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Prologue : Arriver trop tard

 En ouvrant les yeux, il se trouve confronté à un cauchemar éveillé : les maisons s'embrasent, des âmes en détresse s'égarent, cherchant en vain un refuge. Lui aussi, semble condamné à se perdre dans cette fournaise. Chaque pensée semble n'être que l'écho de l'absurdité d'une présence divine. Leur douleur, ils la portent en silence, leur foi éteinte.

 Pourtant, curieusement, l'idée de fuir ne lui vient pas à l'esprit. Peut-être parce qu'il doute de sa capacité à y parvenir. Fuir vers où, de toute façon ? Cette question lui traverse l'esprit alors qu'il croise des regards glacés et un sourire sinistre qui fige le sang.

- "Pourquoi devons-nous endurer cela ? Pourquoi...?"

 Il fait l'effort de se redresser, mais à peine se tient-il sur ses jambes qu'il s'effondre sur le sol, couvert de cendres provenant des bâtiments dévorés par les flammes. Son impuissance est totale. Peu importe les efforts déployés, il est trop affaibli.

 Pourtant, il refuse d'abandonner l'espoir. Il veut croire en l'issue espérée. Même si le destin lui jette de la boue au visage, le repousse, il se relèvera autant de fois qu'il le faudra, avançant péniblement. Même si chaque pas le mène inexorablement à une chute, il se relèvera et fera un nouveau pas. Il répétera ce schéma inlassablement, jusqu'à atteindre le bout du chemin.

 La mort, il ne l'acceptera pas, du moins pas dans ce village réduit en cendres. Il se promet de se battre, de surmonter, car au fond de son cœur, brûle une flamme d'indomptable résilience.

 Le garçon, à peine âgé de treize ans, voit ses yeux bleus virer au rouge. Une soudaine vague d'énergie jaillit en lui, pulsant à travers ses veines, le galvanisant.

 Il se relève avec une détermination farouche, ignorant la douleur qui martèle son corps meurtri. Chaque souffle semble désormais porteur d'une force nouvelle. Dans le chaos qui l'entoure, il repère un chemin étroit, à peine visible à travers les ruines en flammes. C'est vers là qu'il se dirige, un pas après l'autre, la volonté chevillée au corps.

 Alors qu'il avance, les hurlements et les cris semblent s'estomper, remplacés par le martèlement de son propre cœur, rythmant sa progression résolue. Chaque ruine, chaque obstacle, il les franchit, guidé par l'éclat d'un espoir fragile mais tenace.

 Soudain, au détour d'une rue en ruines, il aperçoit une silhouette familière, émergeant de l'ombre des décombres. C'est son amie d'enfance, les yeux écarquillés d'effroi, tremblante mais en vie.

 Elle lève les yeux, son visage marqué par la saleté et les larmes. Un sourire timide naît sur ses lèvres, un sourire qui en dit long sur le soulagement de retrouver son ami.

 Mais tout n'est qu'un rêve éphémère. En un battement de cil, il se retrouve à l'entrée du village, à quelques pas de son objectif. Au lieu de foncer de l'avant, il s'effondre, tenant son amie d'enfance inconsciente contre lui.

 C'est là qu'une angoissante question l'envahit : "Est-elle seulement inconsciente ? Est-elle toujours en vie ?" Il n'a pas le temps de vérifier, car il perd connaissance à son tour.

 Lorsqu'il reprend ses esprits, tout est flou. La réalité se mêle à des éclats de souvenirs brumeux. Il se rend compte qu'ils sont dans un endroit différent, très sombre. Son amie gît toujours à ses côtés, respirant faiblement.

 Il la secoue doucement, l'appelant par son nom.

- "Rin !"

 Les paupières de Rin s'ouvrent lentement, révélant des yeux ternes, mais conscients.

Rin : "Solio..." articule-t-elle, sa voix à peine perceptible.

 Un soupir de soulagement traverse Solio. Rin est là, vivante, vulnérable, mais bien présente. Il la serre doucement, sentant l'incertitude s'évaporer peu à peu.

 Pourtant, un changement s'opère,

Rin : "Je suis désolée..."

 Soudain, son souffle se coupe, tandis que l'ultime lueur d'espoir s'éteint comme une sphère blanche perdant sa lumière.

 Puis, un silence profond.

***

 Le soleil commence tout juste à éclairer l'horizon. L'air est vif, l'herbe fraîche sous leurs pas, givrée par la rosée du matin. Une quiétude règne à l'extérieur, brisée soudain par des pas précipités et déterminés.

 Ces bruits appartiennent à un couple qui se hâte en direction de la vaste forêt menant à un mystérieux village, un lieu que les humains ne sont pas autorisés à approcher. Selon une loi édictée par des êtres mi-humains, mi-esprits, dotés de caractéristiques mystiques et d'une énergie magique prodigieuse, aucun être humain ne peut pénétrer dans ce village.

 Pourtant, ce couple se prépare à contourner cette fameuse loi. En temps normal, une barrière magique impénétrable les stopperait net, mais pas aujourd'hui.

 Un homme aux cheveux bruns courts atteint en premier la barrière rouge, à travers laquelle on devine un sentier s'enfonçant plus profondément dans la forêt. Cette barrière quasi-translucide fait office de rempart infranchissable pour protéger le village des intrus. Dressée il y a près d'un millénaire, elle n'a jamais montré de signe de vulnérabilité jusqu'à aujourd'hui.

 L'homme tend la main droite et la pose contre ce mur magique, puis ferme les yeux. C'est à ce moment précis que la femme, aux longs cheveux blonds et aux yeux verts comme des émeraudes, finit par le rejoindre.

 Lorsque l'homme rouvre les yeux, des iris bruns, assortis à son t-shirt, se révèlent. Il retire sa main de la barrière avant de saisir un colt M1911 rangé dans son étui, attaché à une ceinture noire qui encercle un pantalon de la même teinte. Il vérifie le chargeur de son arme de pointe, s'assurant qu'elle est prête, tandis que la femme se dote d'un petit bâton en métal qui, dès qu'elle presse un bouton du pouce, se déploie en une lance.

- "Nelson, qu'est-ce qui ne va pas avec la barrière ? Elle s'affaiblit ?" interroge la femme, se tenant aux côtés de l'homme face à la barrière.

Nelson : "En réalité, je dirais même qu'il ne reste que de minuscules particules du mana qui la constituait." répond-il, en pressant sa main contre la barrière qui se fragmente en plusieurs dizaines de morceaux.

 La femme reste sidérée. Contrairement à Nelson, elle ne perçoit pas la barrière magique.

Nelson : "Pour être franc, je n'aurais jamais pensé qu'il puisse arriver un jour que la barrière protectrice du village des gardiens de la forêt des esprits en vienne à cet état. Le fait est que nous devons aller voir ce qu'il s'est passé. Tu me suis, Talia ?"

 La femme, répondant au nom de Talia, hoche la tête en signe d'approbation aux paroles de Nelson.

Talia : "Allons-y."

 Ils franchissent ensemble les fragments étincelants de la barrière, pénétrant ainsi dans l'enchevêtrement mystique de la forêt. L'atmosphère est imprégnée d'une énergie palpable, chaque arbre semblant respirer avec sa propre essence magique. Des murmures feutrés des esprits de la forêt résonnent autour d'eux, porteurs d'avertissements et de secrets longtemps gardés.

 Alors qu'ils avancent, les ombres des arbres se referment sur eux, créant un chemin sinueux et mystérieux. Ils sont guidés par une intuition profonde, une connaissance tacite des lieux, comme si leurs âmes avaient toujours été liées à cette forêt. Chaque pas les rapproche du village, chaque souffle les enveloppe davantage dans le voile du mystère.

 Talia resserre la prise sur sa lance, ses yeux verts scintillants de détermination. Nelson marche à ses côtés, son regard scrutant les environs avec une vigilance aiguisée.

 En atteignant leur destination, le couple est frappé par la vision d'un village en ruines.

Talia : "Voilà ce qu'est devenu le village dans lequel tu vivais, Ali..." murmure-t-elle à une amie qui ne pourra plus jamais l'entendre.

 Le village semble sortir tout droit d'un cauchemar postapocalyptique. Les bâtiments s'effondrent dans les cendres, et un étrange brouillard grisâtre, sans doute composé des résidus des maisons calcinées, s'étend partout, rendant la visibilité quasiment nulle

 Devant eux, ils distinguent avec peine une silhouette humanoïde s'approcher de l'entrée. Incapables d'identifier avec certitude l'identité de la personne, ils la voient s'effondrer, tout comme les bâtiments un peu plus tôt.

 À peine font-ils un pas que leurs oreilles captent un gémissement, une voix semblant être celle d'un jeune adolescent.

 Talia, décidée, lève son bras armé de la lance et frappe avec vigueur le brouillard de cendre. Il se disperse sous l'impact.

 Le couple est à nouveau frappé par une découverte inattendue. Devant eux se trouve un jeune garçon aux courts cheveux bruns, en pleurs, tenant dans ses bras le corps inerte d'une jeune fille.

 Soudain, des pas plus assurés retentissent, suivis d'un rire discordant dans ce sinistre décor.

- "Tu es si pathétique, Solio ! Tu ne pourras pas m'échapper, encore moins avec cette gêne que tu tiens dans tes bras !"

 Talia est submergée par une rage incontrôlable à ces mots. Nelson la retient en posant une main sur son épaule. Elle s'apprête à avancer, mais Nelson pose sa main sur son épaule, puis lui fait signe de ne faire aucun bruit. Elle lui fait confiance et attend en silence.

- "Elle ne s'en sortira pas ! Elle n'est qu'un fardeau t'empêchant de lutter contre ta destinée."

 Les bruits de pas se rapprochent, le garçon, agrippé à la jeune fille, semble pris d'une angoisse croissante. Il n'a pas encore remarqué Nelson et Talia qui observent, prêts à découvrir l'identité de celui qui semble s'amuser à torturer l'esprit déjà tourmenté du garçon aux vêtements déchirés.

- "Tu me serviras pour mes idéaux ! Tu m'aideras à réaliser mon rêve, que tu le veuilles ou non !"

S'approchant de l'oreille de sa femme, Nelson lui murmure quelque chose.

Nelson : "Talia, as-tu remarqué ?" chuchote-t-il.

Talia : "Remarqué quoi ?"

Nelson : "Cette voix ne te semble pas familière ?"

 La femme prête soudainement une oreille plus attentive à la mystérieuse voix.

- "Tu ne peux pas te cacher ! C'est inutile !"

 Talia écarquille les yeux en reconnaissant la voix.

Talia : "Non... ça ne peut pas être lui."

 Après une longue minute à écouter les bruits de pas s'approcher de l'entrée du village, l'homme fait enfin son apparition devant le duo. Cependant, il ne les remarque pas immédiatement.

 Bien que l'homme ne semble pas très âgé, Nelson et Talia savent qu'il a dépassé la trentaine. Ses cheveux noirs sont courts, ses yeux d'un bleu sombre portent les stigmates de nuits sans sommeil. Ses vêtements sont simples : un t-shirt noir, un pantalon gris et des chaussures blanches.

Nelson : "Ça faisait longtemps, n'est-ce pas, Scar ?"

 L'homme finit enfin par remarquer le couple, qui se tient prêt, conscients du danger qu'il représente.

 Un sourire se dessine sur les lèvres de Scar.

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