

- (Astéria) Tu sais, parfois, il y a des choses qu'il vaut mieux garder secret. Je sais pas pour toi, mais dans mon cas, ça peut être très grave pour mon futur si des gens savaient ce que je cache.

- (moi) … T'as raison. C'était vraiment impoli de ma part. Je ferais plus attention la prochaine fois !

Elle continua de ranger ses affaires alors que moi, je la regardai faire, profitant du moment pour mieux l'admirer de dos. Je pouvais voir que son bas était retenu à sa queue par une petite ceinture, et je pouvais aussi constater qu'elle semblait effectivement avoir des écailles tout autour du bassin. Cependant, mon manque d'action finit par être remarqué alors qu'elle avait pratiquement finit de ranger ses affaires. En me voyant toujours sur mon lit à ne rien faire, elle s'interrogea :

- (Astéria) Tu n'as pas d'affaire à ranger ? J'ai pas l'impression qu'il y a quoi que ce soit dans ton armoire ! A moins que… tu sois trop occupée à me regarder… !

Tout en disant ça, elle eut comme un déclic ! Et après ça, elle changea complètement sa posture en plaçant sa main sur son bassin qui se décalait lui-même sur le côté, de façon un peu provocatrice. Son visage aussi devint beaucoup plus provocateur, tout comme son ton, plus étiré, et plus piquant, aussi !

- (Astéria) Je vois ! En fait, ton seul intérêt, c'était juste de te rapprocher de moi… Et de mes courbes !!!

En l'entendant, je devins instantanément toute rouge. Même si je ne pouvais pas me voir dans une glace, je sentais le sang me monter à la tête ! Elle m'avait clairement percée à jour, et je n'avais strictement plus rien pour me défendre !

« Repli stratégique !!! Repli !!! Vite, une diversion !!! »

Sans plus réfléchir, je sautais sur mon spar-sac et commença à ranger maladroitement mes affaires dans mon armoire, faisant tomber quelques truc au passage et les ramassant juste après, alors que je pouvais entendre clairement ma nouvelle amie rire de bon cœur dans mon dos. Je savais qu'elle devait se délecter de mon embarras évident, mais au final, ça ne me dérangeai pas vraiment.

Après que je me sois calmer et rassit sur mon lit, elle finit par me dire avec un air très décontracté, contrastant avec ce qu'elle avait montré lorsqu'elle était entrée dans cette pièce :

- (Astéria) Tu sais, tu as beau être très mignonne, je préfère quand même les mâles. Désolé !

- (moi) … Aucun problème, je comprends…

Même si elle semblait me rejeter, je ne pouvais m'empêcher de sourire doucement en l'écoutant. Evidemment, ce fut un détail qu'elle remarqua assez facilement, et évidemment, ce fut un détail qu'elle fut incapable de comprendre…